Adolescent suicidaire rapport de stage ados suicide suisse romande adolescence
Prévention secondaire du Suicide INTRODUCTION Les données de la littérature sur
la prévention du suicide sont abondantes pour la prévention primaire et la
prévention tertiaire mais pauvres pour la prévention secondaire. Cela tient au
fait que les premières manifestations de la crise suicidaire sont difficiles à
cerner : ses aspects sont très variables, les troubles sont parfois
inapparents, lorsqu'ils existent ils se manifestent par des signes peu
spécifiques et permettent peu de prévoir si la crise va évoluer vers une
rémission spontanée ou vers une tentative de suicide ou d'autres passages à
l'acte. Il n'y a pas un consensus international sur ses critères de définition.
Pourtant il est essentiel de repérer une telle crise suicidaire car elle
justifie une prise en charge et constitue un moment fécond où une action
thérapeutique est possible. C'est pourquoi la Fédération Française de
Psychiatrie a estimé qu'il serait utile d'organiser une conférence de consensus
sur ce sujet. La principale difficulté est venue de cette pauvreté des données.
Quelques adresses de références dans la prévention ou
l'information sur le suicide:
www.ipsilon.ch
www.coordination-suicide.ch
Main tendue tél: 143
www.fr-preventionsuicide.ch
www.stopsuicide.ch
www.communicafe.ch
Voir aussi
Internement psychiatrique
Bibliographie
-
Le suicide chez les romains,
Gabriel Matzneff
-
Le suicide,
Émile Durkheim
-
Suicide, Mode d'emploi, Claude Guillon et Yves le Bonniec,
éditions Alain Moreau, 1982 (ISBN
2-85209-000-7), livre censuré en France
-
La France du suicide, Pr Michel Debout, éditions
Stock
-
Tomber sept fois, se relever huit,
Philippe Labro,
éditions Albin Michel 2003
-
[pdf]
Suicide et tentatives de suicide, M. de Clerc, Louvain Med. 117:
S502-S508, 1998.
Liens externes
Liens externes
-
Ethics Side of Suicide - Ethical issues associated with suicide
treatment, intervention and facilitated suicide.
-- http://members.tripod.com/~LifeGard/index-3.html
Society: Death: Suicide (139)
-
Suicide: Read This First
- Short page dealing with suicide, geared towards people considering
killing themselves.
-- http://www.metanoia.org/suicide/
Health: Mental Health: Disorders: Suicide (130)
-
#1 Teenage Suicide.com - Focuses on prevention and includes danger
signs and help with teenage depression.
-- http://www.1-teenage-suicide.com/
Kids and Teens: Teen Life: Suicide (24)
-
National Review: Crossbows and Suicide Bombers - Jonah Goldberg on
calling suicide terrorist acts cowardly.
-- http://www.nationalreview.com/goldberg/goldberg081001.shtml
Society: Issues: Terrorism: Suicide (11)
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Trecias Suicides Memorial List - Memorials to those lost to suicide.
-- http://usa.ultimatetopsites.com/general/treciababy/
Society: Death: In Memoriam: Suicide (7)
-
The Village Voice: Suicide Watch - Feature article about Alan's
visual art by Simon Reynolds.
-- http://www.villagevoice.com/issues/0205/reynolds.php
Arts: Music: Bands and Artists: S: Su: Suicide (10)
-
Apollo Movie Guide - Suicide Kings - Review, links, and cast
information.
-- http://apolloguide.com/mov_revtemp.asp?CId=648
Arts: Movies: Titles: S: Suicide Kings (5)
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Longwood University's Guide to Web Sites and Literature on
Doctor-Assisted Suicide - A comprehensive listing of physician
assisted dying resources from a variety of perspectives.
-- http://web.longwood.edu/administrative/library/suic.htm
Society: Issues: End-of-Life: Euthanasia: Assisted Suicide (6)
-
Centre de prévention du suicide de Québec - Informations concernant
la prévention du suicide: statistiques, facteurs de risques, signes
précurseurs. Québec. Canada.
-- http://www.cpsquebec.ca/
World: Français: Santé: Santé mentale: Troubles mentaux: Suicide
(12)
-
Ethical Issues in Terminal Health Care - Articles and essays on
patients' rights, Ethics Committees, the Right-to-Die Debate, and
Physician Assisted Suicide.
-- http://www.cp.duluth.mn.us/~ennyman/ethics.html
Society: Issues: End-of-Life (15)
-
The Culture of Martyrdom: How Suicide Bombing Became Not Just a Means But
an End - David Brooks examines how suicide bombing has dramatically
changed the nature of the conflict. From the Atlantic Monthly.
-- http://www.theatlantic.com/issues/2002/06/brooks.htm
Society: Issues: Warfare and Conflict: Specific Conflicts: Middle East:
Israel-Palestine: Terrorism: Suicide Bombing (20)
-
Suicide Survivor FAQs - Some frequently asked questions about suicide
survivors.
-- http://lifegard.tripod.com/ssfaqs.html
Society: Death: Suicide (139)
-
All About Suicide - Mental Health Net - Learn all about suicide --
what it is and what you can do to help yourself.
-- http://suicide.mentalhelp.net/
Health: Mental Health: Disorders: Suicide (130)
-
Preventing Teen Suicide - Some things you should know about
preventing teen suicide, provided by the American Academy of Pediatrics.
--
http://www.aap.org/advocacy/childhealthmonth/prevteensuicide.htm
Kids and Teens: Teen Life: Suicide (24)
-
AJCongress on Muslim Decree Allowing For Women Suicide Bombers -
Statement by American Jewish Congress Executive Director Phil Baum
calling on Muslim and non-Muslim religious leaders to condemn the decree
of the Saudi Arabia High Islamic Council that women can serve as suicide
bombers.
--
http://www.ajcongress.org/pages/RELS2001/AUG_2001/aug01_01.htm
Society: Issues: Terrorism: Suicide (11)
-
Colarusso, Anthony R. III - Dedicated to their son Tony who committed
suicide in 1996. You may submit a memorial that will be included on the
site.
-- http://www.godhearsyou.net/
Society: Death: In Memoriam: Suicide (7)
-
TrouserPress.com: Suicide - Review of the duo's career and
recordings, together and solo.
-- http://trouserpress.com/entry.php?a=suicide
Arts: Music: Bands and Artists: S: Su: Suicide (10)
-
All-Reviews.com: Suicide Kings - Reviews by Steve Rhodes and others.
Overall Rating: 3 Stars out of 4.
-- http://www.all-reviews.com/videos/suicide-kings.htm
Arts: Movies: Titles: S: Suicide Kings (5)
-
Ayn Rand Institute: Thomas Bowden - "Assisted Suicide: A Moral Right"
- Bowden argues that assisted dying is an American right.
-- http://www.aynrand.org/medialink/asuicideright.shtml
Society: Issues: End-of-Life: Euthanasia: Assisted Suicide (6)
-
Centre de Prévention du Suicide - Le centre de prévention du suicide
est à l'écoute, 24h/24h et dans l'anonymat, des personnes en détresse ou
ayant des pensées suicidaires, ainsi que de leurs proches. Bruxelles.
Belgique.
-- http://www.preventionsuicide.be/
World: Français: Santé: Santé mentale: Troubles mentaux: Suicide
(12)
Adolescent suicidaire rapport de stage ados suicide Suisse romande
adolescence, un rapport de stage de Celine Terraz sur la problématique de
l'adolescence en suisse romande.
Plusieurs raisons motivent le choix de ce sujet de mémoire,
elles sont d’ordre social, personnel et professionnel.
La raison d’ordre social s’explique par le fait que j’ai vécu
mon enfance et mon adolescence dans un village de montagne d’environ 2'800
habitants. La petitesse de ce dernier permet d’être facilement au courant de la
vie des habitants. Les mariages, les naissances ou les décès sont généralement
connus par les villageois, contrairement aux milieux citadins où la population
vit plus anonymement.
Pendant mon adolescence, j’ai été sensible et interpellée du
nombre de décès par suicide. Je me suis demandée, pourquoi ces personnes avaient
commis cet acte ? Et pourquoi elles avaient préféré la mort à la vie ? Ces
interrogations sont restées sans réponse, camouflées par le silence régnant dans
la famille et les proches.
La raison d’ordre personnel rentre en ligne de compte par le
fait que j’ai côtoyé des jeunes adultes dont la vie n’avait plus raison d’être,
ces conversations m’ont rendues perplexe, car cesser de vivre signifie mourir.
La mort est un sujet peu abordé dans notre société ; elle est probablement
appréhendée en raison des souffrances précédant la mort, du deuil traversé par
les personnes vivant la séparation de l’être aimé, et des interrogations
philosophiques portant sur l’immortalité de l’âme. Le mal-être de ces jeunes
adultes a suscité mes interrogations sur le suicide et les tentatives de
suicide.
La raison d’ordre professionnel découle des stages pratiques
effectués pendant ma formation d’éducatrice spécialisée, où j’ai rencontré des
adolescents parlant de leurs souffrances, de leur solitude et de leur désir de
mort. Mise à part mon écoute, je ne savais pas quelle démarche entreprendre avec
eux. J’ai trouvé un bon écho auprès de mes collègues dans les institutions de
stage, toutefois je les ai sentis aussi démunis que moi. Les deux points
suivants abordent les buts de la recherche et la méthode de travail.
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Définition
Le suicide (du latin sui cadere, se tuer soi-même) est l'acte délibéré
d'en finir avec sa propre vie.
- Dans le domaine médical, on parle aussi d'autolyse
(destruction — suffixe -lyse — appliquée à soi-même — préfixe auto).
Pour considérer qu'on est en présence d'un suicide, la
mort doit être
l'intention de l'acte et non simplement une de ses conséquences. Un
attentat-suicide, par exemple, sera considéré comme relevant plus d'une
action
terroriste que du suicide.
Si le suicide a des conséquences légales, il doit être généralement prouvé
qu'il y a eu intention et mort pour que l'acte soit qualifié de suicide selon la
loi.
Religion et société face au suicide
Généralités
Il est considéré comme un
péché dans
beaucoup de religions et comme un
crime selon
certaines législations. La raison est la même dans les deux cas : on sanctionne
une personne pour avoir voulu disposer de sa vie alors que cette dernière est
censée appartenir à quelqu'un d'autre, Dieu ou souverain.
Asie
Dans d'autres cultures, le suicide peut être accepté socialement. En Asie, il
existe des formes de suicide ritualisé comme les
jauhâr et
satî indiens. Le
seppuku
japonais quant à lui est un suicide vu comme une issue honorable face à
certaines situations perçues comme trop honteuses ou sans espoir.
Selon les enseignements de
Bouddha,
notre passé influence notre présent et ce qu'un individu fait à ce moment
présent a une conséquence sur son avenir, dans cette vie ou dans la suivante. Il
y a un lien de cause à effet. C'est le
karma, toute
action intentionnelle du corps, de l'esprit ou de la parole a une réaction et sa
répercussion est la raison des différences et conditions de notre existence à
travers le monde.
La souffrance de quelqu'un est donc la conséquence d'actions négatives du
passé ou simplement le fait d'être dans le
sams_ra (le cycle de vie et de mort). Une autre raison de la souffrance est
le fait de vivre perpétuellement dans l'impermanence. Puisque toute chose est
dans un état constant de flux, l'individu souffre d'insatisfaction face au flux
des évènements de la vie. Pour sortir du sams_ra, il suffit de réaliser sa
« nature vraie » à travers le
Bodhi (l'éveil) dans le moment présent : c'est le
Nirv_na.
Pour les Bouddhistes, étant donné que le premier précepte est d'empêcher la
destruction de la vie (y compris soi-même), le suicide est clairement considéré
comme une forme d'action négative. Malgré ce point de vue, une ancienne pratique
asiatique semblable au seppuku se maintient et les Bouddhistes peuvent commettre
un acte d'« honorable » suicide en cas d'oppression. Ainsi, les moines tibétains
ont utilisé cette idéologie pour protester contre l'occupation chinoise du
Tibet et les
violations des droits de l'homme envers les Tibétains par la
Chine.
Chez les hindous et les jaïns, se suicider est considéré comme un péché aussi
grave que tuer autrui. Cependant, dans certaines circonstances, il est considéré
comme acceptable d'en finir avec la vie en
jeûnant. Cette
pratique, appelée prayopavesha, nécessite tant de temps et de volonté
qu'il n'y a aucun risque que cela soit fait impulsivement. Cela laisse aussi le
temps à l'individu de régler ses affaires, de réfléchir à la vie et de se
rapprocher de Dieu.
Un cas historique et célèbre est celui de
Chandragupta Maurya qui renonça au trône, se rendit dans le
Karnataka,
se fit moine jaina à
Shravana-Belgola et mit fin à ses jours en commettant le suicide rituel par
inanition.
Monde occidental
Le suicide est perçu assez différemment selon les cultures et si dans les
sociétés occidentales il a longtemps été considéré pour immoral et déshonorant,
il est dans d'autres sociétés justement le moyen de recouvrir un honneur perdu.
Paganisme antique
Dans l'empire romain, il était d'usage qu'un proche de l'empereur désirant
mettre fin à ses jours en demande au préalable l'autorisation à ce dernier. On
en trouve l'illustration par exemple dans les
Mémoires d'Hadrien.
Le christianisme est traditionnellement opposé au suicide ainsi qu'au suicide
assisté. Ceci permet de comprendre en partie le débat sur l'euthanasie
Dans le
catholicisme en particulier, le suicide a été considéré comme un
péché grave.
L'argument principal est que la vie de tout un chacun est la propriété de
Dieu et que la
détruire est donc interprétable comme un signe d'affirmation de domination sur
ce qui appartient à Dieu. Cette idée a été illustrée par le suicide de
Judas après qu'il
ait dénoncé Jésus.
Cet argument a donné suite au fameux contre-argument de
David Hume
en faisant remarquer que s'il était mal de prendre la vie quand une personne
devrait naturellement vivre, cela devrait être aussi mal de sauver la vie quand
une personne devrait normalement naturellement mourir, comme il semblerait que
cela contrevienne à la volonté de Dieu.
Beaucoup de chrétiens croient en la sainteté de la vie humaine, ce qui
signifie que toute vie humaine est sacrée (une création magnifique, voire
miraculeuse de Dieu) et qu'il faut donc faire tout ce qui est en notre pouvoir
pour la préserver et la sauver.
Néanmoins, même si le suicide est généralement condamné (les âmes perdues
n'accèdent pas au
paradis), les chrétiens « libéraux » reconnaissent que les personnes qui se
suicident sont dans un état de détresse et de déprime et pensent donc que Dieu,
dans sa grande générosité et son amour, pardonne un tel acte.
Autres sociétés
Comme les autres religions abrahamiques, l'Islam voit le suicide comme un
péché et un obstacle à l'évolution spirituelle. Cependant, les êtres humains ne
sont pas infaillibles et peuvent commettre des erreurs.
Allah leur
pardonne les péchés s'ils sont sincères dans leur
repentir.
Pour ceux qui renoncent à croire en Dieu, les conséquences sont mauvaises. En
effet, dans le Coran,
le livre saint des
musulmans,
si Allah est infiniment grand et miséricordieux, pardonnant tous les péchés, il
en est cependant un qui est impardonnable : l'incroyance. Selon la
Sunnah (livre
sur la vie du prophète
Mahomet),
celui qui se suicide et n'en montre aucun regret passera une éternité en
enfer, effectuant
sans cesse l'acte par lequel il s'ôta la vie.
En dépit de ce fait, il existe une croyance selon laquelle les actions
commises dans le cadre du
Jihad menant à sa
propre mort ne sont pas considérées comme un suicide même si l'acte en soi ne
peut qu'entraîner sa propre mort (comme dans les attaques suicides). Ces actes
sont considérés au contraire comme une forme de
martyre et
ceci bien que dans le Coran il soit expressément écrit que ceux qui tuent des
innocents sont des pécheurs et transgressent la loi de Dieu. Néanmoins, beaucoup
affirment que l'Islam permet d'utiliser le suicide pour lutter contre
l'injustice et les oppresseurs s'il n'existe absolument pas d'autre option
possible et que sinon la vie se terminerait de toute façon en mort.
Le judaïsme voit dans le suicide un des péchés les plus graves. Le suicide a
toujours été interdit par la loi juive à l'exception de trois cas bien précis :
si quelqu'un est forcé par autrui à commettre un meurtre, s'il est forcé à
commettre un acte d'idolâtrie, ou s'il est forcé à commettre un adultère ou un
inceste. Dans ces trois cas seulement, le suicide est permis. Dans tous les
autres cas, le suicide est interdit et cette interdiction comprend la
participation à un suicide assisté. D'ailleurs, personne ne devrait demander à
quelqu'un d'autre de l'aider à se suicider puisque d'une part le suicide est
strictement interdit et d'autre part il ou elle pousserait l'autre à commettre
un péché.
Autres traditions
Dans la culture
Inuit traditionnelle, les vieilles personnes se laissaient mourir de froid
quand elles devenaient une charge trop importante pour leur proches.
Le suicide dans l'histoire
Suicides célèbres
-
Cléopâtre
-
Hannibal
- Néron,
empereur,
poète,
comédien
et musicien
romain. Selon
certains, il n'aurait pas osé se suicider tout seul et aurait demandé à un
proche de lui enfoncer la lame dans le coeur.
-
François Vatel, intendant aux fêtes du
Grand Condé
-
Paul Lafargue, homme politique français, avec son épouse, par refus de la
vieillesse
-
Yukio Mishima, écrivain japonais par
seppuku
-
Adolf Hitler, dictateur allemand qui s'est donné la mort pour éviter de
capituler
-
Pierre Bérégovoy, homme politique français
-
Walter Benjamin, théoricien de l'art
-
Ernest Hemingway
-
Marilyn Monroe se serait apparemment suicidé
- Primo
Levi
-
Romain Gary
- Kurt
Cobain.
Voir aussi :
Liste de suicidés célèbres
Dans l'Antiquité,
le suicide était commis après une défaite dans une bataille afin d'éviter la
capture et les possibles tortures, mutilations ou la mise en
esclavage
par l'ennemi. Ainsi,
Brutus et
Cassius, les
assassins de
Jules
César, se suicidèrent suite à la défaite de la
bataille de Philippes. Les
Juifs de
Massada
offrent un autre exemple en se suicidant massivement en
74 av. J.C. pour
échapper à la mise en esclavage par les
Romains.
Dans la société romaine, le suicide était un moyen accepté par lequel on
pouvait préserver son honneur. Ceux qui étaient jugés pour des crimes capitaux
par exemple pouvaient empêcher la confiscation des biens et propriétés familiaux
en se suicidant avant la condamnation par le tribunal. On soulignait alors
ironiquement que
Domitien,
l'empereur romain, montrait sa pitié et miséricorde en permettant à un homme
condamné de se suicider.
À la fin du
XVIIIe siècle,
Goethe publie
« Les
Souffrances du jeune Werther » (Die Leiden des jungen Werther), une
histoire romantique où le jeune Werther se suicide parce que son amour est
inaccessible. Le roman connaît un réel succès et cause une vague de suicides en
Allemagne.
Émile Durkheim, fondateur de la
sociologie,
publie en 1897 son
fameux livre Le suicide où il analyse ce phénomène sous un angle social.
Il distingue trois sortes de suicides : le suicide égoïste, le suicide altruiste
et le suicide
anomiste. Dans chaque cas, la désintégration sociale est la cause première
véritable:
- le suicide altruiste est particulièrement développé dans les sociétés où
l'intégration est suffisamment forte pour nier l'individualité de ses membres ;
- le suicide égoïste est au contraire le signe d'une société trop
destructurée pour fournir un motif valable d'existence à certains de ses
individus ;
- le suicide anomique est dû à des changements sociaux trop rapides pour que
les individus puissent adapter leurs repères moraux.
Le poète
Alfred Alvarez publie une étude sur le suicide en littérature intitulée
Le dieu sauvage ; essai sur le suicide.
Jean Améry publie en 1976 un livre sur le suicide où il défend la thèse
selon laquelle le suicide représente l'ultime liberté de l'humanité. Il se
suicide deux ans plus tard.
Politique et suicide
Le suicide a été utilisé dans l’histoire comme un acte politique d’opposition
et de contestations. Nous ne traiterons pas de l’attentat-suicide,
Le suicide peut être un acte politique, proche du
martyr. Dans le
japon médiéval toute critique du
Shogun
s'accompagnait d'un
seppuku de
l'accusateur. Plus récemment
Jan Palach
et de
Jan Zajíc se sont immolés en
1969 pour protester
contre la répression soviétique du
printemps de Prague, tout comme trois membres des
moudjahidines du peuple iranien l'ont fait en
2003 pour dénoncer
l'arrestation de
Maryam Radjavi par la police française.
Le suicide et la loi
Il fut des États où, ironiquement, le suicide pouvait être condamné par la
peine de mort, ce qui permettait au candidat au suicide d'atteindre son but
légalement s'il échouait !
En France, le suicide est une liberté civile, c'est-à-dire qu'il est permis
au sens où la loi ne le réprime pas. En revanche, la loi entérine la réprobation
sociale dont le suicide est entaché : l'aide au suicide est prohibée pour
« abstention volontaire de porter assistance à personne en péril » (article
223-6 du
Code pénal, concept plus connu sous le nom de « non-assistance
à personne en danger »). Elle peut même être qualifiée de « provocation au
suicide » (art. 223-13).
La
Cour européenne des droits de l'homme, dans son arrêt Pretty c.
Royaume-Uni du
29 avril
2002, a déclaré à
l'unanimité que le suicide n'entrait dans le champ d'aucun
droit de l'homme, ni de l'article
2 de la
Convention protégeant le
droit à la vie :
- « En conséquence, la Cour estime qu’il n’est pas possible de déduire de
l’article 2 de la Convention un droit à mourir, que ce soit de la main d’un
tiers ou avec l’assistance d’une autorité publique. »
Le suicide assisté ou
euthanasie
fait l'objet de débats. En
France, il est
actuellement condamné comme
homicide.
Il est autorisé dans des pays comme les
Pays-Bas et
la Belgique.
L'assistance au suicide
- Dans certain pays, l'assistance au suicide est autorisée,
Suicide et assurances
En France,
l'article L132-7 du Code des assurances dispose:
L'assurance en cas de décès est de nul effet si l'assuré se donne
volontairement la mort au cours de la première année du contrat.
L'assurance en cas de décès doit couvrir le risque de suicide à compter de la
deuxième année du contrat. En cas d'augmentation des garanties en cours de
contrat, le risque de suicide, pour les garanties supplémentaires, est couvert à
compter de la deuxième année qui suit cette augmentation.
Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables aux contrats
mentionnés à l'article L. 140-1 souscrits par les organismes mentionnés au
dernier alinéa de l'article L. 140-6.
L'assurance en cas de décès doit couvrir dès la souscription, dans la limite
d'un plafond qui sera défini par décret, les contrats mentionnés à l'article L.
140-1 souscrits par les organismes mentionnés à la dernière phrase du dernier
alinéa de l'article L. 140-6, pour garantir le remboursement d'un prêt contracté
pour financer l'acquisition du logement principal de l'assuré.
Le suicide pays par pays
Généralités
Dans le monde, 815 000 personnes se sont suicidées en
2000, soit 14,5
décès pour 100 000 habitants (un décès toutes les 40 secondes) -
source OMS (PDF).
Le suicide touche davantage les hommes que les femmes. En fait, le nombre de
tentatives réussies est plus important chez les hommes que chez les femmes, sans
doute parce que les hommes choisissent plus souvent des moyens violents
(pendaison ou arme à feu contre intoxication médicamenteuse). De plus, ils sont
très isolés et il est donc souvent difficile d’observer leur trouble.
Contrairement aux femmes, ils n’ont pas l’intention de changer leur milieu, mais
ils désirent seulement mettre fin à leur souffrance. Par rapport à l'âge, si les
jeunes sont particulièrement concernés par ce problème, le nombre de suicides
est plus important encore plus tard et la courbe des suicides chez les hommes a
la forme d'un n avec un pic vers 50-60 ans.
Le suicide touche tout le monde, sans distinction de « classe ». Il
semblerait que les cultures influencent le taux de suicide. De hauts niveaux de
cohésion sociale et nationale réduisent les taux de suicide. Les niveaux de
suicide sont plus élevés chez les personnes à la retraite, au chômage,
divorcées, sans enfants, citadines, vivant seules. Les taux augmentent dans les
périodes d'incertitude économique (bien que la pauvreté ne soit pas une cause
directe). La plupart des suicidés souffrent de désordres psychologiques. La
dépression est une cause fréquente. Des maladies physiques graves ou des
infirmités peuvent aussi être la cause de suicides.
Du point de vue de l'individu, le suicide est rarement perçu comme une fin en
soi, c'est plutôt considéré comme l'unique voie possible pour échapper à une
situation devenue insupportable. D'autres motifs existent : rejoindre un proche
décédé, faire souffrir en causant du remords... De nombreuses raisons sont
possibles.
Enfin, le taux de suicide est aussi influencé avec le tapage médiatique fait
autour du suicide de célébrités et même le suicide fictionnel d'un personnage
dans un drame populaire peut conduire à une hausse temporaire du taux de
suicides.
Japon
Le Japon a l'un des plus forts taux de suicide du monde industrialisé (24,1
pour 100 000 habitants). Les suicides ont atteint le nombre record de 34 427 en
2003 (+ 7,1 % par rapport à 2002)(source : AFP 22/11/2004). / Le taux de
suicide pour 100 000 habitants était de 26,1 en 1998, légèrement derrière celui
des trois pays baltes et de la Russie, Hongrie et Slovénie où le taux avoisine
30 personnes pour 100 000 (sources diverses).
Suisse
Chaque année en Suisse, on compte 1300 à 1400 suicides. C'est la cause de
décès la plus importante chez les hommes de 15 à 44 ans. Environ 1000 hommes et
400 femmes se suicident chaque année en Suisse, ce qui représente quatre décès
par jour, soit un taux de suicide de 19,1 pour 100’000 habitants.
France
En 1996, la
France compte
12 000 suicides pour 160 000 tentatives (chiffres de l'Inserm) ;
avec 62 millions d'habitants en France, ces nombres représentent à peu près 19
suicides pour 100 000 habitants, soit un suicide pour 5 000 personnes, et une
tentative pour 400 personnes. La France est au quatrième rang des pays
développés. Les chiffres sont à peu près stables depuis
1980. Le suicide
est une cause de décès plus importante que les accidents de la route. Il touche
particulièrement les jeunes, chez qui le suicide est la deuxième cause de décès.
Toujours selon l'INSERM, 650 décès environ ont lieu chaque année chez les
15-24 ans en France. Parmi ces jeunes, deux tiers sont des garçons. Le taux de
suicide a chuté depuis
1985, mais les tentatives de suicide des 15-19 ans ont augmenté (4,3 % en
1999).
Québec
En 2001, 1 334
Québécois se sont donnés la mort, dont 1 055 hommes. Le taux de suicide chez les
jeunes hommes est parmi les plus élevés du monde, à 30,7 pour 100 000 habitants.
Les hommes se suicident huit fois plus que les femmes. Quelques rares pays
dépassent le Québec à ce niveau : la
Russie, la
Lituanie et
le
Kazakhstan. La situation s'est beaucoup aggravée depuis
1965, époque de la
Révolution tranquille. Les prisonniers québécois suicidés comptent pour 60 %
des suicides en milieu carcéral au Canada, alors qu'ils ne devraient en
représenter démographiquement que 23 %. Les jeunes Autochtones forment
l'échantillon le plus gravement touché : leur taux atteint de 3,3 à 3,9 fois la
moyenne nationale. Cela représente 211
Inuits du
Nunavik
suicidés pour 100 000 habitants.
Certains sociologues ont théorisé les facteurs urbains, la perte du
cléricalisme social, la pauvreté et les dépendances psychologiques et physiques
comme la drogue,
l'alcool et le jeu pour expliquer toutes ces pertes de vie. Les médias ont
souvent montré des reportages de jeunes Indiens inhalant du gaz, se piquant à l'héroïne
ou encore abusant d'appareils
de loterie vidéo de
Loto-Québec.
Comprendre et combattre le suicide
La psychiatrie, la psychologie, la sociologie, la philosophie, la théologie
et le droit s'intéressent dans leurs domaines respectifs à la question du
suicide. À côté de ces études théoriques, il existe des mesures pratiques pour
la prévention du suicide et l'accompagnement de ceux qui commettent une
tentative de suicide.
Causes du suicide
Le suicide peut être dû à des difficultés psychologiques, notamment
dépression nerveuse. Les autres cas (suicide suite à un déshonneur par
exemple) sont plus rares dans les cultures occidentales. On a observé des cas où
un suicide s'accompagnait du meurtres d'autres personnes (souvent le compagnon,
les enfants), on parle dans ces cas de suicide étendu ou élargi.
Facteurs de risque du suicide
Le suicide a en général des causes multiples. On peut classer les facteurs
menant au suicide en trois catégories :
Les facteurs primaires
Les facteurs primaires sont des facteurs sur lesquels on peut agir, ils ont
une valeur d'« alerte ». Ce sont les antécédents personnels (tentatives de
suicide précédentes, troubles de l'humeur), les antécédents familiaux (si des
proches se sont suicidés, cela peut prendre une valeur d'« exemple ») et les
troubles
psychiatriques avérés (schizophrénie,
toxicomanie,
alcoolisme...).
Conseiller à un dépressif de se débarasser des armes à feu qu'il possède chez
lui fait statistiquement baisser ses réussites de suicide, car l'usage d'une
arme à feu est simple et rapide, ce qui peut conduire au geste fatal pendant un
court moment d'égarement.
Les facteurs secondaires
Les facteurs secondaires sont des facteurs sur lesquels on peut faiblement
agir, et qui n'ont en soi qu'une faible valeur prédictive, sauf associés à des
facteurs primaires. Il s'agit essentiellement de la situation sociale
(isolement,
solitude,
chômage) et d'événements passés traumatisants (deuil,
abus sexuels, séparation,
maltraitance).
Les maladies chroniques sont peu suicidogènes, mise à part pour les persones
âgées.
Les facteurs tertiaires
Ce sont des facteurs sur lesquels on ne peut pas agir, et qui n'ont de valeur
prédictive qu'en présence de facteurs primaires ou secondaires. C'est par
exemple l'âge (la probabilité la plus forte est entre 35 et 54 ans, et au-delà
de 70 ans), l'appartenance au sexe masculin (cf. la section
Statistiques) ou encore l'homosexualité.
Il est notable, par exemple, que le suicide, une des deux premières causes de
mortalité chez les jeunes Français de 15 à 34 ans, soit accru chez les jeunes
homosexuels : d'après Homosexualité et suicide, d'Éric Verdier et
Jean-Marie Firdion (H&O éditions, Paris, 2003), un jeune homosexuel aurait entre
quatre et sept fois plus de risque d'attenter à sa vie, chiffre à augmenter de
40% pour les jeunes filles. Les principales raisons sont imputables à l'homophobie
dont ces personnes sont victimes, facteur secondaire principalement social. Ce
n'est donc pas l'homosexualité en soi qui s'avère suicidogène mais
l'impossibilité pour certains de la vivre et l'image négative (voire l'absence
d'image) de soi que la société, fortement
hétérocentriste, renvoie. D'autres études pour des pays différents (surtout
pour les États-Unis) montrent des taux similaires.
L'époque de l'année a également une influence. On remarque un pic de suicides
durant les fêtes de
Noël, a priori en raison d'un sentiment de solitude renforcé par la
vue de retrouvailles familiales, un sentiment de tristesse renforcé par les
manifestations (et les publicités) de joie.
Dans les deux derniers cas, ce n'est pas le phénomène lui-même qui est
suicidogène, mais son écho social.
Certaines études tentent d'établir une corrélation entre le nombre de
suicides et la longueur des jours pendant la période hivernale, ce qui
expliquerait que les suicides soient si fréquents dans les pays les plus au nord
tels que le canada ou les pays scandinaves.
Facteurs de protection
On note plusieurs facteurs de protection qui permettent de contrebalancer
certains effets négatifs des facteurs de risque associés au suicide. Voici
quelques exemples:
- Stratégies de gestion du stress adéquates
- Réseau social disponible et significatif
- Ouverture à recevoir de l'aide
- Estime de soi et confiance en soi élevées
- Support des enseignants et d'autres adultes en milieu scolaire
- Vision de l'école comme un lieu d'investissement
- Confiance en ses capacités à faire face aux obstacles de la vie
Processus suicidaire
Il est possible d’observer un processus suicidaire chez l’individu avant le
passage à l’acte. Les personnes suicidaires présentent une fragilité (facteurs
de risque accumulés) qui les prédisposerait à réagir de façon inadaptée lors de
situations stressantes. Une perte quelconque (ex : perte d’un(e) ami(e) ou deuil
d'un proche) entraîne l’enclenchement du processus. Une période dépressive suit
la perte puis l’étape de la crise s’installe. L’état de crise peut être
accompagné d’idéations passagères qui se transformeront en rumination, puis en
cristallisation (formation d’un plan précis pour passer à l'acte : où ?,
quand ?, comment ?) pour aboutir à la tentative planifiée. Dans la majorité des
cas, le suicide n’est donc pas un acte impulsif, mais plutôt une action prévue
qui découle d'un processus bien défini. Ceci permet de réaliser qu'une
intervention spécifique est possible à chacune des étapes. La personne
intervenant auprès d'un individu suicidaire doit être attentive aux signes
associés à chaque phase du processus.
Prévention du suicide
Le suicide est généralement annoncé, beaucoup de suicidés essayent de
prévenir leurs proches et laissent une lettre d'adieu afin d'expliquer leur
geste. Ces pensées sont à prendre au sérieux et s'il y a un risque de tentative
de suicide, il faut en parler avec la personne ouvertement afin de pouvoir
l'éviter. L'évocation de la mort avec une personne, poser la question
« avez-vous pensé à la mort ? » n'est pas suicidogène, mais permet au contraire
de montrer que l'on comprend la souffrance. Lorsque l'on discute, il ne faut pas
porter de jugement ; on peut tenter de lui faire se remémorer d'anciens
problèmes et les stratégies qu'elle avait mises en en œuvre pour les résoudre.
Selon le professeur Michel Debout
[1]
« Lorsqu’on pense qu’une personne va mal, il ne faut pas hésiter à lui dire
ce que l’on ressent. Et la manière dont on lui dit est importante. Si vous lui
demandez : « ça ne va pas ? », elle risque de se renfermer dans une réponse de
type : « Mais si ça va très bien. » Alors que si vous dites « je te sens mal »,
vous vous impliquez personnellement, et vous montrez que non seulement vous
offrez une écoute, mais même un véritable dialogue. À partir de là, tout dépend
de la situation et de votre lien avec elle. Mais vous pouvez essayer de
l’orienter vers un soutien, un spécialiste ou une association qui pourront
l’aider. »
Les personnes qui ont fait une tentative de suicide sont en général prises en
charge en service de soins aigus à l'hôpital (suite à un empoisonnement ou à des
blessures nécessitant souvent une réanimation). Une fois l'épisode critique
surmonté et l'éloignement de tout danger vital, le patient est orienté vers un
service de psychiatrie. L'hospitalisation est volontaire dans la grande majorité
des cas, mais certaines dépressions sévères (mélancolie, dépression délirante)
peuvent entraîner une hospitalisation à la demande d'un tiers, voir une
hospitalisation d'office. Dans tous les cas, les sujets ayant fait une tentative
de suicides doivent être évalués par un psychiatre, et souvent orientés vers une
structure adaptée à la prise en charge d'une cause curable de suicide
(dépression très souvent, mais aussi psychose, alcoolisme, etc.). Dans le cas
d'un séjour en psychiatrie, il est proposé un suivi ultérieur en consultation
psychiatrique (hospitalière ou avec un psychiatre libéral). Malgré ces efforts
de prise en charge et la possibilité d'hospitalisation contre le gré du
suicidant, en France, un quart des adolescents mineurs suicidants sortent de
l'hôpital sans avoir eu de consultation psychiatrique.
Cette prise en charge des personnes qui tentent de se suicider est importante
car les risques d'une nouvelle tentative sont grands (75 % dans les deux ans).
Il est cependant aussi nécessaire de faire une prévention du suicide en amont.
Cela passe par l'explication de ce qu'est la
dépression.
Il serait souhaitable que
médecins (60 à 70 % des suicidants consultent un médecin dans le mois qui
précède le passage à l'acte, dont 36 % dans la semaine qui précède), enseignants
et de manière générale toute personne en contact avec des
adolescents
ou des personnes en détresse sociale soient formés, des campagnes publicitaires
soient menées afin de sensibiliser l'ensemble de la population à ce problème et
d'aider les personnes susceptibles de se suicider à abandonner cette idée en
leur ouvrant la voie à d'autres alternatives.
L'idéal serait de convaincre la personne de consulter un médecin ou de
contacter une association spécialisée. Si l'on sent que le passage à l'acte est
imminent, il faut
prévenir les secours (en priorité la
régulation médicale, le « 15 » en France, le «112»
en Europe pour les urgences diverses )).
Cependant, l'écoute dans le but de faire exprimer à la personne ses
difficultés ne constitue qu'un premier stade de la prévention.
Tentatives de suicide
Un acte de suicide qui ne se termine pas par la mort de la personne est
appelé « tentative de suicide ». Les tentatives de suicide sont beaucoup plus
nombreuses que les suicides. Elles concernent davantage les femmes que les
hommes et une tranche d'âge plus jeune : les moins de 35 ans. Dans les
tentatives de suicide, on retrouve surtout des filles d’environ 15-16 ans qui
vivent des problèmes psychosociaux depuis un certain temps et elles présentent
une détresse apparente. Elles ne cherchent pas à mourir, mais plutôt à modifier
leur milieu socio-affectif. C’est pour cette raison qu’elles choisissent
généralement des moyens non-violents, comme l’« overdose » lorsqu’elles passent
à l’acte. Les personnes qui tentent de se suicider ne sont généralement pas
atteintes de maladies physiques graves ou de graves dépressions même si les
facteurs psychologiques y sont particulièrement importants.
Les problèmes sociaux sont les causes les plus fréquentes : conflit avec la
famille, enfance difficile, problème avec l'alcool, comportement violent. Les
personnes devant faire face à ce type de problèmes deviennent anxieuses et
déprimées et en réaction à une nouvelle situation de crise particulière, elles
craquent et tentent de se suicider. Les motivations sont assez complexes, un
désir de soulager une souffrance émotionnelle trop forte, le besoin de
communiquer ses sentiments. Les tentatives de suicide peuvent aussi résulter
d'un conflit interne entre le désir d'en finir avec la vie et celui de continuer
à vivre.
Aide téléphonique
Ce premier stade est généralement pris en charge téléphoniquement par des
associations de type:
1-418-683-4588 ou 1-866-APPELLE ( 1-866-277-3553 Centre de Prévention du
suicide Québec/Canada)
Tous ces services se cantonnent exclusivement à l'écoute et
n'interviennent pas même sur demande expresse de la personne en détresse.
Sauf pour les anglophones où le service de SOS Amitié spécialisé peut
orienter vers un psychiatre anglophone voire appeler les pompiers à la
demande expresse de la personne.
SOS Amitié a aussi un service d'écoute par courriel mais avec des délais de
48h pour les réponses.
Aide internet
Des forums francophones affirmant procurer un soutien psychologique existent
actuellement sur l'internet :
Il convient d'aborder ces sites avec circonspection en raison de :
- l'impossibilité de contrôler la compétence des interlocuteurs : un site
internet étant facile à créer, il n'apporte pas le gage d'une structure
pratiquant la formation interne et l'évaluation de ses personnels ;
- le décalage culturel pouvant exister entre les personnes parlant la même
langue mais pouvant être de culture très différente.
Ces deux facteurs peuvent mener à une aide inadaptée, qui peut même être
suicidogène.
Intervention active auprès d'une personne en état d'urgence élevée
Actuellement, il n'existe pas de graduation entre la démarche d'écoute (Aide
téléphonique et Aide internet) et l'intervention des services d'urgences sur un
cas déjà passé à l'acte.
La prévention des cas d'urgence élevée devant donc être effectuée par
l'entourage ou le médecin traitant. Ce qui pose les problèmes suivants:
- la formation
- création de structures d'interventions à même de compenser leurs absences.
TABLE DES MATIERES
Introduction
Buts de la recherche
Partie descriptive
1. Descriptifs des centres et unités d’accompagnement
psychiatrique des adolescents suicidants dans le canton de Vaud
1. La
répartition de la psychiatrie pour adolescents dans le canton de Vaud
2. Service
Universitaire de Psychiatrie de l’enfant et de l’Adolescent (SUPEA)
à Lausanne
3. Centre Thérapeutique
de Jour pour Adolescents (CTJA) à Lausanne
4. Unité
d’Hospitalisation Psychiatrique pour Adolescents (UHPA) à Lausanne
5. Service
Médico-Pédagogique (SMP) à Yverdon
6. Service de
psychiatrie et psychothérapie d’enfants et d’adolescents à Vevey
7.
Service de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent (SPEA)
à Nyon et Morges
2. Etude comparative des centres et unités d’accompagnement psychiatrique des
adolescents suicidants
dans le canton de Vaud
1. Les cadres institutionnelles
2. Les patients
3. Les prises en charge
Partie théorique
3. Le suicide
1. Genèse du suicide et définitions des termes spécifiques
2. Différents référentiels théoriques
4. L’adolescence
1. Définitions
2. Le développement pubertaire
3. Le développement psychologique
4. L’autonomie
5. Les conduites suicidaires chez l’adolescent
1. Quelques statistiques
2. Les facteurs pouvant entraîner des conduites suicidaires
3. Des idées suicidaires au passage à l’acte
Partie pratique
6. Intervention psychodynamique adaptée à des personnes
suicidaires
1. La composition d’un cycle de réactions
2. Les niveaux de détresse
3. Le programme d’intervention
4. Réflexions personnelles sur ce modèle
7. Réflexions sur l’approche éducative des adolescents à
conduites suicidaires
1. Situation d’Alexandre
2. Prise en charge
3. L’observation
4. Reconnaître la souffrance
5. Projet éducatif
6. Bilan de la prise en charge
7. Le besoin d’aide de l’aidant
Conclusion
Bibliographie
Annexes
__________________________
Introduction
Plusieurs raisons motivent le choix de ce sujet de mémoire, elles sont
d’ordre social, personnel et professionnel.
La raison d’ordre social s’explique par le fait que j’ai
vécu mon enfance et mon adolescence dans un village de montagne d’environ 2'800
habitants. La petitesse de ce dernier permet d’être facilement au courant de la vie
des habitants. Les mariages, les naissances ou les décès sont généralement connus par
les villageois, contrairement aux milieux citadins où la population vit plus anonymement.
Pendant mon adolescence, j’ai été sensible et interpellée du
nombre de décès par suicide. Je me suis demandée, pourquoi ces personnes avaient commis
cet acte ? Et pourquoi elles avaient préféré la mort à la vie ? Ces
interrogations sont restées sans réponse, camouflées par le silence régnant dans la
famille et les proches.
La raison d’ordre personnel rentre en ligne de compte par le fait
que j’ai côtoyé des jeunes adultes dont la vie n’avait plus raison
d’être, ces conversations m’ont rendues perplexe, car cesser de vivre signifie
mourir. La mort est un sujet peu abordé dans notre société ; elle est probablement
appréhendée en raison des souffrances précédant la mort, du deuil traversé par les
personnes vivant la séparation de l’être aimé, et des interrogations
philosophiques portant sur l’immortalité de l’âme. Le mal-être de ces jeunes
adultes a suscité mes interrogations sur le suicide et les tentatives de suicide.
La raison d’ordre professionnel découle des stages pratiques
effectués pendant ma formation d’éducatrice spécialisée, où j’ai rencontré
des adolescents parlant de leurs souffrances, de leur solitude et de leur désir de mort.
Mise à part mon écoute, je ne savais pas quelle démarche entreprendre avec eux.
J’ai trouvé un bon écho auprès de mes collègues dans les institutions de stage,
toutefois je les ai sentis aussi démunis que moi. Les deux points suivants abordent les
buts de la recherche et la méthode de travail.
1. Buts de la recherche
La tentative de suicide d’un adolescent démontre un refus de
vivre dans les conditions actuelles de sa vie. Sa souffrance est aux limites de
l’insupportable. La mort est pour lui plus intéressante que la vie. Qu’est-ce
que le canton de Vaud met en place comme infrastructure pour le suivi de ces jeunes ?
Comment en est-il arrivé là ? Quel est le rôle de l’éducateur dans
l’accompagnement ? Voilà trois questions qui m’interpellent et guident
cette recherche.
J’ai désiré choisir un sujet de mémoire utile pour la suite de
mon parcours professionnel en tant qu’éducatrice travaillant avec des adolescents.
Utile, dans le sens que l’élaboration de ce travail de diplôme permette
d’approfondir mes connaissances : des services disponibles dans le canton de
Vaud, des adolescents , de moi-même et m’offre des pistes de travail. Concrètement,
que puis-je faire pour éviter des conduites suicidaires ?
Cette recherche a aussi pour but de sensibiliser les familles et les
professionnels sur la problématique des tentatives de suicide. Chacun d’entre nous
peut être confronté à des adolescents à conduites suicidaires.
J’ai intitulé ce travail de recherche : Prises en charge
des adolescents suicidants dans le canton de Vaud : descriptifs des centres et
unités d’accompagnement psychiatriques et réflexions sur l’approche
éducative. Je tiens à préciser que ce mémoire traite seulement les tentatives de
suicide visibles, c’est-à-dire non déguisées au contraire de la prise de drogues,
du manque de soin de sa personne ou encore de la prise de hauts risques mettant en danger
la vie de l’adolescent.
2. Méthode de travail
Ce travail comporte trois parties. La première est descriptive, elle
présente tout d’abord les services psychiatriques du canton de Vaud, puis
l’étude comparative de ces derniers. Une deuxième partie, dite théorique, offre
des informations sur le suicide, les tentatives de suicide, l’adolescence et les
conduites suicidaires chez l’adolescent. Pour finir, je développe dans la partie
pratique des pistes de travail concrètes pour l’éducateur.
Voici encore quelques données sur la présentation de ce travail.
Premièrement, j’ai décidé d’utiliser le masculin pour parler des
adolescent(e)s à conduites suicidaires, même si ce comportement concerne davantage de
filles. Deuxièmement, plusieurs tableaux sont présentés dans cette recherche ; si
leur provenance n’est pas citée, ils sont de ma création. Et troisièmement, je
tiens à préciser qu’à des fins pratiques, j’utilise des abréviations à la
place de dénominations complètes. Pour plus de clarté, Voici une liste des
abréviations avec leur signification :
AEMO : Action Educative en Milieu Ouvert
AI : Assurance Invalidité
ATEMA : Accueil et Traitement de l’Enfant Maltraité
et Abusé
CHUV : Centre Hospitalier Universitaire Vaudois
CPDJ : Centre Psychothérapeutique de Jour pour Enfants
CTJA : Centre Thérapeutique de Jour pour Adolescents
DAMPS : Division Autonome de Médecine Psychosociale
DPP : Division de Pédopsychiatrie
DSAS : Département de la Santé et de l’Action
Sociale
DUPA : Département Universitaire de Psychiatrie Adulte
GHRV : Groupement des Hôpitaux Régionaux Vaudois
HEL : Hôpital de l’Enfance de Lausanne
PPP : Policlinique de Pédopsychiatrie
SEI : Service Educatif Itinérant
SES : Service d’Enseignement Spécialisé
SMP : Service Médico-Pédagogique
SPC : Service Psychiatrique Centre
SPEA : Service de Psychiatrie de l’Enfant et de
l’Adolescent
SPJ : Service de Protection de la Jeunesse
SUPEA : Service Universitaire de Psychiatrie de
l’Enfant et de l’Adolescent
SUPG : Service Universitaire de Psychogériatrie
UHPA : Unité d’Hospitalisation Psychiatrique pour
Adolescents
UMSA : Unité Multidisciplinaire de Santé des Adolescents
Partie descriptive
Elle comprend la présentation des centres et unités
d’accompagnement psychiatrique du canton de Vaud et leur étude comparative.
J’ai choisi ce canton car c’est mon lieu de vie et de formation. En outre, il me
semble important, en tant que future professionnelle, de connaître les services avec
lesquels je serai amenée à collaborer. Ils offrent tous une prise en charge
psychiatrique. Il en existe sûrement d’autres, mais je me suis basée uniquement sur
les services qui organisent la psychiatrie vaudoise et dépendent du Département de la
Santé et de l’Action Sociale (DSAS).
Pour permettre ces descriptifs, j’ai constitué un questionnaire
(cf. annexe 1) interrogeant les services sur le cadre institutionnel, les patients et
les prises en charge. J’ai chois ces trois points afin de découvrir au mieux les
structures et leurs prestations.
Le canton de Vaud est divisé en quatre secteurs psychiatriques,
j’ai donc envoyé un questionnaire aux responsables de chaque secteur. Après une
analyse des réponses obtenues, j’ai organisé un entretien avec ces différentes
personnes pour compléter les informations. Une copie du descriptif leur a été envoyée
par la suite, pour leur permettre d’apporter leurs corrections.
A la suite des descriptifs, j’ai élaboré une étude comparative
en reprenant chaque élément décrit. Elle permet d’une part, une analyse des
services afin de mettre en évidence les différences et les similitudes, et d’autre
part de réfléchir sur les prises en charge médicales.
Partie théorique
La partie descriptive a entraîné quelques interrogations. Pour
comprendre au mieux les conduites suicidaires et le travail effectué par les services
présentés, j’ai décidé de m’appuyer sur une littérature spécifique à ces
comportements. Cette partie théorique comporte le suicide, l’adolescence et les
conduites suicidaires chez l’adolescent.
Tout d’abord je présente quelques référentiels théoriques sur
le suicide. Il me semble important de rappeler divers points de vue ayant traversé notre
siècle. Ensuite, je m’attache à développer l’adolescence et toutes les
modifications que cette période implique chez l’individu. Nous ne pouvons pas
appréhender les tentatives de suicide sans prendre en compte le processus
développemental de cette période de la vie. Pour finir, j’aborde les conduites
suicidaires chez les adolescents.
La partie pratique
Cette dernière partie a pour but d’offrir des pistes de travail
aux éducateurs. A la suite de l’apport théorique, je me suis demandée quel était
le rôle des éducateurs ? J’ai don cherché une littérature spécifique à
l’approche éducative. Comme je n’ai pas trouvé d’ouvrage écrit par des
éducateurs sur l’accompagnement d’adolescents suicidaires, j’ai décidé
de présenter le modèle d’intervention psychodynamique de J. Mercier. Les propos
sont adressés à tous ceux qui se préoccupent des personnes présentant des
comportements violents et suicidaires. En plus, l’élaboration de cette recherche, a
affiné mes positions sur l’accompagnement d’adolescents suicidaires ;
c’est pourquoi je termine ce travail en développant quelques réflexions
personnelles sur l’approche éducative.
1
________________________
Descriptifs
des centres et unités d’accompagnement psychiatrique des adolescents suicidants
dans le canton de Vaud
Introduction
Ce chapitre décrit les centres et unités d’accompagnement
psychiatrique des adolescents suicidants dans le canton de Vaud. Ce travail permet de
relever les possibilités de prises en charge, dès qu’ils ont reçu les soins
somatiques par un hôpital après leur passage à l’acte. Nous verrons ensuite les
services et leurs prestations. Une liste d’adresses des différentes structures se
trouve en annexe (cf. annexe 2, 3).
Les centres et unités présentés sont : Le Service Universitaire
de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent (SUPEA), l’Unité
d’Hospitalisation Psychiatrique pour Adolescents (UHPA), le Centre Thérapeutique de
Jour pour Adolescents (CTJA), le service de psychiatrie et de psychothérapie
d’enfants et d’adolescents à Vevey, le Service Médico-Pédagogique (SMP) et le
Service de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent (SPEA).
Chaque structure, mis à part le SUPEA, est présentée en trois
points : le cadre institutionnel, les patients et la prise en charge. Je tiens aussi
à préciser que seulement le troisième point est spécifique aux adolescents suicidants.
Le SUPEA, quant à lui, est uniquement l’organe dirigeant d’une quinzaine de
services qui s’occupent d’enfants et d’adolescents, dont le CTJA et
l’UHPA. De ce fait, la présentation de ce service diffère, elle comporte : le
cadre institutionnel, les buts des services et la prise en charge. Les informations sur le
SUPEA sont tirées, non seulement des réponses du questionnaire mais aussi d’un
document écrit par O. Halfon et F. Ansermet, qui s’intitule :
" Projet de service SUPEA-DPP "
Ce chapitre est introduit par quelques informations sur la répartition
de la psychiatrie pour adolescents dans le canton de Vaud, ensuite les services sont
présentés individuellement. Je n’ai pas écrit de conclusion à la fin de ces
descriptifs, afin d’éviter une répétition des éléments cités dans l’étude
comparative qui forme le chapitre suivant.
1. La répartition
de la psychiatrie pour adolescents dans
le canton de Vaud.
Le canton de Vaud est divisé en quatre secteurs psychiatriques (cf.
annexe 4) : les secteurs Centre, Nord, Est et Ouest.
- Le secteur Centre s’occupe de la région lausannoise, ainsi que des
petits villages avoisinants. L’organe principal se trouve à Lausanne. Ce secteur est
divisé en trois services : le Département Universitaire de Psychiatrie Adulte
(DUPA), le SUPEA et le Service Universitaire de Psychogériatrie (SUPG).
- Le secteur Nord s’étend de la Vallée de Joux jusqu’au lac de Morat sans
oublier tous les petits villages avoisinants. L’organe principal se trouve à
Yverdon. Ce secteur est divisé en deux services : la psychiatrie adulte et
psychogériatrie, et le SMP.
- Le secteur Est regroupe la Riviéra, le Pays-d’Enhaut et tous les petits
villages avoisinants. L’organe principal se trouve à Vevey. Ce secteur est divisé
en trois services : la psychiatrie adulte, la pédopsychiatrie et la
psychogériatrie.
- Le secteur Ouest s’étend d’Ecublens jusqu’à Nyon. L’organe
principal se trouve à Nyon. Ce secteur est divisé en trois services : le SPEA, la
psychiatrie adulte et la psychogériatrie.
Tous les centres d’utilité publique en matière de prise en
charge d’adolescents sont sous l’autorité du DSAS. Les secteurs psychiatriques
Centre, Nord et Ouest sont sous la direction des institutions, elle-même dirigée par les
Hospices Cantonaux qui dépendent du DSAS. Par contre, le secteur psychiatrique Est
dépend du Groupement des Hôpitaux Régionaux Vaudois (GHRV). Toutefois, il a été
mandaté par le DSAS pour s’occuper de cette partie du canton de Vaud. J’ai
crée cet organigramme à partir des données de chaque service
Tableau 1 : Organigramme des secteurs psychiatriques du
canton de Vaud
1.1 Possibilités de prise en charge
Il existe plusieurs possibilités de prise en charge des adolescents
suicidants dans le canton de Vaud, à partir des soins somatiques administrés aux
urgences des hôpitaux ; l’hospitalisation, le placement non médical avec ou
sans suivi thérapeutique, et le retour à domicile avec ou sans suivi thérapeutique.
Afin d’être plus explicite, le graphique ci-dessous illustre ces trois
possibilités. Volontairement, je ne cite pas tous les médecins et foyers susceptibles de
les prendre en charge, mais uniquement les services psychiatriques ; afin de les
faire connaître.
Tableau 2: Possibilités de prise en charge des adolescents
suicidants dans le canton
de Vaud.
FOYERS MAISON
UHPA (Secteur Centre) SUPEA (Secteur centre)
Hôpital de Cery (Secteur Centre) CTJA (Secteur centre)
Hôpital de Bellevue(Secteur Nord) PPP (Secteur Est)
Hôpital de Nant (Secteur Est) SPEA (Secteur Ouest)
Hôpital de Prangins (Secteur Ouest) SMP (Secteur Nord)
Médecins traitants
Lorsque l’adolescent présente des troubles psychiatriques
sévères, une hospitalisation est organisée avec ou contre son gré. La seule structure
fermée spécifique pour les adolescents en état de crise dans le canton de Vaud est
l’UHPA, située à Lausanne. Etant donné la capacité d’accueil restreinte de
l’UHPA et du nombre de demandes, l’adolescent peut être accueilli dans un
hôpital psychiatrique de sa région, c’est-à-dire : l’hôpital
psychiatrique de Cery (secteur centre), l’hôpital psychiatrique de Bellevue (secteur
Nord), l’hôpital psychiatrique de Nant (secteur Est) et l’hôpital
psychiatrique de Prangins (secteur Ouest). Ce dernier cas de figure reste tout de même
peu fréquent. Les quatre hôpitaux interrogés ont estimé l’accueil
d’adolescents, tous diagnostics confondus, entre cinq et dix par année.
Une tentative de suicide dénote une souffrance chez l’adolescent
qui peut être liée à des problèmes familiaux. Dans ces cas-là, le Service de
Protection de la Jeunesse (SPJ) est informé et organise avec le médecin de
l’hôpital un placement dans un foyer éducatif.
Parfois, un placement suffit à répondre à la tentative de suicide.
Toutefois, il peut s’avérer judicieux d’organiser un accompagnement
thérapeutique. Dans ce cas, les structures susceptibles de suivre l’adolescent
sont : le SUPEA et le CTJA (secteur Centre), le SMP (secteur Nord), la Policlinique
de Pédopsychiatrie (PPP) (secteur Est) et le SPEA (secteur Ouest). L’adolescent peut
aussi être suivi par un médecin traitant privé.
La troisième possibilité est le retour à domicile avec ou sans suivi
thérapeutique, cependant cet accompagnement est ardemment conseillé par les médecins
ayant suivi l’adolescent à l’hôpital. Les structures susceptibles
d’offrir ce suivi thérapeutique sont les mêmes que pour le placement non médical.
2. Service
Universitaire de Psychiatrie de l’Enfant et de
l’Adolescent (SUPEA) à Lausanne
2.1 Le cadre institutionnel
Le SUPEA et la Division de Pédopsychiatrie de l’Hôpital de
l’Enfance (DPP) organisent la pédopsychiatrie publique du secteur centre. De ce
fait, ils font partie du Service Psychiatrique Centre (SPC).
Ces deux services, distincts sur le plan administratif et qui
travaillent en coordination sur le plan clinique, sont divisés en trois unités,
présentées ci-dessous : les unités A, B et unités transverses (cf. annexe 3).
Chaque unité est sous la responsabilité d’un professeur. Environ 180 personnes
travaillent, à temps complet ou partiel, dans ces trois services.
L’unité A
Cette unité regroupe les services suivants :
- Consultation du Bugnon
- Consultation des Jeunes ; possibilités de venir faire des consultations les lundi
et Jeudi sans rendez-vous de 16h00 à 19h00, il est quand même conseillé de fixer un
rendez-vous pour éviter une trop longue attente.
- Consultation Passerelle
- Centre Thérapeutique de Jour pour Enfants
- CTJA
- UHPA
- Atelier Thérapeutique du Soir pour Enfants
- Jardin d’Enfants Thérapeutique " Marcotte "
J’ai choisi de décrire spécialement dans cette recherche le CTJA
et l’UHPA, car ils accueillent spécifiquement des adolescents.
L’unité B
L’unité B regroupe les services suivants :
- Service de Pédopsychiatrie de Liaison, site Centre Hospitalier Universitaire Vaudois
(CHUV)
- Service de Consultation et de Liaison, site de l’Hôpital de l’Enfance de
Lausanne (HEL)
- Centre de Soins HEL
- Centre Psychothérapeutique de Jour HEL
- Centre Psychothérapeutique " Le Bercail "
Les unités transverses
Les unités transverses regroupent les services suivants :
- Recherche et bibliothèque
- Accueil et Traitement de l’Enfant Maltraité et Abusé (ATEMA)
- Unité de Thérapie Familiale
2.2 Les buts des services
Les buts du SUPEA et de la DPP sont d’offrir des soins de
pédopsychiatrie pour le secteur centre du canton de Vaud, de former des professionnels et
de faire de la recherche. Ces soins peuvent être offerts au travers de consultations
ambulatoires, d’hospitalisations et du service de garde.
- Le service ambulatoire englobe les consultations, les centres de jour, le Service de
Pédopsychiatrie de liaison du CHUV, l’atelier Thérapeutique du Soir pour Enfants et
le jardin d’Enfants Thérapeutique " Marcotte ". Le service des
consultations ambulatoires est réparti en trois sites pour faciliter
l’accessibilité géographique. Il y a les consultations du Bugnon et consultations
des Jeunes (pour l’Est lausannois), les consultations Passerelle et le service de
consultation et de liaison, site HEL (pour l’Ouest lausannois). Les centres de Jour
sont les suivants : le Centre Thérapeutique de Jour pour Enfants, le Centre de Soins
HEL, le CTJA et le Centre Psychothérapeutique de Jour HEL.
- Les consultations du Bugnon sont spécialisées pour les adolescents. Passerelle
s’occupe plus de la psychiatrie sociale et dans la communauté. Quant à la
Pédopsychiatrie de liaison, elle travaille au CHUV et à l’hôpital de
l’Enfance. En outre, elle travaille en collaboration avec différents services du
CHUV qui s’occupent de la petite enfance.
- L’hospitalisation en pédopsychiatrie est prise en charge par le HEL et le
Centre Psychothérapeutique " Le Bercail " pour les enfants à
troubles psychiatriques graves. Quant aux adolescents, l’hospitalisation
psychiatrique est prise en charge par l’UHPA.
-
- Le service de garde est pris en charge par un médecin responsable et un assistant.
Ils sont appelés en cas d’urgence et spécialement en dehors des heures de
consultation du service de pédopsychiatrie de liaison du CHUV.
La formation des professionnels est diverse. Il existe une formation
prégraduée et une formation postgraduée. La formation prégraduée, comme
l’intitule le SUPEA, se déroule sur deux jours et met l’accent sur les
présentations cliniques de patients. En ce qui concerne la formation postgraduée, elle
regroupe les formations clinique, didactique et personnelle. La formation clinique se
donne au travers du travail clinique direct et des supervisions par le chef de clinique et
le médecin-cadre. La formation didactique se passe sur deux ans, à raison de deux heures
par semaine. Les thèmes des cours sont spécifiques à la psychiatrie et la
psychothérapie d’enfants et d’adolescents. La formation personnelle regroupe
les thèses, travaux de synthèse clinique théorique et de recherche et les supervisions
individuelles de psychothérapies.
Les recherches font partie des buts des deux services. Elles sont
nombreuses et se basent essentiellement sur des problèmes liés au développement de
l’enfant et de l’adolescent.
2.3 La prise en charge
Etant donné le nombre important des prises en charge de tous les
services, dirigés par le SUPEA, je me suis attachée à décrire uniquement les
possibilités de prise en charge d’un adolescent suicidant à la suite des soins
somatiques offerts par le service des urgences du CHUV.
Lors d’une tentative de suicide, le service des urgences du CHUV
appelle pour les 13 à 16 ans, soit le service de pédopsychiatrie de liaison du CHUV ou
le service de garde du SUPEA et de la DPP. Pour les adolescents de 16 à 18 ans, les
urgences contactent la Division Autonome de Médecine Psychosociale (DAMPS). Le service
appelé se déplace, et fait une évaluation de la situation avec le patient, et si
possible ses parents. Il apprécie si le désir de mort est présent ou si la situation
s’est momentanément calmée. Ensuite, le médecin de l’hôpital tient compte de
l’avis du consultant du service pour mettre en place la suite de la prise en charge.
Elle peut différer d’un adolescent à l’autre ; elle dépend des risques
suicidaires, de leur contexte social et des facteurs déclenchants de la tentative de
suicide. Par exemple, si l’adolescent refuse un accompagnement thérapeutique et
présente des risques de récidive, l’hôpital se doit d’organiser une
hospitalisation en milieu psychiatrique contre son gré. En définitive, les possibilités
de prises en charge de ces adolescents sont nombreuses, nous pouvons cependant les
regrouper en trois catégories : suivi des adolescents au domicile, hospitalisés, ou
placés dans un foyer.
Le retour à domicile est accordé lorsque le contexte familial
n’est pas pathogène, que l’adolescent ne présente pas de signe de récidive et
de psychopathologie sévère. Si un de ces critères n’est pas rempli,
l’adolescent peut être placé dans un foyer. Toutefois, une hospitalisation est
possible pour les adolescents à risque de récidive et dotés d’une psychopathologie
sévère.
Voici les diverses prises en charge possibles (cf. tableau 3, p.
13) :
- avec un suivi thérapeutique par un des services du SUPEA,
c’est-à-dire les consultations du
Bugnon, de la Passerelle ou du service de Pédopsychiatrie de liaison
du CHUV pour une
continuité de la prise en charge après l’évaluation ;
- avec un suivi thérapeutique par la DAMPS ;
- avec un suivi thérapeutique par un médecin traitant ;
- et prise en charge journalière par le CTJA ;
- sans suivi thérapeutique ;
- Prise en charge dans un foyer :
- avec un suivi thérapeutique par un des services du SUPEA ;
- avec un suivi thérapeutique par la DAMPS ;
- avec un suivi thérapeutique par un médecin traitant ;
- et prise en charge journalière par le CTJA ;
- sans suivi thérapeutique ;
- à l’UHPA ;
- à l’hôpital de Cery, si plus de place à l’UHPA.
L’approche théorique
Généralement, les services du SUPEA prennent les patients en charge
selon le modèle théorique psychodynamique de type psychanalytique, afin de comprendre la
personne et agir au niveau des forces inconscientes. Toutefois, chaque service peut aussi
se référer à d’autres référentiels théoriques.
Tableau 3: Possibilités de prises en charge d’un adolescent suicidant
dans le secteur Centre
3. Centre Thérapeutique de
Jour pour Adolescents
(CTJA) à Lausanne
3.1 Le cadre institutionnel
Les locaux du CTJA se trouvent au sein de l’hôpital psychiatrique
de Cery à Prilly. Dans le courant de l’année 1998, il devrait déménager dans des
locaux au centre de la ville de Lausanne pour en faciliter l’accès. Le CTJA est un
centre d’utilité public dépendant des Hospices cantonaux, eux-mêmes dirigés par
le DSAS.
Le centre est ouvert cinq jours par semaine uniquement la journée. De
ce fait, les adolescents rentrent à leur domicile pour la nuit et les week-ends.
L’UHPA assure les urgences en cas d’appel en dehors de heures d’ouverture
du centre.
Buts du centre
Une des missions du centre est d’offrir des soins de
pédopsychiatrie au travers d’un traitement et de l’élaboration d’un
projet individuel avec l’adolescent et, si possible sa famille. La prise en charge
permet de dégager des hypothèses psychodynamiques et d’évaluer le contexte
familial, psychosocial et scolaire. L’unité a aussi pour but de former des
professionnels, tels que médecins, infirmiers, éducateurs, etc.
Financement
L’unité est entièrement financée par l’Etat de Vaud et la
Confédération. Les factures pour les prestations au client sont envoyées à la caisse
maladie ou l’Assurance Invalidité (AI), qui les prend en charge. Une participation
de 10%, plus éventuellement la franchise sont facturées par la caisse aux parents.
L’AI prend en charge les psychothérapies des personnes dont les séquelles
gêneraient considérablement ou rendraient impossibles la formation ultérieure et
l’exercice d’une activité lucrative. En outre, pour bénéficier de cette aide
financière, un traitement spécialisé intensif a dû être appliqué pendant une année,
sans apporter d’amélioration suffisante.
L’équipe pluridisciplinaire
L’équipe pluridisciplinaire est composée de treize
collaborateurs à temps partiel ou complet : un chef de clinique adjoint, un médecin
chef, un médecin associé, deux psychologues, une infirmière, un assistant social, deux
éducateurs, un stagiaire éducateur, deux enseignants spécialisés et une secrétaire.
Fonctionnement du centre
Le fonctionnement du centre comprend les colloques entre
collaborateurs, le travail en réseau, l’encadrement des personnes en formation, les
supervisions et le règlement de base pour les patients.
L’équipe des collaborateurs se retrouve une fois par semaine pour
un colloque. Cette rencontre pluridisciplinaire fait partie du système de communication.
Elle permet tout d’abord des discussions d’ordre administrative, la
présentation des nouvelles situations ou demandes en cours et le choix des admissions. En
plus, le colloque est utilisé pour transmettre des informations au reste de
l’équipe des événements marquants concernant un adolescent, et les comptes rendus
des différents entretiens individuels ou en famille. Si nécessaire, les collaborateurs
ont à disposition, un espace de réflexions cliniques à partir d’une situation
d’un adolescent, présentée par un collègue et un espace de réflexions
théoriques. Les synthèses (bilan des patients) peuvent être aussi organisées au sein
des colloques. Par ailleurs, les informations circulent au travers de documents écrits,
ou oralement, de manière formelle et/ou informelle.
Le CTJA travaille en réseau afin de regrouper des professionnels pour
débattre un thème précis rencontré dans leur pratique professionnelle et pour
regrouper des personnes en liaison autour d’un patient.
L’encadrement des personnes en formation se fait au travers
d’entretiens avec un référent de l’équipe du même corps de métier, de
séminaires, de vidéos, de psychodrames individuels et de supervisions.
- Les supervisions d’équipe
Le CTJA fixe d’office une supervision pour l’équipe
pluridisciplinaire tous les quinze jours.
- Les moyens d’évaluation du travail
Les moyens pour évaluer et mesurer le travail des collaborateurs sont
les supervisions et les fiches d’évaluation. Lors des supervisions, les thérapeutes
peuvent analyser, avec l’aide d’une personne extérieure, la prise en charge
thérapeutique. Cet éclairage permet de réajuster éventuellement la prise en charge.
Les fiches d’évaluation permettent de suivre l’évolution du patient.
- Règlement de base au CTJA
Le centre est un lieu où les patients vivent, mangent, jouent et
suivent des activités ; c’est pourquoi ils sont soumis à un règlement de base
pour le bon fonctionnement du centre.
1. L’introduction et la consommation de drogue, d’alcool ou
de médicament est strictement interdite (les traitements médicamenteux sont décidés
exclusivement par les médecins du
CTJA).
2. La violence physique n’est pas tolérée.
3. La possession d’objets dangereux est interdite (l’équipe
se réserve le droit de juger quels
objets sont dangereux).
4. L’équipe se réserve en tout temps le droit de prendre des
mesures qu’elle juge nécessaires à la sécurité d’un adolescent et/ou au bon
fonctionnement de l’unité (fouille, tests sanguins ou
urinaires, confiscation d’objets, autorisation de sortie).
5. La présence au CTJA est obligatoire dans le cadre de l’horaire
défini pour chaque
adolescent.
3.2 Les patients
Le CTJA accueille des adolescents de 13 à 18 ans. La clientèle est
composée d’un plus grand nombre de filles que de garçons ; environ deux tiers
de filles pour un tiers de garçons. Comme le centre a ouvert ses portes l’année
précédente, nous ne pouvons pas donner le nombre d’adolescents suivis par année.
Toutefois, de juin à décembre 1997, le nombre de patients pris en charge s’élève
à 16 adolescents. La capacité d’accueil du CTJA est d’une quinzaine
d’adolescents par jour.
Les patients accueillis sont des adolescents souffrant de syndromes
psychiatriques aigus et de divers problèmes psychologiques. Les syndromes psychiatriques
aigus survenant à l’adolescence sont des troubles graves de l’humeur, des
épisodes dépressifs majeurs, des décompensations psychotiques, des tentatives de
suicide, des anorexies mentales stabilisées, des états limites, des décompensations
névrotiques sévères, etc.
Les troubles psychologiques sont des troubles du comportement, des
problèmes scolaires, des conflits familiaux, des troubles fonctionnels, etc. La prise en
charge par le CTJA est demandée lorsque les troubles de l’adolescent justifient un
encadrement spécialisé en institution.
Les patients sont toujours adressés sur indication médicale. Elle
peut provenir des médecins traitants, des hôpitaux, du SUPEA, de l’UHPA, du SMP, de
la Policlinique de Pédopsychiatrie (PPP) ou du SUPEA. Dans le secteur centre, si
l’adolescent suicidant est pris en charge par le CHUV pour les soins somatiques, il
peut être adressé au CTJA par le service de Pédopsychiatrie de liaison ou la DAMPS, qui
aura effectué une consultation à l’hôpital.
3.3 La prise en charge
Les procédures d’admission des adolescents ayant fait une
tentative de suicide ne diffèrent pas des autres demandes de prise en charge. Voici la
procédure d’admission pour le CTJA.
Procédure d’admission
1. Une demande est faite après indication médicale.
2. L’étude de la demande est faite en colloque, l’équipe
prend la décision d’accepter ou de ne pas accepter la demande en fonction des places
disponibles et de la situation.
3. Un premier entretien a lieu avec un médecin.
4. Un deuxième entretien a lieu avec le médecin, le ou la
référent(e) et un autre collaborateur par exemple : éducateur, infirmier ou
ergothérapeute. Lors de cet entretien, il est décidé si oui ou non l’adolescent
viendra quinze jours à l’essai.
5. Durant ce temps d’essai, le jeune peut découvrir le centre, et
l’équipe peut faire une
évaluation de son état psychique, de ses capacités évolutives, de
son mode de
fonctionnement et des possibilités de mobiliser la famille.
Les moyens de prise en charge
Les moyens utilisés pour le suivi des adolescents sont résumés en
huit points :
1. Des entretiens individuels et familiaux en présence du médecin et
du référent.
Pendant ces moments-là, des projets de soins sont établis avec le
patient et ses proches si cela est possible. Ce projet est individuel et propre à chaque
patient. Il permet d’élaborer un programme pour l’adolescent comprenant une
psychothérapie et différentes activités du centre.
2. Une psychothérapie individuelle d’inspiration psychanalytique
prise en charge par les
médecins et les psychologues.
3. Un support médicamenteux peut être offert pour diminuer certains
symptômes
de la psychopathologie.
4. Des réunions collectives entre les adolescents et les soignants
permettent d’approfondir des questions liées à la vie de groupe. Ces réunions ont
lieu une fois par semaine.
5. Des psychodrames de groupe ont lieu une fois par semaine. Ils sont
utilisés par les
thérapeutes pour permettre aux patients de faire un lien entre les
difficultés ressenties dans
les scènes jouées et les difficultés qu’ils rencontrent dans
leur vie.
6. Des ateliers proposant des activités manuelles ou socioculturelles.
Ces activités ont pour but de structurer les journées, de motiver les adolescents à
s’investir et à découvrir une activité dans le but d’une réadaptation
sociale.
7. Une évaluation pédagogique et scolaire faite par l’enseignant
de l’unité en coordination avec les référents de l’adolescent. Le but de
cette évaluation est de favoriser une intégration scolaire ou professionnelle dans les
meilleures conditions possibles.
8. Un bilan socio-familial fait par l’assistant social permet
d’évaluer les ressources de
l’entourage et de la famille.
La durée moyenne d’un traitement est d’une année. Elle
dépend de la sévérité de la pathologie. A la suite de son séjour au CTJA,
l’adolescent peut être suivi par un des thérapeutes du CTJA, par son médecin
traitant ou un autre thérapeute, selon son libre choix.
L’approche théorique
Le CTJA prend en charge les patients selon le modèle théorique
psychodynamique. Mais une collaboration est aussi recherchée avec les familles et une
intervenante extérieure au CTJA, dont le référentiel théorique est le modèle
systémique.
Le réseau de collaboration du CTJA
Les relations du centre avec l’extérieur sont nombreuses :
le CTJA travaille avec le service de Pédopsychiatrie de liaison, la DAMPS, le SUPEA, les
hôpitaux, et le secteur privé des professions médicales et sociales. En outre, il
collabore avec le SPJ, l’Unité Multidisciplinaire de Santé des Adolescents (UMSA),
l’Action Educative en Milieu Ouvert (AEMO), les institutions spécialisées
accueillant des adolescents, les écoles, les gymnases, le Service d’Enseignement
Spécialisé (SES), le tribunal des mineurs, les personnes faisant partie de
l’entourage du patient, les sociétés sportives, musicales et artistiques, etc.
En ce qui concerne les adolescents suicidants pris en charge dans des
foyers, une collaboration est recherchée entre le milieu socio-éducatif et le CTJA pour
l’élaboration d’un projet de soins commun. Le CTJA a besoin des foyers pour
certaines situations et les foyers sollicitent le CTJA pour des prises en charge.
4. Unité
d’Hospitalisation Psychiatrique pour
Adolescents (UHPA) à Lausanne
4.1 Le cadre institutionnel
L’UHPA est une structure de soins de pédopsychiatrie à temps
complet pour les adolescents en état de crise. Elle est située dans le bâtiment
hospitalier du CHUV. Cette unité récente date de 1997. L’UHPA est un centre public
dépendant des Hospices cantonaux, eux-mêmes dirigés par le DSAS.
Le service est ouvert 24h/24h, toute l’année. Cependant, pour des
raisons de sécurité, le libre accès des adolescents à l’extérieur peut être
autorisé ou interdit par l’équipe pluridisciplinaire.
Buts du service
Une des missions du service est d’offrir des soins de
pédopsychiatrie au travers de traitement et d’élaboration d’un projet
individuel avec l’adolescent et si possible sa famille. La prise en charge permet
entre autre de contenir l’adolescent de dégager des hypothèses psycho-dynamiques et
d’évaluer le contexte familial, psychosocial et scolaire. L’unité a aussi pour
but de former des professionnels, tels que médecins, infirmiers, éducateurs, etc.
Financement
L’unité est entièrement financée par l’Etat de Vaud et la
Confédération. Les factures pour les prestations au client sont envoyées à la caisse
maladie.
L’équipe pluridisciplinaire
L’équipe pluridisciplinaire est composée de quatorze
collaborateurs à temps partiel ou complet : un chef de clinique, un médecin
associé, un médecin assistant, une psychologue, cinq infirmiers, un assistant social, un
éducateur, un enseignant spécialisé, une ergothérapeute et une secrétaire, dont la
plupart travaille à temps partiel.
Fonctionnement du service
Le fonctionnement du service comprend les colloques entre
collaborateurs, le travail en réseau, l’encadrement des personnes en formation, les
supervisions, les moyens d’évaluation et le règlement de base pour les patients.
L’équipe des collaborateurs se retrouve une fois par semaine pour
un colloque. Cette rencontre pluridisciplinaire fait partie du système de communication.
Elle permet tout d’abord des discussions d’ordre administrative, la
présentation des nouvelles situations ou demandes en cours et le choix des admissions. En
plus, le colloque est utilisé pour transmettre les informations au reste de
l’équipe des événements marquants concernant un adolescent, et les comptes rendus
des différents entretiens individuels ou en famille. Si nécessaire, les collaborateurs
ont à disposition, un espace de réflexions cliniques à partir d’une situation
d’un adolescent et un espace de réflexions théoriques. Les synthèses (bilan des
patients) peuvent être aussi organisées au sein des colloques. Par ailleurs, les
informations circulent aussi au travers de documents écrits ou oralement de manière
formelle ou informelle.
L’UHPA travaille en réseau afin de regrouper des professionnels
pour débattre un thème précis rencontré dans leur pratique professionnelle et pour
regrouper des personnes en liaison autour d’un patient.
L’encadrement des personnes en formation se fait au travers
d’entretiens avec un référent de l’équipe du même corps de métier, de
séminaires, de vidéos, de psychodrames individuels et de supervisions.
- Les supervisions d’équipe
L’UHPA fixe d’office une supervision pour l’équipe
pluridisciplinaire tous les quinze jours.
- Les moyens d’évaluation du travail
Les moyens pour évaluer et mesurer le travail des collaborateurs sont
les supervisions et les fiches d’évaluation. Lors des supervisions, les thérapeutes
peuvent analyser, avec l’aide d’une personne extérieure, la prise en charge
thérapeutique. Cet éclairage permet de réajuster éventuellement la prise en charge.
Les fiches d’évaluation permettent de suivre l’évolution du patient.
- Règlement de base à l’UHPA
L’unité est un lieu de vie où les patients vivent, mangent,
jouent, dorment et suivent des activités ; c’est pourquoi ils sont soumis à un
règlement de base pour le bon fonctionnement du service.
1. Les sorties et visites sont accordées en fonction de la situation
individuelle de chacun.
2. Les adolescents ne quittent pas l’UHPA sans l’autorisation
des soignants. Ils indiquent l’heure de retour.
3. L’introduction et la consommation de drogue, d’alcool ou
de médicament est strictement interdite dans l’unité (les traitements
médicamenteux sont décidés exclusivement par les médecins de l’UHPA).
4. La violence physique n’est pas tolérée.
5. La possession d’objets dangereux est interdite (les soignants
se réservent le droit de juger quels objets sont dangereux et pour qui).
6. Les relations sexuelles sont interdites.
7. L’équipe soignante se réserve en tout temps le droit de
prendre des mesures qu’elle juge nécessaires à la sécurité d’un adolescent
et/ou au bon fonctionnement (fouilles, tests sanguins ou urinaires, confiscation
d’objets, autorisation de sortie ou de week-end).
L’unité a planifié un horaire d’heures de visite : du
lundi au vendredi deux fois une heure par jour, le samedi pendant huit heures et le
dimanche pendant six heures. Les heures peuvent être modifiées selon prescription du
médecin.
4.2 Les patients
L’UHPA accueille des adolescents de 13 à 18 ans. La clientèle
est composée d’un plus grand nombre de filles que de garçons ; environ deux
tiers de filles pour un tiers de garçons. Comme l’unité a ouvert ses portes
l’année précédente, nous ne pouvons pas donner le nombre d’adolescents suivis
par année. Toutefois, de juin à décembre 1997, le nombre de patients s’élève à
35 adolescents, correspondant à 43 séjours. L’unité dispose de sept lits, de ce
fait un maximum de sept adolescents peuvent être accueillis chaque jour.
Les patients accueillis sont des adolescents en état de crise
souffrant de syndromes psychiatriques aigus et de divers problèmes psychologiques. Les
syndromes psychiatriques aigus survenant à l’adolescence sont des troubles graves de
l’humeur, des épisodes dépressifs majeurs, des bouffées délirantes, des
décompensations psychotiques, des tentatives de suicide, des anorexies mentales, des
états limites, des décompensations névrotiques sévères, etc. Les troubles
psychologiques sont des troubles du comportement, des problèmes scolaires, des conflits
familiaux, des troubles fonctionnels, etc.
La prise en charge par l’UHPA est demandée lorsque les
adolescents sont en état de crise et nécessitent une hospitalisation.
Les patients sont toujours adressés sur indication médicale. Elle
peut provenir des médecins traitants, des hôpitaux, du SUPEA, du SMP, de la PPP ou du
SPEA. Dans le secteur centre, si l’adolescent suicidant est pris en charge par le
CHUV pour les soins somatiques, il peut être adressé à l’UHPA par le service de
Pédopsychiatrie de liaison ou la DAMPS, qui aura effectué une consultation à
l’hôpital.
4.3 La prise en charge
Les procédures d’admission des adolescents ayant fait une
tentative de suicide ne diffèrent pas des autres demandes de prise en charge. Voici la
procédure d’admission pour le CTJA.
Procédure d’admission
1. Une demande est faite après indication médicale.
2. Si la demande est urgente, en fonction des places disponibles, le
médecin peut prendre seul
la décision d’accepter ou de ne pas accepter la demande. En
général, les demandes d’admission sont présentées en colloque et l’équipe
prend la décision d’accepter ou de refuser la demande.
3. Un entretien est organisé entre le médecin et les demandeurs.
4. Accueil du jeune au centre. Dès son arrivée, un médecin et un
soignant seront ses référents.
Les moyens de prise en charge
Les moyens utilisés pour le suivi des adolescents sont résumés en
neuf points :
1. Des entretiens individuels et familiaux en présence généralement
du médecin psychiatre et
du référent. Pendant ces moments-là, des projets de soins sont
établis avec le patient et ses
proches si cela est possible. Ce projet est individuel et propre à
chaque patient. Il permet
d’élaborer un programme pour l’adolescent comprenant une
psychothérapie, différentes
activités, un planning des éventuelles visites, sorties, week-ends à
l’intérieur ou à
l’extérieur de l’UHPA, autorisations de téléphone, etc.
2. Une psychothérapie individuelle d’inspiration psychanalytique
donnée par les médecins
et les psychologues.
- Un support médicamenteux peut être offert pour diminuer certains symptômes
de la psychopathologie.
4. Des réunions collectives entre les adolescents et les soignants
permettent d’approfondir des questions liées à la vie de groupe. Ces réunions ont
lieu deux fois par semaine.
5. Des ateliers encadrés par l’équipe soignante et
l’ergothérapeute à travers des activités de médiations diverses, telles que des
activités créatrices, atelier de contes, théâtre, sports,
sorties.
6. Une évaluation pédagogique et scolaire faite par l’enseignant
de l’unité en coordination avec les référents de l’adolescent. Le but de
cette évaluation est de favoriser une intégration scolaire ou professionnelle dans les
meilleures conditions possibles.
7. Un bilan socio-familial fait par l’assistant social, concernant
des activités à l’extérieur avec d’autres adolescents ou son lieu de vie hors
de l’unité. Ce bilan permet aussi d’évaluer les
ressources de l’entourage et de la famille.
8. Des activités sportives à l’extérieur de l’UHPA sont
exigées au moins une fois par semaine.
9. Des activités de jeux ou de loisirs sont mises en place en accord
avec l’équipe soignante.
La durée moyenne d’un traitement varie de deux semaines à six
mois. Elle dépend de la sévérité de la pathologie. A la suite de
l’hospitalisation, l’adolescent peut être suivi par un des médecins de
l’UHPA, par son médecin traitant ou par un autre thérapeute, selon son libre choix.
L’assistant social organise son retour à domicile ;
cependant si l’adolescent ne peut pas retourner vivre chez lui pour des raisons
familiales, l’assistant social met en place une procédure d’admission dans un
foyer pour adolescents. Tout placement est organisé avec le SPJ.
L’approche théorique
L’UHPA prend en charge les patients selon le modèle théorique
psychodynamique. Mais une collaboration est aussi recherchée avec les familles et une
intervenante extérieure au CTJA, dont le référentiel théorique est le modèle
systémique.
Le réseau de collaboration de l’UHPA
Les relations de l’unité avec l’extérieur sont nombreuses,
l’UHPA collabore avec le service de Pédopsychiatrie de liaison, la DAMPS, le SUPEA,
les hôpitaux, le secteur privé des professions médicales et sociales, le SPJ,
l’UMSA, l’AEMO, les institutions spécialisées accueillant des adolescents, les
écoles, les gymnases, le SES, le tribunal des mineurs, les personnes faisant partie de
l’entourage du patient, les sociétés sportives, musicales et artistiques, etc.
En ce qui concerne les adolescents suicidants pris en charge dans des
foyers, une collaboration est recherchée entre le milieu socio-éducatif et l’UHPA
pour l’élaboration d’un projet de soins commun. L’UHPA a besoin des foyers
pour certaines situations et les foyers sollicitent l’UHPA pour des hospitalisations.
5. Service
Médico-Pédagogique (SMP) à Yverdon
5.1 Le cadre institutionnel
Le SMP est un centre public situé au coeur d’Yverdon. Il est le
service de pédopsychiatrie de la partie Nord du canton de Vaud. Le secteur
d’activité du SMP recouvre 48% du canton de Vaud c’est pourquoi les antennes de
Payerne, Orbe, St-Croix et le Sentier à la Vallée de Joux se sont créées afin de mieux
desservir la population. Toutes les demandes de consultation ou de traitement pour le Nord
vaudois sont centralisées à Yverdon, car les différentes antennes dépendantes du SMP
n’ont pas de secrétaire, mais sont uniquement des lieux de consultations. De ce
fait, je décris principalement le service d’Yverdon. Le SMP est un centre public
dépendant des Hospices cantonaux, eux-mêmes dirigés par le DSAS.
Le SMP est ouvert du lundi au vendredi aux heures de bureau. Le service
de garde médicale de la région assure les urgences lors d’appel en dehors des
heures d’ouverture du service.
Buts du service
Une des missions du service est d’offrir des soins de
pédopsychiatrie au travers de consultations : d’investigation pour les parents
et les enfants confrontés à des difficultés psychologiques chez l’enfant, de
guidance (conseil) pour les parents, et en pédiatrie aux hôpitaux de la région sur
demande du médecin de l’hôpital. En outre, le service fait des bilans
psychologiques, offre des traitements logopédiques et différentes formes de prises en
charge thérapeutiques.
Les consultations permettent de dégager des hypothèses
psychodynamiques et d’évaluer le contexte familial, psychosocial et scolaire, afin
de mettre en place une prise en charge thérapeutique individuelle et/ou familiale. Le
service a aussi pour but de former des professionnels, tels que médecins, chefs de
clinique et psychologues.
Financement
L’unité est entièrement financée par l’Etat de Vaud et la
Confédération. Les factures pour les prestations au client sont envoyées à la caisse
maladie ou l’AI, qui les prend en charge. Une participation de 10%, plus
éventuellement la franchise sont facturées par la caisse aux parents. L’AI prend en
charge les psychothérapies des personnes dont les séquelles gêneraient
considérablement ou rendraient impossibles la formation ultérieure et l’exercice
d’une activité lucrative. En outre, pour bénéficier de cette aide financière, un
traitement spécialisé intensif a dû être appliqué pendant une année, sans apporter
d’amélioration suffisante.
Lorsque les adolescents demandeurs d’une prise en charge refusent
d’avertir leurs parents de leur démarche, des modalités de facturation sont
négociées avec l’adolescent en attendant une modification de la situation.
L’équipe pluridisciplinaire
L’équipe pluridisciplinaire est composée de vingt collaborateurs
à temps partiel ou complet pour tout le secteur Nord: deux chefs de clinique,
quatre médecins assistants, un médecin adjoint, cinq psychologues, quatre psychologues
assistants, une logopédiste et trois secrétaires.
Fonctionnement du service
Le fonctionnement du service comprend les colloques entre
collaborateurs, le travail en réseau, l’encadrement des personnes en formation et
les moyens d’évaluation du travail.
L’équipe des collaborateurs se retrouve une fois par semaine pour
un colloque. Cette rencontre pluridisciplinaire fait partie du système de communication.
Elle permet tout d’abord des discussions d’ordre administrative, la répartition
des demandes de consultation, un espace de réflexions cliniques à partir d’une
situation d’un adolescent et un espace de réflexions théoriques. Les synthèses
peuvent être aussi organisées au sein des colloques. Elles n’ont pas lieu
systématiquement pour chaque patient. Par ailleurs, les informations circulent oralement
de manière formelle.
Le SMP travaille en réseau afin de regrouper des professionnels pour
débattre un thème précis rencontré dans leur pratique professionnelle et pour
regrouper des personnes en liaison autour d’un patient.
L’encadrement des personnes en formation se fait au travers de
séminaires et d’entretiens avec un supérieur hiérarchique. En outre, les
collaborateurs en formation suivent une heure de supervision par semaine à
l’extérieur et une à deux heures d’encadrement avec une personne
hiérarchiquement supérieure, à l’intérieur du service.
- Les moyens d’évaluation du travail
Les moyens pour évaluer et mesurer le travail des collaborateurs sont
les supervisions individuelles. Lors des supervisions, les thérapeutes peuvent analyser,
avec l’aide d’une personne extérieure, la prise en charge thérapeutique. Cet
éclairage permet de réajuster éventuellement la prise en charge.
5.2 Les patients
Le SMP accueille des enfants et des adolescents de 0 à 18 ans. Environ
1000 patients sont suivis chaque année, dont 500 sont des nouvelles prises en charge. Les
adolescents représentent environ le 25% des patients, c’est-à-dire
approximativement 250 personnes par année. La clientèle est composée d’un plus
grand nombre de garçons et ceci jusqu’à la pré-adolescence. Par contre, dès
l’adolescence, les tendances se renversent : plus de femmes que d’hommes
sont suivis.
Les patients accueillis sont des enfants et des adolescents souffrant
de problèmes psychologiques et/ou de syndromes psychiatriques aigus. Les problèmes
psychologiques sont des troubles psychiques, des troubles du comportement, des problèmes
scolaires, des conflits familiaux, des troubles fonctionnels, etc. Les syndromes
psychiatriques aigus survenant à l’adolescence sont des troubles graves de
l’humeur, des épisodes dépressifs majeurs, des bouffées délirantes, des
décompensations psychotiques, des tentatives de suicide, des anorexies mentales, des
états limites, des décompensations névrotiques sévères, etc. Si l’adolescent
souffrant de syndromes psychiatriques aigus a une demande d’aide suffisante, et que
l’encadrement familial est stable et soutenant, le SMP peut prendre en charge
l’adolescent. Toutefois, si ces conditions ne sont pas remplies, l’adolescent
sera hospitalisé à l’UHPA.
Les patients sont adressés au SMP par les médecins traitants, les
hôpitaux, les parents, les adolescents eux-mêmes, les psychologues, le SPJ, les
pédiatres, les enseignants, etc.
Lorsque les adolescents demandeurs d’une prise en charge refusent
d’avertir leurs parents de leur démarche, le service entre en matière également
pour ces situations. L’un des objectifs de la prise en charge sera d’aider
l’adolescent à informer ses parents, afin de les intégrer au processus
thérapeutique. L’accès aux soins reste prioritaire pour le service.
5.3 La prise en charge
Tout d’abord, je décris la procédure d’admission habituelle
et dans un deuxième temps, je spécifie la procédure d’admission et les diverses
prises en charge d’adolescents suicidants. La présentation de ces diverses prises en
charge débute à partir des soins somatiques administrés aux urgences de
l’hôpital.
Procédure d’admission habituelle
1. La demande est enregistrée au secrétariat par téléphone ou
visite du demandeur.
2. Lors d’un colloque, un thérapeute est nommé en fonction des
spécificités de la demande et du lieu d’habitation du futur patient. Car si ce
dernier est dans le secteur de Payerne, Orbe,
St-Croix ou de la Vallée de Joux, la demande est transmise à
l’antenne régionale.
3. Le thérapeute désigné contacte le patient et/ou ses parents.
4. Une démarche de prise en charge thérapeutique est proposée au
demandeur.
Lorsqu’une situation urgente ne peut attendre le jour du colloque,
l’appel est transmis par le secrétariat au thérapeute de garde qui fixe le premier
rendez-vous.
Procédure d’admission et diverses prises en charge d’un adolescent suicidant
Lors d’une tentative de suicide, l’hôpital de soins
généraux, qui a soigné l’adolescent sur le plan somatique appelle généralement
le SMP pour consulter le patient avant sa sortie. Dans les 24 heures qui suivent, une
personne du SMP (chef de clinique, médecin ou psychologue) se déplace et fait une
évaluation de la situation. Dans ces cas-là, le déroulement de l’admission
diffère de la procédure habituelle ; c’est le thérapeute sur place qui
évalue avec le patient, et si possible ses parents, les mesures de prise en charge
adaptées. Il apprécie si le désir de mort est présent ou si la situation s’est
momentanément calmée. Ensuite, le médecin de l’hôpital tient compte de
l’avis du consultant du SMP pour mettre en place la suite de la prise en charge de
l’adolescent. Les prises en charge diffèrent d’un adolescent à
l’autre ; elles dépendent aussi des risques suicidaires des adolescents, de
leur contexte social et des facteurs déclenchant la tentative de suicide. Par exemple, si
l’adolescent refuse un accompagnement thérapeutique et présente des risques de
récidive, l’hôpital se doit d’organiser une hospitalisation en milieu
psychiatrique contre son gré. En définitive, les possibilités de prise en charge de ces
adolescents sont nombreuses, nous pouvons cependant les regrouper en trois
catégories : suivi des adolescents vivant au domicile, hospitalisés, ou placés
dans un foyer.
Le retour à domicile est accordé lorsque le contexte familial
n’est pas pathogène, que l’adolescent ne présente pas de signe de récidive et
de psychopathologie sévère. Si un de ces critères n’est pas rempli,
l’adolescent peut être placé dans un foyer. Toutefois, une hospitalisation est
possible pour les adolescents à risque de récidive et souffrant d’une
psychopathologie sévère.
Voici en dix points les diverses prises en charge possibles d’un
adolescent ayant fait une tentative de suicide (cf. tableau 4, p. 30):
- Retour au domicile avec un suivi par une des antennes du SMP.
- Retour au domicile avec un suivi thérapeutique par un médecin traitant.
- Retour au domicile et prise en charge journalière par le CTJA.
- Retour au domicile sans suivi thérapeutique.
- Prise en charge dans un foyer avec un suivi thérapeutique par une des antennes du SMP.
- Prise en charge dans un foyer avec un suivi thérapeutique par un médecin traitant.
- Prise en charge dans un foyer et suivi journalier par le CTJA.
- Prise en charge dans un foyer sans suivi thérapeutique.
- Hospitalisation à l’UHPA.
- Hospitalisation à l’hôpital psychiatrique de Bellevue lorsqu’il n’y a
plus de place disponible à l’UHPA.
Les moyens de prise en charge
Les moyens professionnels utilisés, pour le suivi des adolescents,
sont une psychothérapie individuelle, les entretiens de famille organisés par les
médecins ou les psychologues prenant en charge l’adolescent, et le support
médicamenteux.
Les thérapeutes tentent, au travers d’une psychothérapie,
d’éclaircir avec l’adolescent les circonstances de sa vie qui l’ont amené
au passage à l’acte. Ces réflexions doivent permettre à l’adolescent de
trouver des moyens autres que le suicide pour apaiser sa souffrance.
Les entretiens de famille sont très importants, car la tentative de
suicide ébranle, touche l’entourage et provoque souvent une mobilisation de
celui-ci. La famille peut réagir soit par un recouvrement du problème en niant la
gravité de l’acte, soit par un mouvement de rejet envers l’adolescent, ou par
une prise de conscience du problème et un désir de tout mettre en place, tel qu’un
traitement en famille pour trouver des solutions. Quant au support médicamenteux, il peut
être offert pour diminuer certains symptômes de la psychopathologie.
La durée moyenne d’un traitement varie de quelques consultations
à une psychothérapie pendant plusieurs années. Certains adolescents abandonnent le
traitement après quelques consultations, d’autres profitent des soins donnés
pendant plusieurs années. La durée du traitement dépend de la sévérité de la
pathologie.
Tableau 4: Possibilités de prises en charge d’un adolescent
suicidant
dans le secteur Nord
L’approche théorique
Le SMP prend en charge les patients selon le modèle théorique
psychodynamique. Une collaboration est aussi recherchée avec les familles dans la prise
en charge des adolescents. Des collaborateurs, ayant suivi des cours systémiques, offrent
à l’équipe leur regard sur les situations.
Le réseau de collaboration du SMP
Les relations du SMP avec l’extérieur sont nombreuses : le
service collabore avec les hôpitaux, le secteur privé des professions médicales et
sociales, le SPJ, l’AEMO, les institutions spécialisées accueillant des
enfants et des adolescents, les écoles, les gymnases, le SES, le tribunal des mineurs,
les personnes faisant partie de l’entourage du patient, le Service Educatif
Itinérant (SEI), les infirmières de santé publique, etc.
En ce qui concerne les adolescents suicidants pris en charge dans des
foyers, une collaboration est recherchée entre le milieu socio-éducatif et le SMP pour
l’élaboration d’un projet de soins commun. Le SMP a besoin des foyers pour
certaines situations et les foyers sollicitent le SMP pour des consultations.
6. Service de
psychiatrie et psychothérapie d’enfants et d’adolescents à Vevey
6.1 Le cadre institutionnel
Le service de psychiatrie et psychothérapie d’enfants et
d’adolescents fait partie de la fondation de Nant à Corsier sur Vevey, qui constitue
le secteur psychiatrique de l’Est vaudois. Ce secteur est donc privé, mais sa
mission est publique. C’est pour des raisons historiques qu’il fait partie
d’une fondation privée. En effet, en 1968 la fondation de Nant devient, par
convention signée avec l’Etat, l’hôpital psychiatrique de l’Est vaudois.
Plus tard, en 1985, elle reçoit la mission d’organiser la psychiatrie publique du
secteur Est du canton de Vaud. Afin d’améliorer l’accessibilité du service aux
patients, celui-ci dispose de trois lieux de consultations ambulatoires : à Vevey,
Montreux et Aigle. Les trois lieux de consultations sont sous la responsabilité du
médecin chef de Vevey et fonctionnent de la même manière, c’est pourquoi je
décris uniquement le service de Vevey.
Le service se compose de deux structures : La PPP et le Centre
psychothérapeutique de Jour pour Enfants (CPDJ). La PPP offre une prise en charge
ambulatoire, par contre le CPDJ est un hôpital de jour pour enfants. De ce fait, dans la
présentation de ce service, je développe uniquement la première structure,
c’est-à-dire la PPP car le CPDJ prend en charge uniquement des enfants et cette
population n’est pas prise en compte dans cette recherche.
La PPP est ouverte du lundi au vendredi aux heures de bureau. Le
service de garde médicale de la région assure les urgences lors d’appel en dehors
des heures d’ouverture du service.
Buts du service
Une des missions du service est d’offrir des soins de
pédopsychiatrie au travers de consultations : d’investigation pour les parents
et les enfants confrontés à des difficultés psychologiques chez l’enfant, de
guidance (conseil) pour les parents, pendant la grossesse, et en pédiatrie aux hôpitaux
de la région sur demande du médecin de l’hôpital. En outre, le service fait des
bilans psychologiques et différentes formes de prises en charge thérapeutiques.
Les consultations permettent de dégager des hypothèses
psychodynamiques et d’évaluer le contexte familial, psychosocial et scolaire, afin
de mettre en place une prise en charge thérapeutique individuelle et/ou familiale. Le
service a aussi pour but de former des professionnels tels que médecins, chefs de
clinique et psychologues.
Financement
L’unité est entièrement financée par l’Etat de Vaud et la
Confédération. Les factures pour les prestations au client sont envoyées à la caisse
maladie ou l’AI, qui les prend en charge. Une participation de 10%, plus
éventuellement la franchise sont facturées par la caisse aux parents. L’AI prend en
charge les psychothérapies des personnes dont les séquelles gêneraient
considérablement ou rendraient impossibles la formation ultérieure et l’exercice
d’une activité lucrative. En outre, pour bénéficier de cette aide financière, un
traitement spécialisé intensif a dû être appliqué pendant une année, sans apporter
d’amélioration suffisante.
Lorsque les adolescents demandeurs d’une prise en charge refusent
d’avertir leurs parents de leur démarche, des modalités de facturation sont
négociées avec l’adolescent en attendant une modification de la situation.
L’équipe pluridisciplinaire
L’équipe pluridisciplinaire est composée de huit collaborateurs
à temps partiel ou complet : un chef de clinique, un médecin chef, un médecin
assistant, une psychologue, deux psychologues assistants, une psychologue stagiaire et une
secrétaire.
Fonctionnement du service
Le fonctionnement du service comprend les colloques entre
collaborateurs, le travail en réseau, les supervisions, l’encadrement des personnes
en formation et les moyens d’évaluation du travail.
L’équipe des collaborateurs se retrouve une fois par semaine pour
un colloque. Cette rencontre pluridisciplinaire fait partie du système de communication.
Elle permet tout d’abord des discussions d’ordre administrative, la répartition
des demandes de consultation, un espace de réflexions cliniques à partir d’une
situation d’un adolescent et un espace de réflexions théoriques. Les synthèses
peuvent être aussi organisées au sein des colloques. Par ailleurs les informations
circulent aussi au travers de documents écrits ou oralement de manière formelle.
La PPP travaille en réseau afin de regrouper des professionnels pour
débattre un thème précis rencontré dans leur pratique professionnelle et pour
regrouper des personnes en liaison autour d’un patient.
L’encadrement des personnes en formation se fait au travers de
séminaires, de vidéos, de psychodrames individuels, de supervisions et d’entretiens
avec un supérieur hiérarchique.
- Les supervisions d’équipe
Des supervisions ont lieu selon les besoins de l’équipe.
- Les moyens d’évaluation du travail
Les moyens pour évaluer et mesurer le travail des collaborateurs sont
les supervisions et les fiches d’évaluation des prises en charge. Lors des
supervisions, les thérapeutes peuvent analyser, avec l’aide d’une personne
extérieure, la prise en charge thérapeutique. Cet éclairage permet de réajuster
éventuellement la prise en charge.
6.2 Les patients
La PPP accueille des enfants et des adolescents de 0 à 18 ans. Environ
560 personnes sont suivies par année. Les adolescents en représentent environ le 16%,
c’est-à-dire approximativement 90 personnes par année. La clientèle est composée
d’un plus grand nombre de garçons et ceci jusqu’à la pré-adolescence. Par
contre, dès l’adolescence les tendances se renversent, plus de femmes que
d’hommes sont suivis.
Les patients accueillis sont des enfants et des adolescents souffrant
de problèmes psychologiques et/ou de syndromes psychiatriques aigus. Les problèmes
psychologiques sont des troubles psychiques, des troubles du comportement, des problèmes
scolaires, des conflits familiaux, des troubles fonctionnels, etc. Les syndromes
psychiatriques aigus survenant à l’adolescence sont des troubles graves de
l’humeur, des épisodes dépressifs majeurs, des bouffées délirantes, des
décompensations psychotiques, des tentatives de suicide, des anorexies mentales, des
états limites, des décompensations névrotiques sévères, etc. Si l’adolescent
souffrant de syndromes psychiatriques aigus a une demande d’aide suffisante, et que
l’encadrement familial est stable et soutenant, le SMP peut prendre en charge
l’adolescent. Toutefois, si ces conditions ne sont pas remplies, l’adolescent
sera hospitalisé à l’UHPA.
Les patients sont adressés à la policlinique par les médecins
traitants, les hôpitaux, les parents, les adolescents eux-mêmes, les psychologues, le
SPJ, les pédiatres, les enseignants, etc.
Lorsque certains adolescents demandent de l’aide mais ne désirent
pas informer leurs parents de cette démarche, le service entre en matière également
pour ces situations. L’un des objectifs de la prise en charge sera d’aider
l’adolescent à mettre ses parents au courant, afin de les intégrer au processus
thérapeutique. L’accès aux soins reste prioritaire pour le service.
6.3 La prise en charge
Tout d’abord, je décris la procédure d’admission habituelle
et dans un deuxième temps, je spécifie la procédure d’admission et les diverses
prises en charge d’adolescents suicidants. La présentation de ces diverses prises en
charge débute à partir des soins somatiques administrés aux urgences de
l’hôpital.
Procédure d’admission habituelle
1. La demande est enregistrée au secrétariat par téléphone ou
visite du demandeur.
2. Lors d’un colloque, un thérapeute est nommé en fonction des
spécificités de la demande.
3. Le thérapeute désigné contacte le patient et/ou ses parents.
4. Une démarche de prise en charge thérapeutique est proposée au
demandeur.
Lorsqu’une situation urgente ne peut attendre le jour du colloque,
le chef de clinique s’occupe de trouver dans les huit heures qui suivent un
thérapeute disponible.
Procédure d’admission et diverses prises en charge d’un adolescent suicidant
Lors d’une tentative de suicide, l’hôpital de soins
généraux qui a soigné l’adolescent sur le plan somatique appelle généralement la
PPP pour consulter le patient avant sa sortie. Dans les 12 heures qui suivent, une
personne de la PPP (chef de clinique, médecins ou psychologues) se déplace et fait une
évaluation de la situation. Dans ces cas-là, le déroulement de l’admission
diffère de la procédure habituelle ; c’est le thérapeute sur place qui
évalue avec le patient, et si possible ses parents, les mesures de prise en charge
adaptées. Il apprécie si le désir de mort est présent ou si la situation s’est
momentanément calmée. Ensuite, le médecin de l’hôpital tient compte de
l’avis du consultant de la PPP pour mettre en place la suite de la prise en charge de
l’adolescent. Les prises en charge diffèrent d’un adolescent à
l’autre ; elles dépendent aussi des risques suicidaires des adolescents, de
leur contexte social et des facteurs déclenchants la tentative de suicide. Par exemple,
si l’adolescent refuse un accompagnement thérapeutique et présente des risques de
récidive, l’hôpital se doit d’organiser une hospitalisation en milieu
psychiatrique contre son gré. En définitive, les possibilités de prises en charge de
ces adolescents sont nombreuses, nous pouvons cependant les regrouper en trois
catégories : suivi des adolescents vivant au domicile, hospitalisés ou placés dans
un foyer.
Le retour à domicile est accordé lorsque le contexte familial
n’est pas pathogène, que l’adolescent ne présente pas de signe de récidive et
de psychopathologie sévère. Si un de ces critères n’est pas rempli,
l’adolescent peut être placé dans un foyer. Toutefois, une hospitalisation est
possible pour les adolescents à risque de récidive et dotés d’une psychopathologie
sévère.
Voici en dix points les diverses prises en charge possibles d’un
adolescent ayant fait une tentative de suicide (cf. tableau 5, p. 37) :
- Retour au domicile avec un suivi par la PPP.
- Retour au domicile avec un suivi thérapeutique par un médecin traitant.
- Retour au domicile et prise en charge journalière par le CTJA.
- Retour au domicile sans suivi thérapeutique.
- Prise en charge dans un foyer avec un suivi thérapeutique par la PPP.
- Prise en charge dans un foyer avec un suivi thérapeutique par un médecin traitant.
- Prise en charge dans un foyer et suivi journalier par le CTJA.
- Prise en charge dans un foyer sans suivi thérapeutique.
- Proposition d’une prise en charge au CTJA.
- Hospitalisation à l’UHPA.
- Hospitalisation à l’hôpital psychiatrique de Nant lorsqu’il n’y a plus
de place disponible à l’UHPA.
Les moyens de prise en charge
Les outils utilisés pour le suivi des adolescents sont une
psychothérapie individuelle, les entretiens de famille, les psychodrames psychanalytiques
individuels et/ou de groupe et le support médicamenteux.
Les médecins ou psychologues tentent, au travers d’une
psychothérapie, d’éclaircir avec l’adolescent les circonstances de sa vie qui
l’ont amené au passage à l’acte. Ces réflexions doivent permettre à
l’adolescent de trouver des moyens autres que le suicide pour apaiser sa souffrance.
Les psychodrames sont des moyens utilisés par les thérapeutes pour permettre aux
patients de faire un lien entre les difficultés ressenties dans les scènes jouées et
les difficultés qu’ils rencontrent dans leur vie.
Les entretiens de famille sont très importants, car la tentative de
suicide ébranle, touche l’entourage et provoque souvent une mobilisation de
celui-ci. La famille peut réagir soit par un recouvrement du problème en niant la
gravité de l’acte, soit par un mouvement de rejet envers l’adolescent, ou par
une prise de conscience du problème et un désir de tout mettre en place, tel qu’un
traitement en famille pour trouver des solutions. Quant au support médicamenteux, il peut
être offert pour diminuer certains symptômes de la psychopathologie.
La durée moyenne d’un traitement varie de quelques consultations
à une psychothérapie pendant plusieurs années. Certains adolescents abandonnent le
traitement après quelques consultations et d’autres profitent des soins donnés
pendant plusieurs années. La durée du traitement dépend de la sévérité de la
pathologie.
Tableau 5: Possibilités de prises en charge d’un adolescent
suicidant
dans le secteur Est
L’approche théorique
La PPP prend en charge les patients selon le modèle théorique
psychodynamique.
Le réseau de collaboration de la PPP
Les relations de la PPP avec l’extérieur sont nombreuses :
la policlinique collabore avec les hôpitaux, le secteur privé des professions médicales
et sociales, le SPJ, l’AEMO, les institutions spécialisées accueillant des
enfants et des adolescents, les écoles, les gymnases, le SES, le tribunal des mineurs,
les personnes faisant partie de l’entourage du patient, le SEI, les infirmières de
santé publique, etc.
En ce qui concerne les adolescents suicidants pris en charge dans des
foyers, une collaboration est recherchée entre le milieu socio-éducatif et la PPP pour
l’élaboration d’un projet de soins commun. La PPP a besoin des foyers pour
certaines situations et les foyers sollicitent la PPP pour des consultations
7. Service
de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent
(SPEA) à Nyon et Morges
7.1 Le cadre institutionnel
Le SPEA est un service public couvrant deux sous-secteurs, Nyon et
Morges. Il est le service de pédopsychiatrie de la partie Ouest du canton de Vaud. Les
bureaux de la direction du service sont à Nyon. Afin de mieux desservir la population, le
SPEA a crée par la suite un sous-secteur à Morges. Le SPEA est un centre public
dépendant des Hospices cantonaux, eux-mêmes dirigés par le DSAS. A Nyon, un centre
thérapeutique de jour s’est créé, il est pris en charge par deux structures
différentes ; d’une part l’équipe thérapeutique dépend du SPEA, et
d’autre part l’équipe pédago-éducative et l’administration dépendent de
la Fondation de Vernand. Je décris principalement le service de Nyon.
Le SPEA est ouvert du lundi au vendredi aux heures de bureau, ainsi que
le samedi matin. Le service de garde médicale de la région assure les urgences lors
d’appel en dehors des heures d’ouverture du service.
Buts du service
Une des missions du SPEA est d’offrir des soins de
pédopsychiatrie au travers de consultations : d’investigation pour les parents
et les enfants confrontés à des difficultés psychologiques chez l’enfant, de
guidance (conseil) pour les parents, pendant la grossesse, et en pédiatrie aux hôpitaux
de Nyon et Morges sur demande du médecin de l’hôpital. En outre, le SPEA fait des
bilans psychologiques, offre des traitements logopédiques et différentes formes de
prises en charge thérapeutiques.
Les consultations permettent de dégager des hypothèses
psychodynamiques et d’évaluer le contexte familial, psychosocial et scolaire, afin
de mettre en place une prise en charge thérapeutique individuelle et/ou familiale. Le
service a aussi pour but de former des professionnels, tels que médecins, chefs de
clinique et psychologues.
Financement
L’unité est entièrement financée par l’Etat de Vaud et la
Confédération. Les factures pour les prestations au client sont envoyées à la caisse
maladie ou l’AI, qui les prend en charge. Une participation de 10%, plus
éventuellement la franchise sont facturées par la caisse aux parents. L’AI prend en
charge les psychothérapies des personnes dont les séquelles gêneraient
considérablement ou rendraient impossibles la formation ultérieure et l’exercice
d’une activité lucrative. En outre, pour bénéficier de cette aide financière, un
traitement spécialisé intensif a dû être appliqué pendant une année, sans apporter
d’amélioration suffisante.
Lorsque les adolescents demandeurs d’une prise en charge refusent
d’avertir leurs parents de leur démarche, des modalités de facturation sont
négociées avec l’adolescent en attendant une modification de la situation.
L’équipe pluridisciplinaire
L’équipe pluridisciplinaire est composée de seize personnes à
temps partiel ou complet : un chef de clinique, un chef de clinique adjoint, un
médecin chef, un médecin associé, deux médecins assistants, cinq psychologues, un
assistant social, une logopédiste et trois secrétaires. Certains postes sont partagés
avec le service de Morges.
Fonctionnement du service
Le fonctionnement du service comprend les colloques entre
collaborateurs, le travail en réseau, l’encadrement pour les personnes en formation,
les supervisions et les moyens d’évaluation du travail.
L’équipe des collaborateurs se retrouve une fois par semaine pour
un colloque. Cette rencontre pluridisciplinaire fait partie du système de communication.
Elle permet tout d’abord des discussions d’ordre administrative, la répartition
des demandes de consultation, un espace de réflexions cliniques à partir d’une
situation d’un adolescent et un espace de réflexions théoriques. Par ailleurs, les
informations circulent oralement de manière formelle.
Le SPEA travaille en réseau afin de regrouper des professionnels pour
débattre un thème précis rencontré dans leur pratique professionnelle et pour
regrouper des personnes en liaison autour d’un patient.
L’encadrement des personnes en formation se fait au travers de
séminaires, de vidéos, de suivi par un supérieur hiérarchique et de supervisions
individuelles.
- Les supervisions d’équipe
Des supervisions d’équipe ont lieu deux à quatre fois par an.
Les supervisions permettent aussi la présentation de synthèse, c’est-à-dire le
bilan d’un patient. Les synthèses ont lieu en fonction de la demande du thérapeute,
en moyenne une à deux fois par an.
- Les moyens d’évaluation du travail
Les moyens pour évaluer et mesurer le travail des collaborateurs sont
les supervisions. Lors des supervisions, les thérapeutes peuvent analyser, avec
l’aide d’une personne extérieur, la prise en charge thérapeutique. Cet
éclairage permet de réajuster éventuellement la prise en charge.
7.2 Les patients
Le SPEA accueille des enfants et des adolescents de 0 à 18 ans.
Environ 550 patients sont suivis chaque année, dont plus de la moitié sont des nouveaux
cas. Les adolescents représentent environ 15% à 20% des patients, c’est-à-dire
approximativement 90 personnes par année. La clientèle est composée d’un plus
grand nombre de garçons et ceci jusqu’à la pré-adolescence. Par contre, dès
l’adolescence, les tendances se renversent, plus de femmes que d’hommes sont
suivis. Le SPEA émet cette constatation, mais nécessite, de leur point de vue, une
vérification des statistiques.
Les patients accueillis sont des enfants et des adolescents souffrant
de problèmes psychologiques et/ou de syndromes psychiatriques aigus. Les problèmes
psychologiques sont des troubles psychiques, des troubles du comportement, des problèmes
scolaires, des conflits familiaux, des troubles fonctionnels, etc. Les syndromes
psychiatriques aigus survenant à l’adolescence sont des troubles graves de
l’humeur, des épisodes dépressifs majeurs, des bouffées délirantes, des
décompensations psychotiques, des tentatives de suicide, des anorexies mentales, des
états limites, des décompensations névrotiques sévères, etc. Si l’adolescent
souffrant de syndromes psychiatriques aigus a une demande d’aide suffisante, et que
l’encadrement familial est stable et soutenant, le SMP peut prendre en charge
l’adolescent. Toutefois, si ces conditions ne sont pas remplies, l’adolescent
sera hospitalisé à l’UHPA.
Les patients sont adressés au SPEA par les médecins traitants, les
hôpitaux, les parents, les adolescents eux-mêmes, les psychologues, le SPJ, les
pédiatres, les enseignants, etc.
Lorsque certains adolescents demandent de l’aide mais ne désirent
pas informer leurs parents de cette démarche, le service entre en matière également
pour ces situations. L’un des objectifs de la prise en charge sera d’aider
l’adolescent à mettre ses parents au courant, afin de les intégrer au processus
thérapeutique. L’accès aux soins reste prioritaire pour le service.
7.3 La prise en charge
Tout d’abord, je décris la procédure d’admission habituelle
et dans un deuxième temps, je spécifie la procédure d’admission et les diverses
prises en charge d’adolescents suicidants. La présentation de ces diverses prises en
charge débute à partir des soins somatiques administrés aux urgences de
l’hôpital.
Procédure d’admission habituelle
1. Le demandeur est enregistré au secrétariat par téléphone ou
visite.
2. La secrétaire avise un des collaborateurs qui téléphone au client
pour prendre note de la
demande.
3. Le collaborateur transmet la demande au colloque, un thérapeute est
nommé en fonction
de la demande.
4. Le thérapeute désigné contacte le patient et/ou ses parents.
5. Une démarche de prise en charge thérapeutique est proposée au
demandeur.
Procédure d’admission et diverses prises en charge d’un adolescent suicidant
Lors d’une tentative de suicide, l’hôpital de soins
généraux qui a soigné l’adolescent sur le plan somatique appelle généralement le
SPEA pour consulter le patient avant sa sortie. Dans les 12 heures qui suivent, le chef de
clinique adjoint du SPEA (si absent, médecins ou psychologues) se déplace et fait une
évaluation de la situation. Dans ces cas-là, le déroulement de l’admission
diffère de la procédure habituelle ; c’est le thérapeute sur place qui
évalue avec le patient, et si possible ses parents, les mesures de prise en charge
adaptées. Il apprécie si le désir de mort est présent ou si la situation s’est
momentanément calmée. Ensuite, le médecin de l’hôpital tient compte de
l’avis du consultant du SPEA pour mettre en place la suite de la prise en charge de
l’adolescent. Les prises en charge diffèrent d’un adolescent à
l’autre ; elles dépendent aussi des risques suicidaires des adolescents, de
leur contexte social et des facteurs déclenchants la tentative de suicide. Par exemple,
si l’adolescent refuse un accompagnement thérapeutique et présente des risques de
récidive, l’hôpital se doit d’organiser une hospitalisation en milieu
psychiatrique contre son gré. En définitive, les possibilités de prise en charge de ces
adolescents sont nombreuses, nous pouvons cependant les regrouper en trois
catégories : suivi des adolescents vivant au domicile, hospitalisés ou placés dans
un foyer.
Le retour à domicile est accordé lorsque le contexte familial
n’est pas pathogène, que l’adolescent ne présente pas de signe de récidive et
de psychopathologie sévère. Si un de ces critères n’est pas rempli,
l’adolescent peut être placé dans un foyer. Toutefois, une hospitalisation est
possible pour les adolescents à risque de récidive et dotés d’une psychopathologie
sévère.
Voici en dix points les diverses prises en charge possibles d’un
adolescent ayant fait une tentative de suicide (cf. tableau 6, p. 44) :
- Retour au domicile avec un suivi par le SPEA.
- Retour au domicile avec un suivi thérapeutique par un médecin traitant.
- Retour au domicile et prise en charge journalière par le CTJA.
- Retour au domicile sans suivi thérapeutique.
- Prise en charge dans un foyer avec un suivi thérapeutique par le SPEA.
- Prise en charge dans un foyer avec un suivi thérapeutique par un médecin traitant.
- Prise en charge dans un foyer et suivi journalier par le CTJA.
- Prise en charge dans un foyer sans suivi thérapeutique.
- Proposition d’une prise en charge au CTJA.
- Hospitalisation à l’UHPA.
- Hospitalisation à l’hôpital psychiatrique de Prangins lorsqu’il n’y a
plus de place disponible à l’UHPA.
Les moyens de prise en charge
Les outils professionnels utilisés pour le suivi des adolescents, sont
la psychothérapie individuelle, les entretiens de famille et le support médicamenteux.
Les médecins ou psychologues prenant en charge l’adolescent ont pour but la
restauration des aménagements psychiques de l’adolescent, l’atténuation de la
symptomatologie et une meilleure utilisation des potentialités.
Les entretiens de famille sont très importants, car la tentative de
suicide ébranle, touche l’entourage et provoque souvent une mobilisation de
celui-ci. La famille peut réagir soit par un recouvrement du problème en niant la
gravité de l’acte, soit par un mouvement de rejet envers l’adolescent ou par
une prise de conscience du problème et un désir de tout mettre en place, tel qu’un
traitement en famille pour trouver des solutions. En général, c’est le thérapeute
de l’adolescent ou parfois un autre collègue qui guide les entretiens de famille.
Quant au support médicamenteux, il peut être offert pour diminuer certains symptômes de
la psychopathologie.
La durée moyenne d’un traitement varie de quelques consultations
à une psychothérapie pendant plusieurs années. Certains adolescents abandonnent le
traitement après quelques consultations et d’autres profitent des soins donnés
pendant plusieurs années. La durée du traitement dépend de la sévérité de la
pathologie.
Tableau 6: Possibilités de prises en charge d’un adolescent suicidant
dans le secteur Ouest
L’approche théorique
Le SPEA prend en charge les patients selon le modèle psychodynamique.
En outre, une collaboration est recherchée avec les familles dans la prise en charge des
adolescents ; des collaborateurs ayant suivi des cours systémiques, offrent à
l’équipe leur regard sur les situations.
Le réseau de collaboration du SPEA
Les relations du SPEA avec l’extérieur sont nombreuses : le
service collabore avec les hôpitaux, le secteur privé des professions médicales et
sociales, le SPJ, l’AEMO, les institutions spécialisées accueillant des
enfants et des adolescents, les écoles, les gymnases, le SES, le tribunal des mineurs,
les personnes faisant partie de l’entourage du patient, le SEI, les infirmières de
santé publique, etc.
En ce qui concerne les adolescents suicidants pris en charge dans des
foyers, une collaboration est recherchée entre le milieu socio-éducatif et le SPEA pour
l’élaboration d’un projet de soins commun. Le SPEA a besoin des foyers pour
certaines situations et les foyers sollicitent le SPEA pour des consultations.
2
_______________________________
Etude comparative des
centres et unités d’accompagnement psychiatrique des adolescents suicidants
dans le canton de Vaud
Introduction
Ce chapitre tente de comparer les centres et unités
d’accompagnement psychiatrique des adolescents suicidants décrits précédemment,
afin de relever les similitudes et les différences entre les services. Il faut toutefois
prendre ces constatations avec une certaine réserve, étant donné que le questionnaire
de base était sous forme de questions ouvertes.
J’ai procédé de la manière suivante : tout d’abord,
j’ai confronté chaque point traité lors des descriptifs des centres pour en faire
ressortir les similitudes et différences, et ensuite j’émets quelques constatations
personnelles. Afin de faciliter la lecture de certaines données, j’ai créé des
tableaux. Les initiales et les lieux géographiques désignent les services. Les points
abordés sont les suivants : les cadres institutionnels, les patients et les prises
en charge. Ils sont cités dans le même ordre que les descriptifs des services. Les items
ne sont pas écrits par ordre alphabétique mais respectent l’ordre des descriptifs.
Je tiens aussi à préciser que le SUPEA n’est pas pris en compte
dans cette étude comparative, car il est un organe dirigeant et chacun de ses services a
une spécificité. C’est pourquoi, en ce qui concerne le SUPEA, j’aborde
uniquement le CTJA et l’UHPA qui s’occupent essentiellement des adolescents.
1. Les cadres institutionnels
Les points suivants permettent de comparer les statuts, les structures,
les buts, les financements, les équipes pluridisciplinaires et les fonctionnements des
services.
1.1 Les statuts
L’UHPA, le CTJA, le SPEA et le SMP sont des centres publics,
c’est-à-dire qu’ils dépendent des Hospices cantonaux, eux-mêmes dirigés par
le DSAS. Par contre, le service de psychiatrie et psychothérapie d’enfants et
d’adolescents à Vevey fait partie d’une fondation privée dont la mission est
publique. Cette dernière dépend du GHRV et reçoit, aussi, des subventions de
l’Etat.
1.2 Les structures
La structure de chaque service est très spécifique. L’UHPA et le
CTJA prennent en charge uniquement des adolescents alors que le SMP, le service de
psychiatrie et psychothérapie d’enfants et d’adolescents à Vevey et le SPEA
prennent en charge des enfants et des adolescents. L’UHPA et le CTJA sont des lieux
de vie où les adolescents passent leurs journées. L’UHPA se distingue des autres
structures par une prise en charge à temps complet. Par contre, les trois autres sont des
centres de consultations.
Le SPEA et le service de psychiatrie et psychothérapie d’enfants
et d’adolescents à Vevey ont une particularité commune, ils offrent aussi des
prestations pédago-thérapeutiques au sein d’un centre thérapeutique de Jour pour
enfants. Etant donné que le service de psychiatrie et psychothérapie d’enfants et
d’adolescents à Vevey se compose de deux structures distinctes (la PPP et le CPDJ),
cette étude comparative prend en compte uniquement la PPP, car le CPDJ concerne
uniquement les enfants.
Même si le SMP, la PPP et le SPEA offrent des prestations ambulatoires
aux clients, des différences existent au sein de chaque service. En ce qui concerne le
SMP, il est l’organe principal du secteur Nord. Ce dernier dispose de cinq antennes,
toutefois les demandes de consultations sont centralisées à Yverdon. Le service de
psychiatrie et psychothérapie d’enfants et d’adolescents à Vevey, quant à
lui, dispose aussi de trois lieux de consultations, mais contrairement au SMP, chaque lieu
de consultations est plus ou moins autonome et gère les demandes. En ce qui concerne le
SPEA, qui a aussi un sous-secteur à Morges, fonctionne de la même manière que le
service de Vevey, c’est-à-dire que les deux secteurs sont autonomes.
Je peux constater, en analysant la structure des services, qu’il
en existe uniquement deux (CTJA et UHPA), créés spécifiquement pour la prise en charge
des adolescents dans le canton de Vaud. En plus, ces deux derniers offrent des lieux de
vie pour les adolescents. Cette prestation n’est pas retrouvée dans les autres
services.
Le traitement des données concernant les structures des services est
divisé en deux points : les heures d’ouverture et les appels urgents.
Les heures d’ouverture
Les réponses correspondent à la question posée, lors des entretiens,
suite au questionnaire : " quelles sont les heures d’ouverture de
votre service ? ".
Tableau 7 : Heures d’ouverture
HEURES D’OUVERTURE |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Lundi au vendredi, heures de bureau |
|
|
7 |
7 |
7 |
Lundi au vendredi toute la journée |
7 |
|
|
|
|
Le samedi matin |
|
|
|
|
7 |
24h/24h |
|
7 |
|
|
|
L’UHPA est ouverte 24h/24h, tandis que le CTJA est ouvert toute la
journée du lundi au vendredi, de ce fait les adolescents peuvent prendre leurs repas sur
place. Le SMP et la PPP sont ouverts du lundi au vendredi aux heures de bureau. Par
contre, le SPEA est aussi ouvert le samedi matin.
L’UHPA est donc la seule unité prenant en charge les adolescents
à temps complet. Le suivi offert par tous les autres services requière forcément une
prise en charge par la famille ou par un foyer. Il me semble, en effet, que la
possibilité d’accueillir des adolescents à temps complet est faible dans le canton
de Vaud. Est-ce dû aux problèmes financiers du canton ou aux professionnels de la santé
qui désirent favoriser les prises en charge ambulatoires ? A mon avis, il est
préférable pour les adolescents de retourner dans leur famille, si cette dernière peut
offrir un soutien. Dans les cas contraires, il me semble important de pouvoir disposer
pour l’adolescent d’un lieu transitoire, sécurisant et permettant ainsi de
faire le point de la situation avec sa famille ; car la tentative de suicide ébranle
toujours cette dernière.
Les appels urgents
Les réponses correspondent à la question posée, lors des entretiens,
suite au questionnaire : " Qui reçoit les appels urgents en dehors des
heures d’ouverture du service ? ".
Tableau 8 : Appels urgents
APPELS URGENTS |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Permanence de l’UHPA |
7 |
7 |
|
|
|
Service de garde médicale régional |
|
|
7 |
7 |
7 |
Le CTJA bénéficie de la permanence de l’UHPA, étant donné que
cette dernière est ouverte 24h/24h. Le SMP, la PPP et le SPEA bénéficient du service de
garde médicale de la région qui assure les urgences en cas d’appel.
Nous pouvons donc en déduire que si un adolescent nécessite une prise
en charge urgente en dehors des heures d’ouverture du service, il est orienté à
l’hôpital. Cette constatation exige, à mon avis, une préparation du personnel des
urgences à recevoir au mieux l’adolescent.
1.3 Les buts des services
Pour présenter les buts, j’ai tout d’abord posé la question
suivante : " quels sont les buts de votre service ? ". Comme
la question était ouverte, les réponses le furent aussi, de ce fait, j’ai par la
suite interrogé chaque service, à partir du prospectus de présentation du SPEA, lequel
les décrit concrètement.
Tableau 9 : Buts des services
BUTS |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Soins de pédopsychiatrie |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Projets individuels adolescents, familles |
7 |
7 |
|
|
|
Prises en charge individu, et/ou famille |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Dégager hypothèses psycho- dynamiques |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Evaluer contexte familial, psychosocial et scolaire |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Formations professionnelles |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Contenir |
|
7 |
|
|
|
Investigations parents et enfants |
|
|
7 |
7 |
7 |
Guidances conseils parents |
|
|
7 |
7 |
7 |
Consultations pédiatriques sur demande médicale |
|
|
7 |
7 |
7 |
Bilans psychologiques |
|
|
7 |
7 |
7 |
Traitements logopédiques |
|
|
7 |
|
7 |
Consultations grossesse |
|
|
|
7 |
7 |
Tous les services offrent des soins de pédopsychiatrie, des prises en
charge individuelles et/ou familiales, des dégagements des hypothèses psychodynamiques,
des évaluations de contexte familial, psychosocial et scolaire et des formations
professionnelles. Par contre, en ce qui concerne les autres buts des services, deux
groupes se distinguent : le premier est composé du CTJA et de l’UHPA, le
deuxième est composé du SMP, de la PPP et du SPEA.
Le premier groupe n’offre pas de consultation ou de traitement
logopédique. En revanche, il offre la possibilité d’élaborer un projet individuel
et/ou familial pour l’adolescent. Cette mission est très importante, car elle permet
la prise en charge de l’adolescent dans sa globalité, c’est-à-dire son école,
ses activités, ses thérapies, ses loisirs, sa famille, sa santé, etc. En plus,
l’UHPA tente aussi de contenir les adolescents en état de crise, c’est-à-dire
physiquement au travers d’un cadre solide et chimiquement au travers des
médicaments. Ce dernier point montre la spécificité de la prise en charge faite par
l’UHPA.
Le deuxième groupe, quant à lui, est spécialisé pour les
consultations, telles que : des investigations pour parents et enfants confrontés à
des difficultés chez l’enfant, des conseils pour les parents, des consultations en
pédiatrie sur demande médicale et des bilans psychologiques. Il existe aussi les
consultations pendant la grossesse, mais elles concernent uniquement la PPP et le SPEA. En
outre, le SMP et le SPEA offrent des traitements logopédiques.
A la suite de cette lecture, je remarque une similitude au niveau de la
première prestation offerte par les services : tous offrent des soins de
pédopsychiatrie. Par conséquent, les prises en charge proposées par le canton de Vaud
pour pallier aux difficultés rencontrées chez les enfants et les adolescents sont, en
partie, de l’ordre de la thérapie. Cette constatation signifie, lorsque le patient
est suivi en ambulatoire, qu’il vit avec sa famille ou dans un foyer. Si son lieu de
vie est pathogène, la prise en charge thérapeutique risque de ne pas être suffisante
pour venir en aide à l’enfant ou l’adolescent. C’est pourquoi je trouve
important, non seulement d’offrir des soins de pédopsychiatrie, mais
d’impliquer également la famille dans ce processus thérapeutique. Il est vrai que
tous les services travaillent en collaboration avec les familles, cependant cette
collaboration ne doit pas, à mon avis, s’arrêter à quelques minutes de discussion,
mais doit être tout aussi importante que les psychothérapies individuelles vécues par
les enfants et les adolescents.
1.4 Les financements
Voici un tableau mettant en évidence les moyens permettant le
financement des services et des prestations diverses facturées aux clients. Les réponses
correspondent d’une part à la question posée, lors des entretiens suite au
questionnaire : " comment votre service est-il financé ? ",
et d’autre part, à la suite de l’entretien téléphonique avec un agent de
l’AI.
Tableau 10 : Financement
FINANCEMENT |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Financé par Etat de Vaud et Confédération |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Prestations payées par caisse maladie |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Prestations payées par l’AI |
7 |
|
7 |
7 |
7 |
Facturation repas au patient |
7 |
|
|
|
|
Négociations modalités factures adolescents |
|
|
7 |
7 |
7 |
Les cinq services sont financés par l’Etat de Vaud et la
Confédération. Tous les services, sauf l’UHPA, envoient les factures des
prestations aux clients à la caisse maladie ou l’AI qui les prennent en charge. En
ce qui concerne l’UHPA, c’est seulement la caisse maladie qui prend en charge
les prestations, car la durée des traitements n’est pas assez longue. En effet,
l’AI prend en charge uniquement les soins à partir d’une année de traitement
intensif n’ayant pas apporté d’amélioration.
Le SMP, la PPP et le SPEA offrent une certaine souplesse lors de la
facturation des prestations des prises en charge des adolescents qui ne désirent pas
avertir tout de suite leurs parents. Ils négocient les modalités de facturation avec le
client lui-même. Si cette souplesse se retrouve chez ces trois derniers, c’est aussi
parce que l’accessibilité de ces services est facile, alors que pour être admis au
CTJA ou à l’UHPA, une demande ne peut se faire sans indication médicale. En effet,
les adolescents pris en charge par le CTJA ou l’UHPA souffrent de syndromes
psychiatriques qui nécessitent une collaboration rapide avec les parents.
Le CTJA est le seul centre à demander une contribution de Fr. 13.50
pour le repas de midi. En tant que centre de jour, le forfait pour la prise en charge
ambulatoire ne comprend pas les repas, c’est pourquoi les parents se doivent de
participer financièrement. Toutefois, nous ne pouvons pas comparer cet élément avec les
autres services, car, mise à part l’UHPA, ces derniers n’offrent pas la
possibilité de manger. Je ne remets pas en cause cette participation, car si
l’adolescent devait se nourrir dans une cantine scolaire, les parents devraient aussi
débourser. Par contre, je trouve le prix du repas élevé. Ce prix correspond presque au
menu du jour d’un restaurant, alors que dans une cantine scolaire, le prix du menu du
jour est de Fr. 8.--environ.
1.5 Les équipes pluridisciplinaires
Les réponses correspondent à deux demandes du questionnaire :
" combien de collaborateurs êtes-vous ? " et " quelles
sont les professions exercées dans votre établissement ? "
Les renseignements sur le nombre de collaborateurs sont peu
significatifs, car d’une part les personnes travaillent à temps complet ou partiel,
et d’autre part je n’ai pas pu obtenir des chiffres sur le nombre de postes de
travail. Par contre, il est intéressant d’analyser les professions exercées dans
les différents services.
Tableau 11 : Collaborateurs
COLLABORATEURS |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Chef(s) de clinique |
|
1 |
2 |
1 |
1 |
Chef de clinique adjoint |
1 |
|
|
|
1 |
Médecin chef |
1 |
|
|
1 |
1 |
Médecin associé |
1 |
1 |
|
|
1 |
Médecin(s) assistant(s) |
|
1 |
4 |
1 |
2 |
Médecin adjoint |
|
|
1 |
|
|
Psychologue(s) |
2 |
1 |
5 |
1 |
5 |
Psychologue(s) assistant(s) en formation |
|
|
4 |
2 |
|
Psychologue stagiaire |
|
|
|
1 |
|
Infirmier(s), infirmière (s) |
1 |
5 |
|
|
|
Assistant social |
1 |
1 |
|
|
1 |
Educateur(s) |
2 |
1 |
|
|
|
Stagiaire éducateur |
1 |
|
|
|
|
Enseignant(s) spécialisé(s) |
2 |
1 |
|
|
|
... suite |
CTJA |
UHPA |
SMP |
PPP |
SPEA |
Ergothérapeute |
|
1 |
|
|
|
Logopédiste |
|
|
1 |
|
1 |
Secrétaire(s) |
1 |
1 |
3 |
1 |
3 |
Total des collaborateurs |
13 |
14 |
20 |
8 |
16 |
Quatre professions se retrouvent dans chaque service, il s’agit de
chef de clinique, médecins (adjoint, chef, assistant ou associé), psychologue et
secrétaire. Ceci s’explique par le fait qu’une des missions est d’offrir
des soins de pédopsychiatrie. La profession de logopédiste est spécifique au SMP et au
SPEA. Toutes les autres professions telles que : assistant social, éducateur,
enseignant spécialisé, infirmier, etc. sont spécifiques au CTJA et à l’UHPA.
Toutefois, le SPEA compte parmi ses collaborateurs un assistant social comme le CTJA et
l’UHPA. La seule unité qui comporte une ergothérapeute est l’UHPA.
A nouveau, des différences existent entre les deux services
spécifiques aux adolescents (CTJA et UHPA) et les trois autres (SMP, PPP et SPEA). Pour
les deux premiers, accueillir des adolescents pendant une journée et plus, implique une
infrastructure différente. De ce fait, des professionnels tels qu’éducateur,
enseignant spécialisé, assistant social et infirmier sont importants pour le suivi au
quotidien. L’UHPA, de par sa spécificité d’accueillir des adolescents en état
de crise et de les contenir, demande une présence plus importante des infirmiers que dans
les autres services.
Par ailleurs, il est intéressant de noter qu’il n’y a pas de
psychologues au niveau des cadres, il s’agit uniquement de médecins.
1.6 Les fonctionnements des services
Pour présenter les fonctionnements, j’ai tout d’abord posé
la question suivante : " quel est votre système de
communication ? " et " avez-vous des moyens pour évaluer et
mesurer votre travail ? " Comme les réponses ne furent pas assez
précises, j’ai interrogé chaque service à partir du total de toutes les réponses.
Les points abordés lors des entretiens étaient les colloques, le travail en réseau,
l’encadrement des personnes en formation, les supervisions d’équipe, les moyens
d’évaluation et les règlements de base.
Tableau 12 : Fonctionnement
FONCTIONNEMENT |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
|
|
|
|
|
|
COLLOQUE |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
1x/semaine |
7 |
7 |
7 |
7 |
|
2x/semaine |
|
|
|
|
7 |
Points administratifs |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Présentation demandes en cours |
7 |
7 |
|
|
|
Choix admissions |
7 |
7 |
|
|
|
Transmission informations sur patients |
7 |
7 |
|
|
|
Compte rendu entretiens |
7 |
7 |
|
|
|
Réflexions cliniques |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Réflexions théoriques |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Synthèses |
7 |
7 |
7 |
7 |
|
Répartition des demandes |
|
|
7 |
7 |
7 |
Circulation informations écrites |
7 |
7 |
|
7 |
|
Circulation informations orales formelles |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Circulation informations orales informelles |
7 |
7 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
TRAVAIL EN RESEAU |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Thème pour professionnels |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Patient |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
|
|
|
|
|
|
ENCADREMENT PERSONNES EN FORMATION |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Suivi d’un référent (même profession) |
7 |
7 |
|
|
|
Entretiens avec supérieur hiérarchique |
|
|
7 |
7 |
7 |
Séminaires |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Vidéos |
7 |
7 |
|
7 |
7 |
Psychodrames individuels |
7 |
7 |
|
7 |
|
Supervisions |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
|
|
|
|
|
|
SUPERVISION D’EQUIPE |
7 |
7 |
|
7 |
7 |
1x/toutes les deux semaines |
7 |
7 |
|
|
|
Selon demande d’équipe |
|
|
|
7 |
|
2 à 4x/an |
|
|
|
|
7 |
Synthèses |
|
|
|
|
7 |
|
|
|
|
|
|
MOYENS D’EVALUATION |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Supervisions |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Fiches d’évaluation |
7 |
7 |
|
7 |
|
|
|
|
|
|
|
REGLEMENT DE BASE |
7 |
7 |
|
|
|
Le CTJA, l’UHPA, le SMP et la PPP organisent des colloques une
fois par semaine, tandis que le SPEA les organise deux fois par semaine. Ils sont utiles
au fonctionnement de chaque service. Toutefois, des similitudes et des différences
existent au niveau de l’utilisation du colloque. Tous utilisent le colloque
pour : débattre des points administratifs, un espace de réflexions cliniques et
théoriques, la répartition ou présentation des demandes.
Le CTJA et l’UHPA utilisent aussi les colloques pour choisir les
admissions, transmettre aux collègues les informations sur les patients et donner des
comptes rendus des entretiens individuels ou familiaux. Ces derniers points ne sont pas
partagés par le SMP, la PPP et le SPEA, car les prises en charge des patients sont plus
individuelles. Comme les patients du CTJA et de l’UHPA peuvent être pris en charge
par plusieurs personnes, il est important lorsqu’il y une rocade des collaborateurs,
d’informer chacun sur l’évolution des patients. Quant aux synthèses, elles
sont aussi présentées en colloque, mis à part le SPEA, qui les présente lors des
supervisions d’équipe.
En ce qui concerne la circulation des informations, tous utilisent le
colloque pour informer oralement de manière formelle. L’information écrite est
utilisée par le CTJA, l’UHPA et la PPP. Par ailleurs, le CTJA et l’UHPA
informent aussi oralement de manière informelle. Ce dernier point m’incite à faire
un lien avec ma pratique professionnelle. Lorsque le service est un lieu de vie pour les
patients, plusieurs collaborateurs travaillent en même temps, de ce fait,
l’information circule souvent oralement, de manière informelle.
Tous les services travaillent en réseau, soit pour débattre un thème
précis entre professionnels, ou soit pour regrouper les personnes en liaison autour
d’un patient. Cet élément semble important dans la prise en charge des patients. Il
me semble que d’une part l’avis d’autres professionnels est constructif, et
que d’autre part la rencontre de l’entourage du patient permet de découvrir son
réseau relationnel et son système de fonctionnement.
- L’encadrement des personnes en formation
Tous les services offrent un encadrement pour les personnes en
formation au travers des supervisions, des séminaires et du suivi d’un référent de
même profession pour le CTJA et l’UHPA, ou d’un supérieur hiérarchique pour
le SMP, la PPP et le SPEA.
Des moyens de formation peuvent être proposés, tels que des vidéos
et des psychodrames individuels. Le CTJA, l’UHPA et la PPP utilisent ces deux moyens.
Le SPEA utilise principalement les vidéos, tandis que le SMP n’utilise aucun de ces
deux moyens.
- Les supervisions d’équipe
Tous les services, hormis le SMP, organisent des supervisions
d’équipe. Pour le CTJA et l’UHPA, elles ont lieu une fois toutes les deux
semaines. La PPP organise des supervisions d’équipe uniquement sur demande de cette
dernière. En ce qui concerne le SPEA, elles ont lieu deux à quatre fois par an.
En analysant la fréquence des supervisions, je constate que le CTJA et
l’UHPA sont les services qui organisent le plus de supervisions. Est-ce dû à la
gravité des psychopathologies de leurs patients ou à une exigence professionnelle du
SUPEA ?
Tous les services utilisent la supervision comme moyen
d’évaluation. Quant aux fiches d’évaluation, uniquement le CTJA, l’UHPA
et la PPP les utilisent. Nous constatons que chaque service emploie un moyen ou plus dans
la pratique professionnelle.
Les patients sont soumis au règlement de base du CTJA et de
l’UHPA. Il concerne uniquement ces deux services, car ils sont des lieux de vie. De
ce fait, pour le bon fonctionnement du service, chacun est soumis à ce règlement.
2. Les patients
Les points suivants permettent de comparer les patients pris en charge,
leurs troubles et leurs provenances.
2.1 Patients pris en charge
Pour présenter ces populations, j’ai posé les questions
suivantes : " quelle est la tranche d’âge des patients que vous
accueillez ? ", " la clientèle est-elle plus féminine,
masculine ou équivalente pour les deux sexes ? ", " quel est le
total des patients suivis ? " et " combien d’adolescents
avez-vous pris en charge en 1997 ".
Il est difficile de comparer le nombre de patients accueillis chaque
année, car d’une part je n’ai pas reçu de réponses précises, et d’autre
part le CTJA et l’UHPA ont ouvert leurs portes uniquement en juin 1997. Par ailleurs,
je n’ai pas d’information supplémentaire concernant le nombre de patients par
catégorie de psychopathologie. Ce tableau permet uniquement de prendre conscience du
nombre d’enfants et d’adolescents suivis l’année précédente par ces
services.
Tableau 13 : Patients pris en charge
POPULATION |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Age des patients |
13 à 18 ans |
13 à 18 ans |
0 à 18 ans |
0 à 18 ans |
0 à 18 ans |
Patients suivis en 1997 |
16 (juin à décembre) |
35 ( juin à décembre) |
1'000 env. |
560 env. |
550 env. |
Adolescents (13 à 18 ans) suivis en 1997 |
16 |
35 |
250 env. |
90 env. |
90 env. |
A l’adolescence, plus de filles ou de garçons
suivis ? |
filles |
filles |
filles |
filles |
filles |
Le CTJA et l’UHPA accueillent uniquement des adolescents, alors
que le SMP, la PPP et le SPEA accueillent des enfants et des adolescents. Le nombre de
patients pris en charge en 1997 pour une période de six mois, s’élève à 16
adolescents pour le CTJA et 35 adolescents pour l’UHPA. Le SMP a consulté environ
1000 patients en 1997, la PPP environ 560 patients et le SPEA environ 550 patients. Si le
nombre de patients du SMP est élevé, c’est aussi parce que le secteur Nord recouvre
le 48% du canton de Vaud.
En ce qui concerne les adolescents pris en charge en 1997, le SMP
évalue le nombre à environ 250. La PPP et le SPEA comptent avoir pris en charge environ
90 adolescents.
Tous les services affirment qu’à l’adolescence, il y a plus
de filles que de garçons suivis ; ceci semble propre à cette période car pendant
l’enfance, il y a plus de garçons que de filles accompagnés.
2.2 De quels troubles
souffrent-ils ?
Pour présenter les troubles dont souffrent les patients, j’ai
tout d’abord posé la question suivante : " quels sont les motifs de
la prise en charge ? ". Comme les réponses furent incomplètes, j’ai
créé une liste en additionnant toutes les réponses pour interroger chaque service. Les
items sont classés en deux catégories : " les syndromes psychiatriques
aigus " et " les problèmes psychologiques ". Le terme
utilisé pour la première catégorie est emprunté à l’UHPA. Quant à la deuxième
catégorie, je l’ai intitulée "les problèmes psychologiques ",
car pour ma part, et à la suite d’une lecture de divers dictionnaires, je constate
qu’ils sont moins inscrits, que les troubles psychiatriques dans une psychopathologie
sévère. Le signe des croix en gras, met en évidence le type de troubles spécifiquement
pris en charge.
Tableau 14 : Troubles chez les patients
TROUBLES CHEZ LES PATIENTS |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
SYNDROMES PSYCHIATRIQUES AIGUS |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Troubles graves de l’humeur |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Episodes dépressifs majeurs |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Bouffées délirantes |
|
7 |
7 |
7 |
7 |
Décompensations psychotiques |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Tentatives de suicide |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Anorexies mentales |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Etats-limites |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Décompensations névrotiques sévères |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
|
|
|
|
|
|
PROBLEMES PSYCHOLOGIQUES |
7 |
7 |
7 |
7
|
7 |
Troubles psychiques |
7 |
7 |
7 |
7
|
7 |
Troubles du comportement |
7 |
7 |
7 |
7
|
7 |
Problèmes scolaires |
7 |
7 |
7 |
7
|
7 |
Conflits familiaux |
7 |
7 |
7 |
7
|
7 |
Troubles fonctionnels |
7 |
7 |
7 |
7
|
7 |
Tous, excepté le CTJA qui ne prend pas en charge d’adolescent à
bouffées délirantes, traitent les syndromes psychiatriques aigus (troubles graves de
l’humeur, épisodes dépressifs majeurs, bouffées délirantes, décompensations
psychotiques, tentatives de suicide, anorexies mentales, états limites, décompensations
névrotiques sévères) et les problèmes psychologiques (troubles psychiques, du
comportement, scolaires, fonctionnels, conflits familiaux).
Le CTJA a répondu négativement au suivi des adolescents à bouffées
délirantes. Pour l’équipe, il lui semble plus judicieux de les hospitaliser à
l’UHPA.
Je tiens à préciser que le CTJA et l’UHPA sont spécialisés
pour accueillir des adolescents à syndromes psychiatriques aigus. Les situations graves
sont généralement prises en charge par l’UHPA et lorsque la situation est
stabilisée, la personne peut être accueillie au CTJA. Les troubles psychologiques ne
font, peut-être, pas partie des motifs de prise en charge de ces deux derniers, cependant
ils sont souvent présents chez les patients.
En ce qui concerne le SMP, la PPP et le SPEA, les motifs de prises en
charge cités lors de la demande, sont le plus souvent des problèmes psychologiques.
Selon les responsables des services, les adolescents à syndromes psychiatriques aigus
peuvent être pris en charge, seulement si leur demande d’aide est suffisante, que
l’encadrement familial est stable et soutenant.
2.3 Provenance des prises en charge
Pour présenter les provenances des prises en charge, j’ai posé
la question suivante : " qui vous a adressé le patient ? ".
Toutefois, cette liste n’est pas exhaustive. Il n’est pas possible de détailler
toutes les provenances.
Tableau 15 : Provenances des prises en charge
PROVENANCE DES PRISES EN CHARGE |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Médecins traitants |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Hôpitaux |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
SUPEA |
7 |
7 |
|
|
|
UHPA |
7 |
|
|
|
|
SMP |
7 |
7 |
|
|
|
PPP |
7 |
7 |
|
|
|
SPEA |
7 |
7 |
|
|
|
Pédopsychiatrie liaison |
7 |
7 |
|
|
|
DAMPS |
7 |
7 |
|
|
|
CTJA |
|
7 |
|
|
|
Parents |
|
|
7 |
7 |
7 |
Adolescents |
|
|
7 |
7 |
7 |
Psychologues |
|
|
7 |
7 |
7 |
SPJ |
|
|
7 |
7 |
7 |
Pédiatres |
|
|
7 |
7 |
7 |
Enseignants |
|
|
7 |
7 |
7 |
Nous constatons que tous les services accueillent des adolescents
adressés par les médecins traitants ou les hôpitaux. Cet élément met en évidence, à
mon avis, le rôle important des médecins et des hôpitaux qui sont en général les
premiers appelés lorsqu’il y a des problèmes physiologiques ou psychologiques.
Mis à part les deux éléments cités auparavant, la provenance des
demandes n’est pas la même pour tous les services. Je constate deux types de
provenance. Le premier concerne le CTJA et l’UHPA, les demandes sont adressées
après indication médicale. De ce fait, elles proviennent spécialement des milieux
médicalisés tels que : le SMP, le SUPEA, la PPP, le SPEA, la Pédopsychiatrie de
liaison du CHUV, la DAMPS, le CTJA ou l’UHPA.
Le deuxième concerne le SMP, la PPP et le SPEA, les demandes
n’ont pas besoin d’être adressées après indication médicale. Elles peuvent
provenir des parents, des adolescents, des psychologues, du SPJ, des pédiatres, des
enseignants, etc. Une des particularités de ces trois services, est d’offrir la
possibilité aux adolescents d’être pris en charge, même s’ils n’ont pas
encore avertis leurs parents de cette démarche. Cette attitude des professionnels a pour
but de ne pas refuser les demandes.
3. Les prises en charge
Les points suivants permettent de comparer les procédures
d’admission, les propositions de prises en charge depuis l’hôpital, les moyens
de prises en charge, qui sont les psychothérapeutes ?, la durée des traitements,
les approches théoriques et les réseaux de collaboration des service. Ce dernier point
est important, car il nous informe sur des possibilités de soins dans le canton de Vaud.
3.1 Procédures
d’admission des adolescents suicidants
Chaque centre a décrit leur procédure d’admission en quatre ou
cinq points. J’ai rassemblé les réponses et donné un terme précis aux
différentes étapes de l’admission ; je les ai vérifiés auprès des instances
concernées.
Tableau 16 : Procédure d’admission
PROCEDURE |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
|
|
|
|
|
|
POINT 1 |
|
|
|
|
|
Demande après indication médicale |
7 |
7 |
|
|
|
Appel de l’hôpital |
|
|
7 |
7 |
7 |
|
|
|
|
|
|
POINT 2 |
|
|
|
|
|
Demande traitée en colloque |
7 |
7 |
|
|
|
Evaluation à l’hôpital |
|
|
7 |
7 |
7 |
|
|
|
|
|
|
POINT 3 |
|
|
|
|
|
Entretien avec médecin |
7 |
7 |
|
|
|
Proposition prise en charge |
|
|
7 |
7 |
7 |
|
|
|
|
|
|
POINT 4 |
|
|
|
|
|
Prise de décision (collaborateurs, patient, parents |
7 |
|
|
|
|
Accueil au centre |
|
7 |
|
|
|
Décision du médecin |
|
|
7 |
7 |
7 |
|
|
|
|
|
|
POINT 5 |
|
|
|
|
|
Temps d’essai |
7 |
|
|
|
|
Accompagnement ou non par thérapeute venu à
l’hôpital |
|
|
7 |
7 |
7 |
Les procédures d’admission du CTJA et de l’UHPA sont
identiques pour tous les patients. Par contre, les procédures d’admission pour le
SMP, la PPP et le SPEA, ne sont pas semblables pour tous les patients. En effet, la
procédure n’est pas la même s’il s’agit d’un adolescent qui a fait
une tentative de suicide ou si c’est un enfant à problèmes scolaires.
Etant donné que cette recherche est spécifique aux adolescents
suicidants, je vais donc axer ma comparaison sur les procédures d’admission de ces
derniers. Pour le CTJA et l’UHPA, les trois premiers points de la procédure sont
identiques : la demande est faite après indication médicale, cette dernière est
traitée en colloque et ensuite un entretien avec un médecin est planifié. Le quatrième
point pour le CTJA est d’organiser un entretien avec les collaborateurs, le patient
et les parents pour une prise de décision, et par la suite l’accueil du patient pour
un temps d’essai. Quant à l’UHPA, après l’entretien avec le médecin, le
patient est accueilli ou non à l’unité.
Le SMP, la PPP et le SPEA procèdent de la même manière,
c’est-à-dire : un appel est donné par l’hôpital, une évaluation a lieu
sur place, une proposition de prise en charge est faite, le médecin de l’hôpital
prend une décision et finalement un accompagnement ou non par le thérapeute venu à
l’hôpital est organisé.
3.2 Propositions
des prises en charge depuis l’hôpital
Ce point concerne uniquement le SMP, la PPP et le SPEA. Les réponses
correspondent à la question posée, lors des entretiens suite au questionnaire :
" quelles sont les possibilités de prises en charge des adolescents qui ont
fait une tentative de suicide, depuis les soins somatiques offerts à
l’hôpital ? ".
Tableau 17 : Propositions de prises en charge
PROPOSITIONS |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Domicile, suivi par le service |
|
|
7 |
7 |
7 |
Domicile, suivi par un médecin traitant |
|
|
7 |
7 |
7 |
Domicile, suivi par le CTJA |
|
|
7 |
7 |
7 |
Domicile, sans suivi |
|
|
7 |
7 |
7 |
Foyer, suivi par le service |
|
|
7 |
7 |
7 |
Foyer, suivi par un médecin traitant |
|
|
7 |
7 |
7 |
Foyer, suivi par le CTJA |
|
|
7 |
7 |
7 |
Foyer sans suivi |
|
|
7 |
7 |
7 |
UHPA |
|
|
7 |
7 |
7 |
Hôpital psychiatrique (région) |
|
|
7 |
7 |
7 |
Les mesures proposées par ces trois services sont identiques,
c’est-à-dire : un retour au domicile, dans un foyer, à l’UHPA ou encore
à l’hôpital psychiatrique de la région. Pour les deux premières propositions,
l’adolescent peut être suivi ou non par un médecin traitant, une personne du
service ou pris en charge par le CTJA. Le CTJA et l’UHPA ne sont pas mandatés pour
proposer à l’hôpital des prises en charge, par contre ils peuvent être sollicités
à la suite de l’hospitalisation, comme cité ci-dessus.
3.3 Moyens de prises en charge
Pour présenter les moyens des différents services, j’ai tout d’abord posé
la question suivante :
" quels outils professionnels ou moyens d’intervention
utilisez-vous dans la prise en charge de vos patients ? ". Comme les
réponses ne furent pas assez précises, j’ai interrogé, à nouveau, chaque service
à partir du total de toutes les réponses.
Tableau 18 : Moyens de prises en charge
MOYENS DE PRISES EN CHARGE |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Projets de soins (entretiens individuels, familiaux |
7 |
7 |
|
|
|
Entretiens de famille |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Psychothérapie individuelle |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Support médicamenteux |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Réunions entre patients et soignants |
7 |
7 |
|
|
|
Psychodrames de groupe |
7 |
|
|
7 |
|
Activités manuelles, socioculturelles |
7 |
7 |
|
|
|
Evaluations pédagogiques et scolaires |
7 |
7 |
|
|
|
Bilans socio-familiaux |
7 |
7 |
|
|
|
Sports |
|
7 |
|
|
|
Jeux ou loisirs |
|
7 |
|
|
|
Psychodrames individuels |
|
|
|
7 |
|
Tous les services utilisent comme moyen de prise en charge les
entretiens de famille, une psychothérapie individuelle et un support médicamenteux. Pour
le SMP et la SPEA, ces trois moyens sont les seuls utilisés. Quant à la PPP, elle
utilise aussi les psychodrames individuels et de groupe.
En ce qui concerne le CTJA et l’UHPA, les moyens utilisés sont
plus nombreux. Tous les deux organisent des activités manuelles et socioculturelles, des
bilans socio-familiaux, des projets de soins, des évaluations pédagogiques et scolaires,
et des réunions entre patients et soignants. Il existe tout de même quelques
spécificités : le CTJA organise des psychodrames de groupe et l’UHPA des jeux,
des loisirs et des activités sportives.
La comparaison de ces données met en évidence le nombre plus élevé
des moyens dans les services accueillant des adolescents sur une journée. Il est vrai que
les patients accueillis par le CTJA et l’UHPA sont dans un état plus grave que les
autres. Je constate aussi qu’il existe un lien entre les moyens utilisés et les
professions des collaborateurs. En l’occurrence, le CTJA et l’UHPA disposent
d’éducateurs, d’enseignants spécialisés, d’ergothérapeutes et
d’infirmiers que l’on ne retrouvent pas dans les autres services.
3.4 Qui sont les
psychothérapeutes ?
Les réponses correspondent à la question posée, lors des entretiens, suite au
questionnaire :
" qui sont les psychothérapeutes ? ".
Tableau 19 : Les psychothérapeutes
PSYCHOTHERAPEUTES |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Médecins |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Psychologues |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Chaque service fonctionne de la même manière ; toutes les
psychothérapies sont prises en charge soit par les médecins, soit par les psychologues.
3.5 Durée des traitements
Les réponses correspondent à la question posée, lors des entretiens,
suite au questionnaire :
" quelle est la durée des traitements ? ". Je
n’ai pas pu récolter des informations précises quant au nombre d’adolescents
et la durée de leur prise en charge. Les données suivantes nous informent uniquement sur
la moyenne des durées de traitement.
Tableau 20 : Durée des traitements
DUREE TRAITEMENT |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Une année (en moyenne) |
7 |
|
|
|
|
2 semaines à 6 mois |
|
7 |
|
|
|
une consultation à plusieurs années |
|
|
7 |
7 |
7 |
La durée moyenne des traitements est évaluée à une année pour le
CTJA, de 2 semaines à 6 mois pour l’UHPA et d’une consultation à plusieurs
années pour le SMP, la PPP et le SPEA.
Ces renseignements sont représentatifs des missions de chaque service.
En ce qui concerne le CTJA, l’élaboration d’un projet individuel pour chaque
adolescent, nécessite une prise en charge claire en objectifs et en durée. L’UHPA,
de par sa spécificité d’accueillir des adolescents en état de crise, demande un
laps de temps restreint. Quant au SMP, à la PPP et au SPEA, de par leur large spectre de
prestations, touchent une population plus grande. De ce fait, la durée des prises en
charge est très variable.
3.6 Les approches théoriques
Les réponses correspondent à une demande du questionnaire : " est-ce
que votre service a un référentiel théorique pour prendre en charge les
patients ? ".
Tableau 21 : Approches théoriques
APPROCHES THEORIQUES |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Psychodynamique, psychanalyse |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Systémique |
7 |
7 |
7 |
|
7 |
Nous constatons que tous les services utilisent le référentiel
théorique psychodynamique. En outre, tous, sauf la PPP, disposent de collaborateurs qui
ont suivi des cours de systémique. Ces informations mettent en évidence la centration
sur le vécu subjectif dans la compréhension et l’accompagnement des patients. La
systémique est aussi utilisée, mais n’est pas citée en premier lieu.
3.7 Les réseaux de
collaboration des services
Les réponses correspondent à la question posée, lors des entretiens,
suite au questionnaire : " quel est votre réseau de
collaboration ? ". Comme les réponses ne furent pas précises, j’ai
interrogé, à nouveau, chaque service à partir du total de toutes les réponses. Je
tiens à préciser que cette liste n’est pas exhaustive, mais donne tout de même une
idée des nombreuses collaborations de chaque service.
Tableau 22 : Les réseaux de collaboration
RESEAUX COLLABORATION |
CTJA LAUSANNE |
UHPA LAUSANNE |
SMP YVERDON |
PPP VEVEY |
SPEA NYON |
Pédopsychiatrie liaison |
7 |
7 |
|
|
|
DAMPS |
7 |
7 |
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SUPEA |
7 |
7 |
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Hôpitaux |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Secteur privé professions médicales et sociales |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
SPJ |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
UMSA |
7 |
7 |
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AEMO |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Institutions spécialisées |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Ecoles |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Gymnases |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
SES |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Tribunal des mineurs |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Entourage du patient |
7 |
7 |
7 |
7 |
7 |
Sociétés sportives, musicales, artistiques |
7 |
7 |
|
|
|
SEI |
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|
7 |
7 |
7 |
Infirmières santé publique |
|
|
7 |
7 |
7 |
De nombreuses relations avec l’extérieur sont similaires pour
tous les services, il s’agit : de l’AEMO, des écoles, des gymnases, des
hôpitaux, des institutions spécialisées accueillant des enfants et des adolescents,
l’entourage des patients, le secteur privé des professions médicales et sociales,
le SES, le SPJ et le tribunal des mineurs.
Par ailleurs, d’autres relations sont spécifiques à certains
services. Par exemple, pour le CTJA et l’UHPA, une collaboration existe avec la
DAMPS, la Pédopsychiatrie de liaison du CHUV, les sociétés sportives, musicales et
artistiques, le SUPEA, le tribunal des mineurs et l’UMSA. Les relations avec certains
départements du CHUV existent de par leur situation géographique. En ce qui concerne les
différentes sociétés et le tribunal des mineurs, c’est dû à leur type de prises
en charge. Pour le SMP, la PPP et le SPEA, une collaboration spécifique existe avec les
infirmières de la santé publique et le SEI. Ces relations illustrent le travail
d’investigation fait pour les enfants confrontés à des difficultés.
Conclusion
Tous les services sont des centres publics. Il existe uniquement deux
structures créées spécifiquement pour la prise en charge des adolescents du canton de
Vaud : le CTJA et l’UHPA. Le SMP, la PPP et le SPEA sont des lieux de
consultation pour enfants et adolescents.
Les professions médicales et sociales telles que : infirmier,
assistant social, éducateur, enseignant spécialisé et ergothérapeute sont exercées
spécifiquement au CTJA et à l’UHPA. Nous pouvons donc faire une corrélation entre
le nombre de professions et de prestations offertes par ces deux services.
Comme chaque service offre des soins de pédopsychiatrie, un grand
nombre de médecins et psychologues font partie des équipes pluridisciplinaires.
L’étude de ces services met en évidence le support psychothérapeutique pour la
prise en charge des enfants et adolescents en difficultés psychologiques et
psychiatriques.
Tous les services utilisent l’approche psychodynamique afin de
comprendre la personne et agir au niveau des forces inconscientes. La systémique est
aussi utilisée pour comprendre les situations, mais elle me semble moins importante. Or,
je trouve, qu’un travail effectué avec la famille doit faire partie intégrante de
la prise en charge du patient. Suite à mon expérience professionnelle et aux dires des
personnes rencontrées, les troubles psychologiques peuvent aussi être des symptômes des
problèmes familiaux. Je ne peux dire exactement quel est le travail effectué en
collaboration avec les familles, cependant nous devrions encore plus développer ces
liens.
A la suite de cette étude comparative, je prends conscience qu’il
existe uniquement sept lits disponibles dans le canton de Vaud pour accueillir des
adolescents en état de crise ; il s’agit de l’UHPA. Cette disponibilité
me paraît plutôt faible. Si je me permets ce commentaire, c’est à la suite
d’un entretien avec une des responsables de l’Unité de crise pour adolescents
et jeunes adultes à Genève, et des expériences du Centre Abadie à Bordeaux. En ce qui
concerne les adolescents à comportements suicidaires ou en état de crise, il serait
judicieux de leur offrir un temps de transition pour faire le point de la situation ;
ceci permettrait aussi de ne pas banaliser le passage à l’acte et d’aider le
jeune à accéder aux soins. Comme le dit une des responsables de l’Unité de crise
pour adolescents et jeunes adultes à Genève, un adolescent sur dix suit réellement une
psychothérapie à la sortie de l’hôpital. Il faut donc trouver d’autres moyens
pour l’encourager à accepter de l’aide.
Pour conclure, je dirais que cette étude permet de connaître,
d’une part les services psychiatriques du canton de Vaud prenant en charge des
enfants et des adolescents, et d’autre part les différentes prestations offertes par
chacun d’eux. A la suite de cette étude, nous sommes donc en mesure de savoir où
s’adresser en cas de difficultés et quels sont les moyens utilisés pour traiter les
patients. La deuxième partie de ce travail de recherche est théorique. Elle est
introduite par un chapitre sur les différents référentiels théoriques sur le suicide
et les tentatives de suicide.
3
___________________________
Le suicide
Introduction
Il n’existe pas une définition universelle du suicide. De même,
le sens de cet acte violent diffère d’une personne à l’autre. Le but de ce
chapitre est d’introduire les termes de suicide et tentative de suicide. Les auteurs
choisis abordent ces phénomènes selon différents référentiels théoriques
sociologique, psychologique, psychiatrique et psychanalytique.
Ce chapitre parle du suicide en général. C’est pourquoi les
théories présentées sont succinctes, elles offrent toutefois une palette des idées qui
ont traversé notre siècle. Les chapitres suivants traitent du suicide et des tentatives
de suicide à l’adolescence.
1. Genèse du
suicide et définitions des termes spécifiques
Je trouve important de mentionner l’origine du mot suicide et les
différents termes spécifiques utilisés dans ce mémoire, afin de comprendre leur
signification.
- Genèse du mot " suicide "
Le mot " suicide " est né au 17ème
siècle, en Angleterre, afin de simplifier l’expression et l’explication
d’un même phénomène, c’est-à-dire se donner la mort. Le mot suicide voit le
jour sous sa forme latine dans le livre de l’Anglais Sir Thomas Browne, Religio
medici, publié en 1642.
C’est en 1734 que ce terme apparaît dans la langue
française ; il est introduit par l’Abbé Prévost qui séjourna en Angleterre.
Si on dit " il se suicide " et non " il suicide ",
c’est parce que ce terme signifie bien un crime contre soi-même. En Angleterre, le
médecin George Cheyne explique le suicide comme une maladie anglaise. Georges Minois
cite : " C’est essentiellement, semble-t-il, l’effet de la
conjonction des progrès statistiques, de l’évolution socio-culturelle de
l’aristocratie, du climat d’intense rivalité religieuse et de l’essor de
la presse, dans une atmosphère générale de crise des valeurs traditionnelles pour la
seconde fois en un siècle ".
- Définitions
- L’étymologie du mot suicide est issue " du latin sui, " de
soi ", et caedere, " tuer " ". Une définition
simple peut en découler, le suicide est une : " Agression contre
soi-même consciente et volontaire, entraînant la mort ". Plusieurs nuances
existent dans l’emploi des termes utilisés pour spécifier l’auteur de
l’acte suicide. Voici quelques définitions succinctes des mots couramment utilisés
dans cette recherche, je les ai empruntées à P.-B. Schneider, psychanalyste :
Le suicide : l’acte qui a réussi
La tentative de suicide : l’acte qui a échoué
Les suicidés : ceux dont le geste a été mortel
Les suicidants : ceux qui ont fait une tentative et qui ont
survécu à leur geste autodestructeur
Les suicidaires : ceux pour qui le risque de recours au
suicide existe
Le comportement et la
conduite suicidaire : concerne aussi bien les idées
suicidaires, la tentative que le suicide
2. Différents référentiels
théoriques
Les quatre référentiels théoriques mentionnés sont sociologique,
psychologique, psychiatrique et psychanalytique. Je les ai choisis, car les ouvrages sur
le suicide sont souvent rédigés soit par les sociologues, les psychologues ou soit les
psychiatres. Il faut, toutefois, nuancer les propos retranscrits ; ils offrent
uniquement une vision d’ensemble des différents référentiels.
2.1 Référentiel théorique
sociologique
J’ai choisi E. Durkheim pour présenter les thèses sociologiques
sur le suicide, car il est le premier sociologue français à étudier le suicide en tant
que phénomène de société, en expliquant le lien entre le suicide et
l’intégration de la personne dans la société.
Durkheim définit le suicide ainsi : " Le suicide
est, avant tout, l’acte de désespoir d’un homme qui ne tient plus à vivre[...]
Ce qui est commun à toutes les formes possibles de ce renoncement suprême, c’est
que l’acte qui le consacre est accompli en connaissance de cause ; c’est
que la victime, au moment d’agir, sait ce qui doit résulter de sa conduite, quelque
raison d’ailleurs qui l’ait amenée à se conduire ainsi.[...] On appelle
suicide tout cas de mort qui résulte directement ou indirectement d’un acte positif
ou négatif, accompli par la victime elle-même et qu’elle savait devoir produire ce
résultat ". Toutefois, cette définition exclut toutes les personnes qui se
suicident sans connaissance de cause.
Pour lui, le taux de suicide ne s’explique que sociologiquement.
Lorsque l’individu est trop dépendant ou au contraire, indépendant de la société,
ceci peut provoquer des troubles psychologiques. Et en ce qui concerne les causes privées
de la personne, souvent citées en premier, elles sont l’écho de l’état moral
de la société. Il cite : " C’est la constitution morale de la
société qui fixe à chaque instant le contingent des morts volontaires. [...] Les
mouvements que le patient accomplit et qui, au premier abord, paraissent n’exprimer
que son tempérament personnel, sont, en réalité, la suite et le prolongement d’un
état social qu’ils manifestent extérieurement ".
Suite à ces affirmations, E. Durkheim met l’accent sur trois
catégories de suicides liés à l’intégration : le suicide égoïste, le
suicide altruiste et le suicide anomique.
- Suicide égoïste : il provient d’une intégration insuffisante de la
personne dans un groupe social. La vie n’est pas forcément douloureuse pour cette
personne-là, mais elle est vide, inintéressante. L’individu est seul, il n’a
ni but, ni raison de vivre. Pourtant, l’être humain a besoin de donner un sens à
son existence. L’individualisme peut créer le penchant qui pousse les hommes à se
tuer, car la personne ne vit que pour elle et n’obéit qu’à elle-même.
- Le caractère fondamental de cette personne est l’apathie, elle paraît sans
volonté et sans énergie. Elle peut souffrir d’un état de mélancolie paresseuse
avec une complaisance pour elle-même. Parfois un sang-froid désabusé du sceptique
apparaît, c’est-à-dire qu’elle montre une certaine indifférence même par
rapport au scepticisme.
- Suicide altruiste : par rapport au caractère du suicide précédent, le
suicide altruiste a une individuation très faible, cet acte résulte d’un altruisme
intense. C’est-à-dire que la société tient l’individu sous sa dépendance et
la personnalité individuelle compte pour peu de chose. Le terme altruisme exprime le fait
que le moi de la personne se confond avec autre chose que lui-même. Si le droit de vivre
de ce dernier, ainsi que sa place minime dans le groupe ne sont pas reconnus, il peut
être totalement absorbé par la société.
- Une énergie passionnelle ou volontaire transcrit le caractère fondamental de cette
personne. Il peut être accompagné d’un sentiment calme du devoir, d’un
enthousiasme mystique et/ou d’un courage paisible.
- Suicide anomique : anomie veut dire " sans norme ".
Pour E. Durkheim, les désordres de réglementation dans la société sont les plus fortes
causes de suicide. L’individu doit avoir, pour son bonheur et son existence même,
des besoins à la mesure de ses moyens, lesquels sont contrôlés par la société.
- En déterminant ses besoins, la personne suicidaire ouvre la porte aux illusions et
aussi aux déceptions. Elle peut se retrouver au-dessous de la condition à laquelle elle
était habituée. Elle sent lui échapper la situation dont elle se croyait maître. Elle
va donc s’irriter contre la cause réelle ou imaginaire. Si elle se reconnaît comme
responsable de la catastrophe, elle s’en voudra. C’est toujours dans un accès
de colère que le sujet se frappe. Par exemple, la société actuelle laisse peu de place
à l’échec, et les exigences à l’égard des employés sont considérables.
- Le licenciement ou le chômage peuvent toucher profondément les personnes dont la
réussite professionnelle est le but suprême. En plus, dans certains pays comme la
Suisse, le travail est très valorisé. Le caractère fondamental de cette personne est
l’irritation, le dégoût et la récrimination violente.
- Suite à ces trois types de suicide, E. Durkheim définit des types mixtes,
c’est-à-dire les personnes dont les composantes du suicide sont de deux types :
tels que le suicide ego-anomique, anomique-altruiste et ego-altruiste. Les caractères de
ces personnes de types mixtes sont un mélange des deux types les composants. Un tableau
illustrant la classification étiologique et morphologique des types sociaux du suicide
est annexé à ce document (cf. annexe 5).
2.2 Référentiel théorique
psychologique
En parcourant plusieurs dictionnaires, je peux définir la psychologie
comme la science du comportement des organismes. Elle a pour but de découvrir
l’intention derrière l’acte, et derrière l’intention, le mobile.
Dans le grand dictionnaire de la psychologie, le suicide est expliqué
comme un acte rationnel ou pathologique : " Le suicide est soit un acte
rationnel, exécuté en fonction de considérations morales, sociales, religieuses,
philosophiques ou personnelles, soit au contraire un acte pathologique survenant alors au
cours de l’évolution de diverses affections mentales (dépression, délire
chronique, démence, confusion, etc.) ou d’une crise existentielle aiguë sous forme
d’un raptus anxieux autoagressif, raptus très différent du suicide prémédité de
certains mélancoliques ou délirants ". Le terme raptus indique un
comportement brusque et irrésistible permettant une décharge.
2.3 Référentiel théorique
psychiatrique
Pour la psychiatrie, le suicide est le symptôme d’une maladie.
Dans Précis pratique de psychiatrie : " Le suicide est de tous les
comportements le plus important de la symptomatologie dépressive. ". Ce
commentaire souligne le sérieux d’un acte pathologique dans la compréhension du
suicide.
De ce fait, le suicide, réussi ou manqué, dénote une maladie que le
psychiatre tentera de découvrir et de soigner. Le suicide chez les jeunes :
" se caractérise par une conduite dont le déroulement entraîne ou peut
entraîner la mort, et dont l’explication psychodynamique ne dépend pas de la
réussite ou non-réussite, mais de la perspective du sujet qui commet cet acte ".
2.4 Référentiel théorique
psychanalytique
Le terme psychanalyse est inventé par S. Freud en 1896. Ce terme nomme
une méthode de psychothérapie fondée sur l’exploration de l’inconscient avec
l’aide des citations du patient et des interprétations du psychanalyste. S. Freud
étant l’inventeur de la psychanalyse, j’ai choisi d’expliquer ce point de
vue à partir de ses recherches sur le suicide.
Pour la psychanalyse, la force qui pousse le sujet à se détruire est
soit une attaque dirigée sur un objet introjecté ou soit un rejeton de l’instinct
de mort par le biais de l’introjection. Le suicide est une forme d’homicide.
Personne ne peut trouver l’énergie nécessaire pour se donner la mort, s’il ne
tuait pas en même temps un objet avec lequel il s’était identifié. Le désir de
mort est premièrement dirigé contre autrui, mais se tourne contre le sujet lui-même.
C’est le désir de mourir, d’être tué et de tuer l’autre.
Une des interprétations de ce désir de mort est formulé par S. Freud
de la manière suivante : " La voie est barrée vers la régression
totale ; de ce fait, ne pouvant plus aller qu’en avant, la pulsion de mort se
trouve engagée dans sa manifestation : celle d’un
" retour " à l’état inorganique ".
Conclusion
Dans ce chapitre, les thèses sociologiques sont plus développées que
les thèses psychologiques, psychiatriques et psychanalytiques. Ces dernières sont
reprises dans les chapitres suivants sur le suicide et les tentatives de suicide à
l’adolescence.
Le point de vue sociologique souligne la relation pathologique du sujet
avec la société lors d’un suicide. Le point de vue psychologique, quant à lui, met
l’accent sur l’acte suicidaire rationnel ou pathologique ; il est lié aux
considérations morales, sociales, religieuses ou philosophiques, soit lié à une
affection mentale.
Le point de vue psychiatrique considère l’acte plus comme le
symptôme d’une pathologie. L’explication de la conduite suicidaire est en
corrélation avec une affection du système nerveux. Néanmoins, les psychiatres tiennent
aussi compte de l’histoire du patient. Le point de vue psychanalytique, quant à lui,
envisage le suicide comme un homicide, où l’agression normalement dirigée contre
autrui est dirigée contre l’acteur.
Ces constatations me permettent d’entrevoir un point commun entre
les différentes thèses, celui du désir chez les personnes à comportement suicidaire de
mettre fin à leurs jours. Hormis ce dernier point, il existe des divergences entre
certaines thèses. Pour E. Durkheim, le suicide ne peut être expliqué que
sociologiquement, car ce sont les causes sociales qui ont agi sur l’individu. Quant
aux autres points de vue, ils reconnaissent tous, chez les personnes à comportement
suicidaire, des troubles pathologiques liés à l’individu. En guise de conclusion,
je peux dire que la définition du suicide n’est pas universelle et que les
interprétations de l’acte suicidaire diffèrent selon les auteurs et leur
référentiel théorique. Le chapitre suivant rappelle quelques aspects du développement
de l’adolescent afin de comprendre au mieux les conduites suicidaires à cette
période de la vie.
4
_______________________________
L’adolescence
Introduction
Cette recherche est ciblée sur une population spécifique, les
adolescents. C’est pourquoi, dans ce chapitre je me suis attachée à développer
cette période de la vie. Ce rappel traite les définitions de l’adolescence, le
développement pubertaire, le développement psychologique et l’autonomie.
1. Définitions
Le terme adolescence vient du latin " adolescere "
daté de la fin du 13ème siècle, qui signifie grandir. L’adolescence implique
plusieurs éléments, tels que la croissance, la transformation, l’évolution et la
mouvance. Ce terme adolescence est souvent utilisé comme synonyme de puberté. Il existe
tout de même une nuance entre ces deux termes. La puberté représente l’ensemble
des maturations physiques et psychiques amenant l’enfant à l’état adulte,
tandis que l’adolescence est plus une période dans laquelle le jeune se transforme
sur le plan affectif et comportemental, pour devenir un adulte avec une identité et un
rôle sexuels .
En ce qui concerne le début et la fin de l’adolescence, il est
difficile de déterminer un âge, cela diffère d’une personne à l’autre :
certains sont précoces et d’autres se développent plus tardivement. Par exemple,
pour D. Marcelli, médecin psychiatre, le début de l’adolescence correspond au
départ de la puberté, entre dix et douze ans chez la fille et entre douze et quatorze
ans chez le garçon. Il estime la durée de cette période à une dizaine d’années,
voir plus.
En Suisse, la majorité est fixée à 18 ans sur le plan juridique.
Cependant, ce propos est bien aléatoire car d’après L. Not, F. Dolto, S. Freud, E.
Erickson et d’autres auteurs, l’adolescence ne s’arrête pas à 18 ans. Si
je donne cette information, c’est parce que la politique sociale en Suisse considère
les adolescents de 18 ans comme des adultes. Leur prise en charge se voit modifiée dès
cet âge, alors qu’ils ont encore besoin d’un accompagnement adapté à leur
statut d’adolescent et non d’adulte.
2. Le développement pubertaire
La puberté dure environ cinq à six ans, toutefois les variations
peuvent être grandes d’une personne à l’autre. Plusieurs indicateurs marquent
la puberté, ils sont expliqués en quatre points par G. Theintz :
- Les modifications hormonales sont les premiers signes déclenchant la puberté. Le
programme de maturation a débuté in utero ; pendant l’enfance le système
s’arrête et plus tard, à l’âge pubertaire, il y a la réactivation de
l’axe hypothalamo-hypophyso-gonadique. Les testicules et les ovaires deviennent
sensibles aux gonadotrophines et la production de stéroïdes sexuels (hormones
sécrétées par les glandes endocrines) augmente, ce qui permet les modifications
pubertaires.
- Le processus de maturation du système génital, c’est-à-dire la croissance
des organes génitaux chez l’homme et chez la femme.
- Le développement des caractères sexuels secondaires se traduit chez le garçon par
l’apparition des poils, la voix qui mue, etc. Chez la fille, il y a l’apparition
des poils, le développement des seins et l’apparition des premiers cycles.
- La croissance de la taille est de 22 à 24 cm chez le garçon pendant la puberté.
Le moment où il grandit le plus est situé vers 14-15 ans, plus tardivement que la fille
dont la période est située vers 12-13 ans. Chez la fille, il y a aussi
l’élargissement du bassin et une augmentation plus grande de la graisse que des
muscles, phénomène inversé chez les garçons.
L’apparition du processus pubertaire est propre à chaque
individu. Toutefois, le développement peut être influencé par plusieurs facteurs, tels
que l’alimentation, les conditions climatiques, le milieu de vie de la personne, etc.
Par exemple, des carences alimentaires telles que les vitamines, les protéines, le
calcium, le magnésium perturbent le développement physique et psychique de
l’adolescent. Par ailleurs, le milieu de vie de la personne et/ou une famille
pathologique peuvent provoquer un arrêt de la croissance physique et/ou des troubles
psychologiques.
D. Marcelli nous rend attentifs sur le double enjeu psychique suscité
par la transformation pubertaire. Les nécessités pour l’adolescent sont, d’une
part de maintenir un sentiment de continuité d’existence dans un corps en
changement, et d’autre part d’intégrer cette transformation pubertaire dans le
fonctionnement psychique. Ce désir de continuité entraîne des interrogations et des
inquiétudes sur son corps en changement et sur son identité. Ce corps en mutation
entraîne des interrogations sur sa beauté, son poids, ses difformités, ses désirs,
etc.
Je constate que certaines différences physiologiques peuvent devenir
source de souffrance si l’adolescent peine à les accepter.
3. Le développement psychologique
Le développement, comme son nom l’indique, s’applique sur
une longue durée. Les quatre éléments en interaction sont les facteurs physiologiques,
cognitifs, affectifs et sociaux. Ce chapitre cite uniquement les trois derniers ; les
facteurs physiologiques sont développés précédemment. Un grand nombre de théoriciens
tels que J. Piaget, S. Freud, E. Erickson,
H. Wallon, etc. ont étudié le développement de l’enfant et de l’adolescent.
C’est pourquoi, ce chapitre n’explique pas les étapes et stades du
développement cités par chaque auteur, mais synthétise uniquement quelques éléments.
- Développement cognitif
- Le développement cognitif, étudié par J. Piaget, explique l’évolution des
capacités intellectuelles. La dernière phase de construction des opérations de
l’intelligence se situe vers 14-15 ans. L’adolescent peut non seulement
raisonner à partir de représentations immédiates, mais il peut aussi émettre des
hypothèses orientées vers l’avenir. " Le sujet parvient à se dégager
du concret et à situer le réel dans un ensemble de transformations
possibles ". Le développement cognitif, sous l’angle
d’acquisition d’une capacité d’intellectualisation, permet de faire tampon
contre l’angoisse instinctuelle.
- Développement affectif
- Selon S. Freud, la personnalité se construit progressivement au cours du développement
et sera définitivement constituée après l’adolescence. La personnalité se
définit par sa structure composées de trois instances : le Ca, le Moi
et le Surmoi. Le Ca est l’instance primitive, inconsciente, il est
présent à la naissance et agit en fonction du plaisir, sans tenir compte de ce qui se
passe extérieurement. Le Moi émerge petit à petit quand l’enfant apprend à
tenir compte des exigences de la réalité, c’est-à-dire que l’enfant a des
désirs, mais il ne peut les assouvir tout de suite, il obéit au principe de réalité.
Le Surmoi est l’instance qui juge si l’action est bonne ou mauvaise.
Grâce à l’intégration des normes parentales et sociales, l’enfant peut par la
suite lui-même gérer ses conduites.
- A l’adolescence, les conflits oedipiens sont réactivés. L’adolescent rejette
et dépasse les fantasmes incestueux qui réapparaissent. Ce processus entraîne le deuil
de l’enfance et l’acceptation des changements s’opérant à cette période.
L’adolescent renonce aux objets infantiles pour de nouveaux choix d’objet.
La résolution de la situation oedipienne va influencer la réorganisation de sa
personnalité, sa relation avec autrui et ses choix d’un conjoint. " C’est
donc à l’affectivité de l’adolescent qu’il incombe de réunir ce moi
dispersé ".
- Développement social
- Hormis la famille, les groupes de pairs favorisent aussi le développement social et
affectif de l’adolescent. Ils permettent l’identification des membres entre eux,
le relais des idéaux du moi, la protection contre un extérieur menaçant, etc.
L’amitié est très importante pendant cette période. C’est un moment où la
relation avec ses parents et sa famille changent. Il est donc important pour
l’adolescent d’avoir un autre lieu pour parler, partager ses difficultés.
" La véritable amitié donne la force de s’aventurer, de penser loin,
de s’engager ".
- Les relations entre parents et adolescents peuvent devenir conflictuelles, à cet âge.
Or, si les possibilités de communiquer entre les membres de la famille sont moindres,
l’adolescent tentera de combler cette insatisfaction à l’extérieur du contexte
familial. Cependant, l’adolescent reste fragile et peut se trouver dans un nouveau
réseau social menaçant. Ce réseau social peut être comparé au congre, présenté par
F. Dolto. Cet animal est prêt à dévorer le homard qui vient de perdre sa nouvelle
carapace et reste sans défense le temps d’en fabriquer une nouvelle. Cette période
sans défense correspond à l’adolescence pendant laquelle des menaces de
l’intérieur ou de l’extérieur peuvent devenir dangereuses.
- Un autre élément peut aussi entraver le développement social de l’adolescent,
c’est la responsabilité d’un parent malade ou veuf. Selon D. Brittain et S.
Becker, les tâches peuvent obliger l’enfant à rester à la maison et ainsi le
limiter dans ses relations amicales et sociales.
- L’adolescent prend conscience que le monde qui l’entoure ne s’arrête pas
à sa famille. En sortant du cercle familial, il perçoit progressivement les enjeux de la
société, du monde politique, professionnel et écologique, etc. Cette ouverture sur
l’extérieur peut être source d’ambitions mais aussi de déceptions.
" Grandir, c’est découvrir que tous les humains sont faits du pire
comme du meilleur, et ce n’est pas facile ".
-
4. L’autonomie
L’adolescence est un remaniement de la personnalité centré
spécialement sur la quête d’autonomie, ce projet de soi. Dans le Petit Larousse,
autonomie signifie : " indépendance, possibilité de décider pour un
organisme, pour un individu, par rapport à un pouvoir central, à une hiérarchie, une
autorité ".
L’autonomie est un enjeu important à l’adolescence, elle
fait appel au besoin de l’adolescent de se séparer de ses parents. D. Marcelli
explique ce besoin : " A travers le besoin de se séparer,
l’adolescent est à la recherche/conquête de ses " limites "
aussi bien au plan de son corps propre (limite dans ses besoins physiologiques :
alimentation, besoin de se vêtir... limites dans son style d’habillement, dans ses
performances physiques), de ses compétences intellectuelles, que dans le domaine du lien
social (un des modèles les plus typiques de cette recherche de limites par rapport aux
interdits parentaux étant l’heure de sortie ou de rentrée d’une soirée) ".
Le processus d’autonomie se vit parallèlement au processus
d’individuation (individu dont la personnalité se différencie), car si
l’individuation se passe mal l’autonomie en sera affectée. Les parents jouent
un rôle important dans le processus de séparation-individuation de l’adolescent
pour qui la séparation peut être angoissante. Le processus de séparation-individuation
définit par P. Blos, met en conflit la difficulté des parents à renoncer en partie à
leur fonction d’autorité et la difficulté de l’adolescent à s’en
détacher. Les parents comme l’adolescent doivent accepter les changements.
Conclusion
Ce chapitre permet un survol des modifications et des enjeux à
l’adolescence, ce moment charnière dans la vie d’un être humain.
L’adolescence est une période dans laquelle le jeune se transforme sur le plan
affectif et comportemental pour devenir un adulte avec une identité et un rôle sexuels.
La puberté est l’ensemble de maturation physique et psychique; caractérisée par le
déclenchement hormonal, la maturation des systèmes génitaux, le développement des
caractères sexuels, la croissance et la taille.
L’adolescent se développe non seulement sur le plan
physiologique, mais aussi sur le plan psychologique pour tendre vers l’organisation
définitive de sa personnalité. Le développement psychologique croît par le biais du
développement physique, cognitif, affectif et social. Une articulation existe entre
chaque facteur du développement.
Nous l’avons vu, les modifications à l’adolescence peuvent
aussi engendrer des épreuves. C’est pourquoi, le rôle des parents est très
important pour le soutenir dans cette évolution.
Pour conclure, chaque adolescent vit ces changements d’une
manière personnelle. Les épreuves ne sont pas nécessairement sources de complication,
encore moins de pathologie chez l’individu, mais font partie de l’histoire de la
personne. Ces propos sur l’adolescence permettent de passer au chapitre suivant qui
traite spécifiquement les conduites suicidaires chez les adolescents.
5
___________________________________
Les conduites
suicidaires chez l’adolescent
Introduction
Ce chapitre tente de comprendre d’une part les éléments qui ont
amené l’adolescent au passage à l’acte, et d’autre part les
significations de l’acte. Quelqu’en soit l’aboutissement,
c’est-à-dire l’issue fatale ou non : est-ce que l’adolescent désire
réellement en finir avec la vie ou est-ce qu’il souhaite tout simplement en finir
avec cette vie-là ?
Ce chapitre développe quelques statistiques, les facteurs pouvant
entraîner des conduites suicidaires et des idées suicidaires au passage à l’acte.
Je me réfère, à plusieurs reprises, à trois auteurs : P. Jeammet, F. Ladame et X.
Pommereau. Pour des raisons pratiques, je ne cite pas les trois noms à chaque fois, mais
je précise qu’il s’agit de propos tirés de leurs ouvrages.
1. Quelques statistiques
Il me paraît intéressant de relever quelques statistiques (tableau
23) quant aux nombres de suicides et tentatives de suicide chez les adolescents ;
elles nous permettent de prendre conscience de l’ampleur de ce problème. Il est
toujours difficile d’estimer le nombre de décès suite à un suicide, car
l’intention autodestructrice n’est pas toujours explicite. Le suicide peut être
camouflé par un accident, par une discrétion de la famille, etc. Il faut être prudent
lorsqu’on examine des statistiques.
Selon l’office fédéral des statistiques, le suicide est la
deuxième cause de mortalité chez les adolescents de 15 à 24 ans, après les accidents.
Je tiens aussi à préciser que si le suicide obtient la deuxième place, c’est parce
que les décès dus à une maladie sont moins fréquents à cet âge. En 1994, la Suisse
compte 188 décès, dont 43 par suicide chez les 15-19 ans (37 garçons et 6 filles). Le
taux de mortalité s’élève à 18,2/100'000 garçons et 3,1/100'000 filles.
Je trouve aussi intéressant d’évoquer le taux de suicide chez
les préadolescents et les jeunes adultes car, comme nous l’avons déjà cité dans
ce travail, l’adolescence ne débute pas à 15 ans et ne s’arrête pas à 19 ans
pour tous les individus. De ce fait, chez les préadolescents de 10 à 14 ans, les taux
sont moins élevés ; ils représentent tout de même 1,5/100’000 garçons et
0,5/100'000 filles. La Suisse compte 86 décès à cet âge, dont 4 par suicide (3
garçons et 1 fille).
Par contre, le nombre de décès par suicide chez les 20 à 24 ans
s’élève à 111 (95 garçons et 16 filles) sur 468 décès. Les taux de mortalité
pour cet âge s’élèvent à 40,8/100'000 garçons et 6,9/100'000 filles.
Tableau 23 : Taux des décès par suicide en Suisse en 1994
Age |
Sexe |
Nbre de décès |
Taux de mortalité
pour 100'000 habitants |
10-14 ans |
Masculin |
3 |
1,5 |
10-14 ans |
Féminin |
1 |
0,5 |
15-19 ans |
Masculin |
37 |
18,2 |
15-19 ans |
Féminin |
6 |
3,1 |
20-24 ans |
Masculin |
95 |
40,8 |
20-24 ans |
Féminin |
16 |
6,9 |
Concernant les tentatives de suicide, il est encore plus difficile de
chiffrer le nombre, l’acte n’est souvent pas connu, particulièrement lorsque la
tentative de suicide ne demande pas de soins somatiques. Selon J. Laget, le taux des
tentatives de suicide est sous-estimé : " il est de l’ordre de 500
pour 100'000 en Suisse, deux fois plus élevé pour les filles que pour les garçons ".
Quant aux récidives, F. Ladame compte 18% de récidives en début d’adolescence et
40% en fin. Cette évolution montre la forte augmentation des récidives avec l’âge.
En outre, les conséquences médicales des deuxième ou troisième passages à l’acte
suicidaire sont, généralement, plus graves que le premier. En ce qui concerne les idées
suicidaires, 20% des garçons et 40% des filles répondant à une enquête ont pensé au
suicide et le quart d’entre eux y pensent souvent.
En guise de conclusion, nous pouvons constater qu’il y a plus de
suicides commis par les garçons que les filles. Par contre, il y a plus de tentatives de
suicide commises par les adolescentes que les adolescents. Pour X. Pommereau, s’il y
a plus de tentatives de suicide commis par les filles, c’est parce qu’elles
expriment plus leur souffrance psychologique par un effacement, un retrait, en utilisant
aussi un moyen plus doux pour s’en aller qui n’entraîne pas forcément la mort.
Par contre, les garçons ont plus souvent recours à l’agressivité et la violence,
que ce soit par le biais d’actes anti-sociaux ou par l’utilisation d’un
moyen de se supprimer plus violent conduisant directement à la mort.
2. Les facteurs pouvant
entraîner des conduites
suicidaires.
Les tentatives de suicide ne font pas partie du développement normal
de l’adolescent. Il existe une différence entre les remises en question d’ordre
existentiel et la détresse mentale rencontrée chez les adolescents à conduites
suicidaires.
Les éléments déclencheurs de la tentative de suicide tels
qu’examen échoué, rupture amoureuse, chômage, cachent souvent une souffrance dont
les origines sont plus profondes. Le désespoir de l’adolescent suicidaire, qui le
mène au passage à l’acte suicidaire, est, selon
X. Pommereau, conjugaison des facteurs personnels, familiaux et environnementaux qui
s’entremêlent et se renforcent réciproquement. Ce qui m’amène à les
développer ci-dessous.
2.1 Les facteurs personnels
Les auteurs de référence, H. Caglar, M. Klein, disent que la
tentative de suicide est un acte pathologique. Pour X. Pommereau, l’adolescent a des
souffrances psychiques qui nécessitent d’être reconnues et apaisées. Des troubles
de la personnalité tels qu’une émotivité excessive, des sentiments de tristesse,
de la colère, de la rage, de l’irritabilité, une impulsivité et une tendance au
passage à l’acte, sont souvent associés à ce comportement pathologique. Par
ailleurs, l’acte suicidaire peut aussi montrer le début d’une affection
psychiatrique évolutive telle qu’une maladie psychotique des troubles de
l’humeur. Cependant, le passage à l’acte est plus souvent lié à un échec du
processus développemental qu’à une maladie psychiatrique.
En ce qui concerne les différentes psychopathologies, 40 à 60 %
d’adolescents suicidants souffrent d’un épisode dépressif majeur. Un
adolescent sur dix souffre de troubles psychotiques et sept adolescents sur dix
présentent des troubles anxieux.
L’importance des épisodes dépressifs, le lien entre échec du
processus développemental et passage à l’acte, m’amène à traiter
spécialement la dépression et la perspective analytique, laquelle explique le processus
développemental. En outre, je trouve intéressant de nommer ce modèle théorique car un
bon nombre de psychiatres y fait référence.
La dépression
En reprenant ce qui a été dit précédemment, les symptômes
dépressifs n’annoncent pas forcément une maladie psychiatrique. " Il
n’y a donc pas d’adolescence normale sans dépression ou, plus correctement,
sans moments dépressifs, liés aux sentiments de pertes, sans pour autant qu’il
s’agisse de " maladie dépressive " ".
Cette idée peut entraîner une banalisation des symptômes, or il faut
être attentif aux affects dépressifs persistants et savoir les reconnaître pour les
traiter à temps. Je vais parler maintenant des significations et traits cliniques de la
dépression.
Le terme " dépression " est utilisé dans
de nombreux cas, le sens donné n’est pas toujours le même. F. Ladame
présente la dépression en tant qu’affect de tristesse, symptôme et maladie.
- Affect de tristesse. La dépression fait partie des sentiments humains universels
provoqués par les circonstances de la vie.
- Symptôme. Il s’agit plutôt d’un état dépressif qui provoque un
dysfonctionnement au niveau personnel et social. Cet état peut être lié à un stress
particulier d’origine interne et/ou externe tel que des difficultés liées au
développement de l’adolescent.
- Maladie. Elle exprime un trouble dans le développement psycho-affectif de
l’adolescent. Si elle n’est pas traitée, elle peut porter atteinte à
l’intégrité physique et psychique de cette personne à l’âge adulte.
La dépression n’est pas facile à diagnostiquer chez
l’adolescent. Contrairement à l’adulte, l’adolescent n’exprime pas
forcément directement sa déprime. Le dire serait avouer une faiblesse contre laquelle il
lutte. P. Jeammet dit que pour l’adolescent, il faudra chercher la réaction
dépressive derrière l’angoisse, alors que pour l’adulte, c’est souvent la
dépression qui masque l’angoisse.
La dépression se manifeste de plusieurs manières, elle varie
d’un adolescent à l’autre. Toutefois des traits cliniques habituels peuvent
être repérés, ils sont cités par P. Jeammet :
- L’inhibition psychomotrice avec un ralentissement moteur et bradypsychie
(ralentissement de la pensée).
- L’humeur dépressive, la douleur morale, les sentiments de tristesse et/ou de
dévalorisation, l’auto-accusation mélancolique.
- Les préoccupations suicidaires.
- La culpabilité, les auto-reproches, la honte, l’autodépréciation, la perte de
l’estime de
soi.
- Les troubles physiologiques avec anorexie, asthénie (état de fatigue et
d’épuisement),
insomnie, etc.
L’inhibition est aussi souvent une forme d’expression de la
dépression. Calmement et sans alerter son entourage, son champ d’intérêt se
restreint. Finalement ce retrait peut engendrer un refus des liens affectifs par
l’adolescent. Ce retrait doit être sérieusement pris en compte car
l’adolescent doit, de toute façon, vivre le processus de séparation-individuation.
Cependant, comment peut-il le vivre, si ses relations avec sa famille et son groupe de
pairs sont perturbées ?
Les auteurs de référence, M. Klein, mettent en relation la
dépression avec les conflits de l’adolescent. Une problématique dépressive existe
souvent derrière la plupart des troubles du comportement de l’adolescent.
L’expression des conflits intrapsychiques à cet âge, peut s’exprimer au
travers d’épisodes dépressifs.
Perspective analytique
J’ai choisi d’amener la perspective analytique à partir du
point de vue kleinien. Les propos suivants sont relatés par M.-H. Samy. Il développe
premièrement la théorie kleinienne, à savoir les positions schizo-paranoïde et
dépressive. Ensuite, il théorise les aspects suivants du développement adolescent, à
partir de la théorie kleinienne et les développements post-kleiniens :
l’évolution du niveau de symbolisation, l’atténuation du clivage et la
tolérance de l’ambivalence, le rôle de l’identification projective,
l’altération de la perception temporelle et son rôle dans le travail de deuil. Je
vais essayer de synthétiser les aspects susmentionnés.
- Les positions schizo-paranoïde et dépressive
La position schizo-paranoïde (abrégée S-P) et la position
dépressive (abrégée D) sont deux étapes importantes de la croissance psychique. La
position S-P est provoquée par l’instinct de mort et ressentie comme une angoisse de
persécution. " Le nourrisson devra cliver l’objet (et par conséquent
le Moi) en bon et mauvais objets, afin de préserver le premier et permettre ainsi
l’établissement d’un bon objet externe et interne. Ces mécanismes infantiles
sont à la base des défenses de clivage et d’idéalisation que nous retrouverons
plus tard ". Le nourrisson n’a pas conscience du monde extérieur à sa
naissance. Le sein de la mère fait partie de lui. Par la suite, le Moi se développe. Le
bébé devient ambivalent par rapport au premier objet (la mère). Il commence à projeter
ses pulsions destructives sur le mauvais objet, celui par lequel il se sent persécuté.
Il apprend que les désirs (pulsions) ne peuvent pas toujours être satisfaits
immédiatement. Il doit donc prendre en considération la réalité et différer la
satisfaction de ses désirs.
L’introjection du bon objet permet l’atténuation de
l’angoisse persécutive et la mise en place de la position D. L’accès à la
position D entrave la possibilité d’établir une relation avec l’objet total.
Le passage de la position S-P à la position D, signale l’accès à
l’ambivalence et la capacité de prendre l’autre en compte.
Quand l’enfant prend conscience que l’amour et la haine sont
dirigés vers la même personne, il réalise que la haine a pu blesser, alors il tentera
de réparer. L’angoisse dépressive s’explique par la peur de perdre
l’objet unifié. Selon M.-H. Samy, le développement à l’adolescence correspond
aussi à un passage de la position SP à la position D ; les aspects de ce
développement sont développés ci-dessous.
- L’évolution du niveau de symbolisation
A l’adolescence, l’individualisation demande la
transformation des liens avec l’objet premier (la mère). Ceci nécessite le passage
de la position SP à D, qui requiert la formation du symbole et de la représentation
verbale pour remplacer cette perte. Cependant, ce processus d’individualisation peut
être perturbé par des carences affectives et des séparations multiples. Pour M. Klein,
l’adolescent peut se retrouver immobilisé dans une relation conflictuelle avec
l’objet premier, ce qui peut gêner la formation du symbole. Il en résulte une
difficulté à nommer et décrire ce qu’il ressent.
- L’atténuation du clivage et la tolérance de l’ambivalence
Si l’atténuation du clivage et la tolérance de
l’ambivalence, cités précédemment, sont absents chez l’adolescent, il peut
souffrir d’une dichotomie : " ... il s’agit d’un système
du tout ou rien. La situation relationnelle devient insoutenable car le moindre rejet
équivaut à une perte totale ". L’adolescent suicidaire doute de la
prééminence de l’amour sur la haine. Il est très sensible au rejet.
Ces éléments me font penser à une situation de stage. Il s’agit
d’un adolescent qui, lorsqu’il se trouvait en situation conflictuelle avec un
éducateur ou un des résidents, il nous parlait de son désir de mourir en se jetant sous
un camion. Le moindre sentiment de rejet était équivalant, pour lui, à une perte
totale. Cet adolescent a été séparé de sa mère en bas âge. Je pense que cet
éloignement de l’objet maternel a entraîné des difficultés à tolérer
l’ambivalence.
- Le rôle de l’identification projective
L’identification projective cherche, par le biais de la possession
et du contrôle de l’objet, à établir une identité du Moi. Ceci se ressent chez
l’adolescent à travers son besoin d’appartenir à un groupe de pairs qui lui
dicte un style vestimentaire, musical, un mode de pensée, etc.
Avec l’atténuation de l’angoisse persécutive, le besoin de
contrôler l’objet va diminuer. Progressivement l’identification projective va
laisser la place à l’identification introjective et à la position D.
L’identification introjective c’est : " la manière dont un
sujet fait entrer fantasmatiquement des objets du dehors au dedans de sa sphère
d’intérêt ".
Dans cette perspective, le comportement suicidaire est le dernier moyen
de contrôle exercé sur l’entourage. Ce comportement montre l’échec du
développement de l’adolescent et le maintien de l’identification projective.
- L’altération de la perception temporelle et son rôle dans le travail du deuil
L’adolescent perturbé peut vivre dans la réalité immédiate et
laisser peu de place aux souvenirs et aux projets d’avenir. Etant donné qu’il
peut être difficile pour lui de percevoir le temps en termes de durée et de continuité,
il a de la peine à donner un sens à sa vie et un but qui apaiseraient sa souffrance
psychique. Tous changements menacent son besoin d’immuabilité, de permanence, qui
sont importants pour la formation de son identité et de son autonomie.
2.2 Les facteurs familiaux
Lorsque l’on parle de conduites suicidaires, il est important de
prendre en compte également le réseau relationnel de l’adolescent, car les
interactions existantes influencent le développement de l’adolescent.
F. Ladame, X. Pommereau, M.-H. Samy constatent que bon nombre
d’adolescents à conduites suicidaires vivent des conflits intra-familiaux. Les
conflits peuvent être dus à l’éclatement de la famille, à des troubles
psychiatriques d’un des parents, à une violence psychique ou physique, etc.
L’enfant a besoin de stabilité et une rupture d’équilibre, au sein de la
famille, entraîne le plus souvent des difficultés.
Les ruptures occasionnent forcément des modifications dans la vie de
l’adolescent, tels que changement de domicile, de quartier, d’école,
d’amis, d’appartement, etc. Des conséquences peuvent se faire sentir dans leurs
relations avec autrui, dans leur sexualité, à l’école où les problèmes émotifs
et relationnels prennent parfois le pas sur leur motivation à apprendre et leurs
performances.
Les difficultés liées aux rapports intra-familiaux peuvent aussi
être vécues à l’intérieur d’une cellule familiale, mais où le climat
familial est pathogène. Même si les parents vivent toujours ensemble, ils peuvent aussi
ne plus s’entendre, avoir recourt à la violence verbale et/ou physique, vivre un
" divorce émotionnel ", etc.
Je tiens à préciser que tout éclatement de la famille nucléaire
n’est pas synonyme de conduites suicidaires chez les enfants. Mais selon M.-H. Samy
par exemple, ce qui semble spécifique ce sont les séparations multiples et les carences
affectives des deux parents.
2.3 Les facteurs environnementaux
Plusieurs événements sociaux peuvent influencer le passage à
l’acte suicidaire, je vais reprendre quelques facteurs cités par X. Pommereau :
l’absence d’emploi, l’isolement social, le contexte socio-économique et
l’effondrement de certaines valeurs.
L’absence d’emploi
Le développement industriel a engendré d’énormes progrès ayant
des conséquences sur l’espérance de vie des individus, le confort matériel,
l’évolution des techniques électroniques et de communication. Cependant, cette
mécanisation a aussi provoqué une diminution des emplois. Comme le dit X. Pommereau, un
écart se crée entre les personnes dont l’avenir semble prometteur et celles pour
qui l’avenir est incertain. Le travail en Suisse est très valorisé ; il offre
statut social, sécurité, sens à la vie, réseau social, reconnaissance du travail
accompli, etc. En écoutant les dires des chômeurs, je constate que l’absence
d’emploi peut engendrer divers phénomènes tels qu’une dépendance financière,
une dévalorisation de la personne, des sentiments d’injustice, le dégoût de la
vie, l’absence de projet à long terme, etc.
L’isolement social
A quoi bon vivre si l’individu est seul, sans contact, sans
vis-à-vis. Le groupe social donne une raison de vivre, offre des liens entre les
individus, par conséquent des forces, du réconfort, de la compréhension. Si nous allons
plus loin dans la réflexion, les liens sociaux et d’amour rattachent les personnes
à la vie, ils sont importants pour l’épanouissement de l’individu. Nous
existons en partie dans le regard des autres, au travers du prix que l’on a aux yeux
des autres. Or, l’adolescent suicidaire, qui souffre d’une dépression, peut
avoir comme trait clinique une rupture des liens qui le rattachent aux êtres vivants. Ce
fait est d’autant plus problématique pour lui, car à cet âge l’adolescent
entre dans le processus de séparation-individuation. Ce qui veut dire que
l’entourage est non seulement important pour son épanouissement, mais il joue aussi
un rôle dans la recherche d’autonomie qui caractérise l’adolescence.
- En tant qu’individu, nous avons aussi une part de responsabilité dans
l’isolement social d’autrui. Notre regard, nos attitudes envers les autres
individus influencent leur propre appréciation d’eux-mêmes. Voici une citation
illustrant cette pensée : " La capacité de quelqu’un dépend
beaucoup de la confiance qu’on lui accorde. Ce qui est vrai en économie (par exemple
par le cours du dollar qui grimpe ou chute selon l’estime qu’on lui porte)
devrait l’être pour la vie. "
Le contexte socio-économique
Les zones urbaines les plus touchées par la crise économique
n’indiquent pas un taux de suicide plus élevé qu’ailleurs. En plus, il y a des
jeunes suicidaires dans les familles de tous niveaux et de toutes catégories
professionnelles. Par contre, selon C.-L. Moser et S. Blum-Moulin, des problèmes graves
peuvent découler du décalage socio-économique et culturel entre le milieu familial et
le milieu social de l’adolescent. L’école, le groupe des pairs et le travail
peuvent confronter l’adolescent à d’autres valeurs sociales que celles
rencontrées dans sa famille.
L’effondrement de certaines valeurs
La société occidentale actuelle n’offre plus de rituels reconnus
et cohérents. Cette perte du rite est, selon X. Pommereau, liée à l’effondrement
des idéologies et des croyances. Cet aspect ne donne pas aux adolescents une confiance en
un avenir prometteur. L’individualisme laisse les adolescents maîtres de leur
destinée, cependant cet individualisme les laisse aussi seuls et fragiles face aux
difficultés de la vie.
Il me semble que la société occidentale délaisse de plus en plus ses
fondements judéo-chrétiens qui lui assuraient une stabilité. Lorsqu’il y a une
remise en question de valeurs fondamentales, les individus perdant leurs points de
repères peuvent se trouver fragilisés. En prônant la liberté, l’individu
s’est retrouvé seul, sans norme, ne sachant plus sur quelle base construire sa vie.
La réussite professionnelle et la richesse ont séparé les hommes. E. Durkheim dit que
le penchant au suicide est aggravé dans les milieux instruits. Cette aggravation ne
résulte pas, pour lui, d’un développement intellectuel, mais est due à
l’affaiblissement des croyances traditionnelles et à l’état
d’individualisme moral qui en résulte.
L’absence de repères favorise une déviance comportementale et
l’attrait des conduites à risque. X. Pommereau nous explique cet attrait de la
manière suivante : " Moins la réalité externe lui offre des
représentations symboliques stables et solides de limites contenantes et supportables,
moins le sujet se sent en sécurité dans l’espace qu’il a à explorer et plus
il doit les " bricoler " lui-même ".
3. Des idées suicidaires
au passage à l’acte
Selon C.-L. Moser et S. Blum-Moulin, penser à la mort est structurant
pour l’adolescent, car cette période est le deuil de l’enfance et d’images
parentales. C’est aussi à ce moment-là que la capacité d’intellectualiser la
mort se met en place. Elle devient une préoccupation essentielle pour l’adolescent.
Il prend conscience que son corps n’est pas immortel. " L’adolescent
éprouve un réel plaisir à manier l’idée de sa propre mort, car il se donne ainsi
le sentiment de se définir, de se connaître, de maîtriser ses pulsions de mort et de
sonder sa liberté ".
Comment une idée suicidaire évolue-t-elle en acte-suicide ? Je
propose d’aborder ce thème en développant les finalités recherchées dans les
conduites suicidaires, le passage à l’acte suicidaire et les moyens utilisés.
3.1 Les
finalités recherchées dans les conduites suicidaires
Comprendre le but des conduites suicidaires semble important, cependant
il est difficile de donner des significations à l’acte. F. Ladame, A. Haim, H.
Chabrol pensent en effet que la signification des conduites suicidaires est à rechercher
plus profondément, principalement au niveau de l’inconscient. Je vais parler
maintenant de quelques significations psychologiques générales du suicide, du passage à
l’acte suicidaire et des moyens utilisés.
Quelques significations du suicide
Voici quelques significations psychologiques générales du suicide,
présentées par P.-B. Schneider :
- La fuite est une manière de mettre fin à un conflit souvent d’ordre affectif
ou à une situation accompagnée de tensions psychiques qui deviennent intolérables.
- Le châtiment est un mécanisme inconscient. Le suicidant exprime une culpabilité
profonde, liée à la vie sexuelle qui représente, pour l’adolescent, l’inceste
interdit. Il pense ne pouvoir alors expier sa faute qu’à travers la mort.
- Le crime. Etant donné que P.-B. Schneider ne développe pas ce point dans son
ouvrage, je me permets de comprendre cet élément à travers les propos de F. Ladame qui
dit que la destructivité s’associe à des fantasmes de suppression de l’objet
investi. Comme l’objet investi c’est lui-même, il se supprime.
- La vengeance sert à accuser des proches ou à leur faire assumer la responsabilité
des maux de l’adolescent et à les rendre meurtriers.
- L’appel permet à la personne de remettre brutalement en cause le système
relationnel qui la fait vivre.
- Le chantage affectif est souvent utilisé par les adolescents qui se sentent
trompés, abandonnés et spécialement dans le cadre d’une relation amoureuse.
Certains accomplissent l’acte devant la personne visée en se préoccupant des
réactions de leur entourage. La tentative sert à impressionner l’autre pour
provoquer un nouvel échange.
- L’ordalie est un jeu. L’adolescent joue avec la mort, s’en approche
de très près pour voir si elle l’emportera ou non.
- Le sacrifice est le moyen utilisé par l’adolescent qui choisit de se supprimer
afin d’éviter à son entourage de devoir changer de comportement.
En analysant cette liste, nous constatons qu’il est possible de
donner plusieurs sens à chaque passage à l’acte, et que la tentative de suicide
n’a donc pas comme unique but de rechercher la mort. " Dire que
c’est toujours la mort qui est en question ne signifie pas pour autant que
l’objet du suicidant est de mourir, mais se reconstruire, renaître après une mort
qui ne serait pas définitive ". L’acte s’inscrit dans une
histoire personnelle mais aussi familiale ; l’entourage se doit de porter
attention aux messages transmis au travers des menaces et des tentatives de suicide afin
d’éviter un nouveau passage à l’acte qui, selon les psychiatres, risque
d’être plus violent que le précédent.
Le passage à l’acte suicidaire
Des heures ou des semaines avant le passage à l’acte,
l’adolescent envoie des signes alarmants verbaux et non verbaux ; par
exemple : " j’aimerais renaître ailleurs... je veux faire un long
voyage... la vie n’a plus de sens... c’est trop dur... " ou alors des
signes non verbaux tels que remettre en ordre ses affaires, léguer des objets, se replier
sur soi-même, s’isoler, se sentir rejeté par les groupes de pairs, etc.
D’après les spécialistes, tous les adolescents ayant fait une
tentative de suicide ou un suicide avaient parlé avec un médecin ou des personnes de
leur entourage pour signaler, à leurs manières, leur mal-être physique et/ou psychique.
Selon E. Robins et al., 69% des suicidés avaient communiqué leur intention suicidaire.
Selon X. Pommereau, les idées suicidaires naissent et disparaissent en fonction des
frustrations affectives et des réparations provisoires, mais elles peuvent aussi
s’incruster. Il dit que les idées noires sont plus intenses et nombreuses en fin de
journée, c’est pourquoi les passages à l’acte ont souvent lieu en soirée.
Avant le passage à l’acte, une montée rapide de l’angoisse
devient de plus en plus envahissante chez l’adolescent. L’acte permet de fuir
cette insupportable anxiété et tension, et tente d’évacuer cette souffrance hors
du psychisme où elle devrait être éprouvée. Au travers de l’acte, le sujet
manifeste son désir de changement. Il est prêt à mettre en péril son corps pour
soulager ses peines.
Le passage à l’acte chez l’adolescent suicidaire prend donc
la place de l’idée de suicide.
F. Ladame considère que " le moment de la tentative est toujours un moment
profondément psychotique " où s’opère une perte temporaire de
" l’épreuve de la réalité ". Il y a une non-maîtrise de
ses mouvements et une décharge rapide de ses pulsions. Selon H.-M. Samy, il y a, au
moment de l’acte suicidaire, un déni de la peur de la mort. L’angoisse de la
mort est devenue moins intense, comme c’est le cas pendant l’enfance.
La période qui suit immédiatement le passage à l’acte est en
général vécue comme un soulagement (par ces adolescents), car le geste a dissipé la
souffrance, l’angoisse. Cependant
F. Ladame précise que ce moment d’apaisement n’est que passager. Finalement la
tentative de suicide n’a pas résolu les problèmes, la détresse psychique est
toujours présente. C’est à ce moment-là, que les personnes entourant le suicidant
doivent être vigilantes et prendre au sérieux la tentative de suicide. La mise en place
rapide d’une prise en charge adéquate évitera, d’une part le déni de
l’adolescent et de son entourage, et d’autre part une récidive.
Selon C. Tishler, les adolescents ayant survécu à leur geste
autodestructeur se sont révélés plus anxieux, sensibles dans les relations avec autrui,
plus déprimés, l’image de soi se trouve plus dévalorisée. En m’inspirant de
cette dernière idée, je peux ajouter que si aucun changement et prise de conscience ne
s’effectuent chez l’adolescent après la tentative de suicide,
l’incompréhension de l’acte peut favoriser de nouvelles conduites suicidaires.
Les moyens utilisés
Une différence des moyens utilisés existe entre les hommes et les
femmes. Généralement, les hommes utilisent des moyens plus actifs et plus violents que
les femmes pour mettre fin à leurs jours. X. Pommereau formule une hypothèse en disant
que les hommes ont besoin d’exprimer leur virilité et le fait de rater le geste
signifierait une lâcheté ; les moyens utilisés sont donc expéditifs, comme la
strangulation, la pendaison ou les armes à feu. Quant aux filles, leur respect de
l’intégrité corporelle expliquerait les moyens utilisés plus passifs comme les
médicaments et le gaz.
Cependant, en ce qui concerne les tentatives de suicide, le moyen le
plus utilisé en Suisse et en France, est la prise de médicaments. Selon F. Ladame, trois
adolescents suicidants sur quatre utilisent ce moyen. Actuellement, les plus utilisés
sont les tranquillisants. Ce phénomène est lié au fait que le corps médical prescrit
plus facilement des tranquillisants à la place des barbituriques très vendus il y a
quelques années.
Les médicaments utilisés se trouvent en général dans la pharmacie
familiale. Ils sont consommés par les parents ou l’adolescent lui-même après une
prescription médicale.
F. Ladame et X. Pommereau constatent que lorsque l’adolescent
passe des idées suicidaires à l’acte, généralement il utilise ce qu’il a
sous la main. En outre, la tentative de suicide se déroule souvent au domicile de
l’adolescent.
Cette dernière constatation m’interpelle quant à la forte
utilisation de médicaments comme moyen de passage à l’acte suicidaire. Puisque
l’acte est souvent impulsif, pourquoi les adolescents n’utilisent-ils pas
d’autres moyens présents sous la main ? Est-ce que le moyen utilisé fait
partie des phénomènes de mode ? Ou est-ce propre à la tentative de suicide dont la
finalité n’est pas forcément la mort ?
Conclusion
Une conduite suicidaire aussi minime soit-elle, ne peut être
considérée comme une réponse normale aux conflits de l’adolescent. En effet, les
tentatives de suicide sont à prendre au sérieux ; qu’il soit réussi ou raté,
l’acte démontre une souffrance psychologique. Le nombre des tentatives de suicide
est difficile à estimer ; l’intention auto-destructrice n’est pas toujours
explicite et connue par le corps médical, par autrui et par le sujet lui-même.
Les facteurs pouvant entraîner les conduites suicidaires sont
d’ordre personnel, familial et environnemental ; ils s’entremêlent et se
renforcent réciproquement. Une problématique dépressive et anxieuse existe souvent
derrière des comportements suicidaires. Toutefois, cela ne signifie en aucun cas que tous
les adolescents dépressifs auront des comportements suicidaires. Par contre,
d’autres formes de manifestations d’une problématique dépressive peuvent avoir
lieu telles que les plaintes somatiques, les conduites à risque, les différentes
déviances, etc. Quant aux conflits intra-familiaux, ils sont vécus fréquemment par ces
adolescents.
En définitive, la tentative de suicide n’a pas résolu les
problèmes, la détresse psychique est toujours présente. C’est pourquoi, les
personnes entourant le suicidant doivent mettre en place une prise en charge adéquate
afin d’apaiser les souffrances de l’adolescent. Ne disons-nous pas que les
jeunes sont l’avenir de demain ? Alors soignons les jeunes et nous soignerons
l’avenir...
A la suite de ces propos théoriques, nous passons à la dernière
partie de ce travail de recherche qui est pratique. Elle débute par le résumé d’un
ouvrage concernant l’intervention psychodynamique adaptée à des personnes
suicidaires.
6
________________________________________
Intervention
psychodynamique adaptée à
des personnes suicidaires
Introduction
Ce chapitre tente de résumer les propos tirés de l’ouvrage de J.
Mercier, enseignant et psychiatre, dont le référentiel théorique est la psychanalyse.
L’auteur apporte aux intervenants sociaux et psychosociaux un modèle préventif,
d’intervention et de post-intervention adapté à la personne présentant des
comportements violents et suicidaires.
L’approche présentée nous fait prendre conscience que les
comportements suicidaires sont avant tout des symptômes. Il est dit : " Pour
contrer ces symptômes, il faut en connaître l’origine, les causes, le niveau de
détresse qu’ils expriment et la satisfaction recherchée par la personne qui utilise
ces comportements ". S’il s’agit d’un processus dynamique,
c’est parce que les besoins et désirs d’une personne évoluent et sont propres
à chaque être humain. Ils varient aussi en fonction des situations vécues. En outre, le
modèle d’intervention proposé utilise le référentiel théorique analytique, pour
identifier les caractéristiques d’une personne et son niveau de détresse.
Nous avons vu qu’une des possibilités de prise en charge des
adolescents suicidants est le placement dans un foyer ; c’est pourquoi, je
trouve important, pour les éducateurs, de connaître ce modèle d’intervention.
Dans ce chapitre, je présente la composition d’un cycle de
réactions, les besoins des personnes, les niveaux de détresse, le programme
d’intervention et quelques réflexions personnelles sur ce modèle.
1. La composition d’un
cycle de réactions
Le cycle représente une répétition de comportements. Selon
l’auteur : " Le cycle est la composition d’un ensemble de
réactions qui font suite à la présence d’un type de frustration ".
Tableau 24 : La composition d’un cycle
Le cycle est constitué de trois étapes :
1. La période de tension qui provoque le stress et par la suite de
l’anxiété.
2. La période " acting out " qui permet de
diminuer la tension au travers de comportements
violents ou de conduites suicidaires.
3. La période de culpabilité et de réparation, lorsque la personne
désire rompre le cycle.
Dans le cas contraire, des sentiments de haine, de mépris ou de
non-responsabilité
s’installent.
La répétition de comportements violents ou idéations suicidaires
peut devenir automatique. Il faut donc briser le cycle des comportements utilisés pour
soulager la tension et l’anxiété. La seule façon de le faire est de changer
l’enchaînement en analysant chaque élément, c’est-à-dire : découvrir
les sources de stress, les ressources pour passer à l’acting out et les réactions
du sujet à la suite du passage à l’acte de violence ou de comportement suicidaire.
Pour ce faire, l’adolescent a besoin d’une personne extérieure qui l’aide
dans ces démarches et à accepter de s’investir.
2. Les niveaux de détresse
Pour pouvoir étudier le modèle d’intervention psychodynamique,
nous devons tout d’abord analyser les niveaux de détresse de la personne adoptant
les comportements violents et suicidaires. La détresse est provoquée par la
non-satisfaction des besoins d’un individu, qui sont : d’être aidé et
soutenu, d’être responsable et de s’impliquer dans son milieu. La détresse
peut être de niveau plus ou moins élevé et l’augmentation du niveau accentue aussi
les risques des comportements destructeurs et/ou autodestructeurs. L’auteur présente
neuf niveaux de détresse.
- Niveau 1 : se sentir menacée. La personne craint le système extérieur, elle
le trouve menaçant, elle aura tendance à s’en éloigner ou à s’opposer.
- Niveau 2 : ne peut s’exprimer sans être jugée. Lorsque une personne ne
trouve pas de réponse à ses interrogations et se sent jugée, elle ne va pas forcément
le verbaliser, mais l’exprimer à sa façon. Ceci peut augmenter le niveau de
détresse.
- Niveau 3 : n’est pas respectée. En plus, si la personne ne se sent pas
écoutée, elle va se sentir injustement traitée et pas respectée. Elle pourra tenter de
dominer la réalité avec ses comportements.
- Niveau 4 : seule, négligée. Si de par ses comportements, la personne se sent
rejetée, négligée, elle les développera encore plus.
- Niveau 5 : détruite, diminuée. Lorsque la personne est dépendante du regard
d’autrui et n’existe que par lui, elle risque de vivre un vide intérieur. En
outre, le système dans lequel vit la personne, la détruit .
- Niveau 6 : ne veut pas s’engager. La personne doit pouvoir s’investir
et trouver des solutions à sa détresse. Or, si elle ne trouve pas les moyens de changer,
elle risque d’abandonner.
- Niveau 7 : pas responsable, l’indifférence. Souvent, ces personnes ne se
sentent pas responsables de leurs actes, c’est en général la faute des autres.
L’indifférence signifie aussi l’incapacité d’assumer les conséquences de
ses actes.
- Niveau 8 : limitée à résoudre ses problèmes, dépossédée. Lorsque la
personne ne trouve plus de solution à sa détresse, cette dernière va lui paraître
insurmontable. Elle pourra se sentir dépossédée des pouvoirs sur sa vie et avoir
recours à des comportements destructeurs et/ou autodestructeurs.
- Niveau 9 : ne veut pas sortir de ses schèmes, de ses pensées. Lorsque le
mépris et l’indifférence ont rejoint la personne, elle pourra chercher un mode
différent de ce qui se vit dans la réalité pour en finir avec sa détresse, en ayant
peut-être recours au crime ou au suicide.
3. Le programme d’intervention
Quatre objectifs forment le programme d’intervention
psychodynamique : développer des mécanismes d’aide et de soutien de qualité,
favoriser la responsabilisation et l’autonomie, offrir des services spécialisés et
utiliser les forces du milieu.
3.1 Développer des
mécanismes d’aide et de soutien
Pour se faire, l’auteur propose de diminuer l’anxiété,
d’apprendre à communiquer, de développer un référentiel sécuritaire, de
considérer la personne comme unique et orienter le choix de ses amis.
- Pour certaines personnes, le système dans lequel elles vivent, peut leur paraître une
menace, l’intervenant doit donc les aider à diminuer l’anxiété en leur
donnant la possibilité d’exprimer ce qu’elles vivent, leurs attentes, leurs
pensées, etc. Ceci a pour but de les aider à comprendre et accepter la réalité.
Désamorcer les stratégies défensives de la personne se résume en trois principes
d’intervention. Le premier consiste à aborder la dimension affective de la personne,
par exemple sur le plaisir qu’elle a dans ce qu’elle entreprend. Le deuxième
principe consiste à aborder la dimension cognitive, c’est-à-dire sur sa perception
de la réalité. Et le troisième principe consiste à aborder ce qu’elle serait
prête de faire pour s’adapter à la réalité.
Ensuite, l’intervenant peut proposer à la personne de trouver d’autres
possibilités que les comportements violents ou suicidaires pour satisfaire ses besoins.
- Il est très important pour la personne et l’intervenant de pouvoir communiquer. Ce
dernier doit apprendre à se maîtriser, s’exprimer sans jugement, écouter de
manière empathique (l’intervenant vit ce que ressent la personne), diagnostique
(l’intervenant observe) et interventionniste (l’intervenant agit). En outre, il
donne la possibilité à la personne d’exprimer ses sentiments, etc.
- Un référentiel sécuritaire permet à la personne de savoir qu’elle peut
s’exprimer sans être jugée et qu’elle sera écoutée. Il comporte des règles
de conduite facilitant la responsabilisation de chacun et, des mécanismes de référence.
Ces derniers consistent, pour l’intervenant, à être ouvert à ses demandes, savoir
prévenir ou intervenir, faire connaître à la personne les services qui pourraient
l’aider, etc.
- La personne en détresse a besoin de se sentir acceptée par l’intervenant et ses
pairs. Les comportements violents ou idéations suicidaires poussent parfois
l’entourage à nier la présence de la personne ou à la contrôler davantage. Or, il
est préférable de laisser ces mécanismes de côté et lui montrer qu’il existe
d’autres possibilités pour accepter la réalité.
3.2 Favoriser la
responsabilisation, l’autonomie
L’auteur propose d’apprendre à la personne qui elle est, de
favoriser l’investissement personnel, de favoriser la responsabilisation et
l’autonomie.
- L’intervenant doit tenter de favoriser une image positive et réaliste de la
personne, au travers de l’écoute et de la relation, pour placer la personne en face
d’elle-même, avec ses forces et ses faiblesses. Comme dit l’auteur :
" La qualité du JE de l’intervenant conditionne la qualité du JE
de la personne dont il a la responsabilité ".
- Favoriser l’investissement personnel, permet à la personne de mieux contrôler ses
comportements et repérer ce qui pourrait l’aider à les modifier. La personne pourra
aussi reconnaître ses buts personnels.
- Etre responsable, c’est aussi être libre de faire des choix et prendre des
décisions. De ce fait, la personne est aussi responsable de ses comportements. Elle doit
apprendre à faire des deuils de certains projets, rêves, objets significatifs et
corriger ses erreurs.
3.3 Offrir des services spécialisés
Si la personne continue de ne pas se responsabiliser, c’est que la
prise en charge nécessite une aide plus adaptée à son niveau de détresse ;
c’est-à-dire un groupe en relation d’aide et une thérapie de groupe.
- Les intervenants des groupes en relation d’aide tentent de comprendre et
interpréter les étapes que la personne n’a pas comprises et acceptées.
- En thérapie de groupe, l’approche utilisée est la confrontation. Ce type de
thérapie favorise la personne à voir ce qu’elle est, puisqu’elle même le
refuse.
3.4 Utiliser les forces du milieu
Ce dernier point présente les possibilités d’utiliser les forces
du milieu, c’est-à-dire des médiateurs et des leaders.
- Les médiateurs tentent de résoudre les problèmes en s’assurant que toutes les
parties puissent en bénéficier. L’auteur propose un modèle de résolution des
conflits en quatre étapes. La première consiste à demander à chaque personne de
clarifier les faits. Le médiateur écoute, résume et vérifie si les versions sont
différentes. La deuxième étape consiste à identifier les besoins de chaque personne,
pour permettre une compréhension commune de l’origine du conflit. La troisième
étape consiste à rassembler toutes les solutions proposées par les personnes et choisir
la plus favorable. Et la quatrième étape comprend l’engagement de chaque personne
vers un comportement modifié.
- Il existe aussi les personnes leaders, qui de par leur vision de la réalité et leur
création provoquent de l’admiration. Ce moyen pourrait être utilisé pour créer
des activités qui permettraient aux personnes d’exprimer ce qu’elles
ressentent, vivent, etc.
4. Réflexions personnelles sur ce
modèle
A la suite de cette présentation du modèle d’intervention, je
désire apporter quelques réflexions personnelles. J’ai choisi de relever quelques
points : structure du livre, modèle d’intervention, comportements à
répétition, indifférence, la responsabilisation et l’autonomie, former les
intervenants et le suivi des familles. Ils sont cités dans l’ordre chronologique du
résumé.
Je trouve la présentation du modèle simple et accessible, pour un bon
nombre de personnes. J’apprécie sa structure ; débuter avec quelques
hypothèses explicatives permet de situer le contexte dans lequel et pour lequel
l’acte est commis. Continuer avec les besoins des personnes fait prendre conscience
que chaque individu en a ; l’éducateur doit être attentif à ces derniers et
à la peur que peut engendrer leur non-satisfaction. Le point suivant concerne les niveaux
de détresse en lien avec les besoins de la personne. En effet, le niveau de détresse
peut être plus ou moins élevé selon les personnes. A mon avis, ce dernier point met en
évidence les difficultés que peuvent vivre certaines personnes à comportements violents
et suicidaires.
Pour ma part, ce modèle est très intéressant. Il offre des
éléments concrets sur la compréhension des comportements violents et suicidaires, et
donne des conseils sur l’intervention. Un élément m’a tout de même surprise
dans cette lecture ; le modèle d’intervention est le même pour les personnes
à comportements violents et suicidaires. A nouveau, j’ai pris conscience que la
violence administrée aux autres ou contre soi résulte de problèmes identiques.
- Les comportements à répétition
La présentation de la composition d’un cycle de réactions est
très intéressant. Il permet de comprendre que l’acte violent surgit, non pour le
bon plaisir de la personne, mais pour diminuer l’anxiété. L’énervement et le
rejet que provoquent parfois les personnes violentes et agressives, s’atténuent
lorsque nous comprenons les étapes de ce cycle de réactions. Il ne faut pas rejeter la
personne, mais le moyen utilisé.
L’auteur dit que l’indifférence signifie aussi
l’incapacité d’assumer les conséquences de ses actes. A mon avis, une personne
à comportements suicidaires, n’est pas indifférente à ce qui lui arrive. Pour ma
part, le terme " indifférence " est fort, il est peut-être plus
adéquat pour les crimes que pour les conduites suicidaires. Au contraire, la personne ne
témoigne pas de l’indifférence mais envoie des messages, désire changer quelque
chose, en finir avec cette insupportable souffrance, etc.
- La responsabilisation et l’autonomie
Une des étapes du programme d’intervention est de favoriser la
responsabilisation et l’autonomie. L’auteur met l’accent sur
l’investissement personnel, devenir responsable, assumer ses erreurs, se fixer des
buts dans la vie, etc. Je suis d’accord avec ces propos, toutefois, je trouve que la
personne est livrée à elle-même et doit s’en sortir toute seule. L’auteur
parle des mécanismes d’aide et de soutien, mais si la personne déprime et/ou
souffre d’une psychopathologie, elle ne peut prendre part à cette responsabilisation
et autonomie toute seule. Je pense qu’il faut nuancer ces propos et préciser que
rendre responsable prend du temps et demande un accompagnement encore plus intense pour
ces personnes-là.
Pouvons-nous demander à des enfants et adolescents de devenir
responsable et autonome ? Ceci me semble difficile et spécialement pour les enfants,
car ils ont encore besoin des adultes. Ils comprennent beaucoup, mais ce dont ils ont le
plus besoin avant les théories, c’est l’amour, l’affection et la
confiance. Nous devons toutefois, en tant qu’éducateur, les écouter, leur apprendre
à se comporter correctement, à communiquer, à vivre, etc. J’ai l’impression
que ce programme d’intervention est plus approprié à des adolescents et des
adultes. Il demande aussi un certain seuil de réflexion. Toutefois, avec quelques
adaptations, il pourrait être utilisé pour le suivi d’enfants.
Un élément me semble aussi important à relever : c’est
celui d’informer et suivre les intervenants, pour qu’ils puissent à leur tour
conseiller et adresser les patients auprès de différents services. L’auteur ne
parle pas non plus du suivi des intervenants, alors qu’il est primordial. Les
comportements violents et suicidaires sont difficiles à gérer. Des supervisions et lieux
d’écoute seraient adéquats, pour permettre aux intervenants de se décharger. Ces
deux points sont développés dans le chapitre suivant.
Un travail effectué avec les familles n’est pas cité dans cet
ouvrage, alors qu’il est important dans la prise en charge des patients. Si la
personne a des comportements violents et suicidaires, ceux-ci peuvent être liés à des
conflits intra-familiaux. Les enfants et adolescents ne peuvent pas faire face aux
conflits, tout seul. Dans ce cas-là, l’appui des intervenants est important. En
plus, ce dernier peut faire prendre conscience à la famille des difficultés de chacun et
travailler ensemble. Je dois aussi préciser qu’un seul ouvrage ne peut sans doute
pas tout dire, et c’est pourquoi ce sujet n’est peut-être pas abordé.
Conclusion
Ce programme d’intervention me semble pertinent. Il offre des
pistes de réflexions et conseils pratiques aux intervenants sociaux prenant en charge des
personnes à comportements violents et suicidaires.
La composition d’un cycle de réactions comporte trois
étapes ; la période de tension, la période de l’acting out qui permet de
diminuer cette tension, et la période de post-événement qui peut être de l’ordre
de la réparation ou de la haine, du mépris, etc.
Les niveaux de détresse sont provoqués par la non-satisfaction des
besoins de la personne qui sont : d’être aidée et soutenue, d’être
responsable et de s’impliquer dans son milieu. Le programme d’intervention
psychodynamique s’appuie sur ces besoins et propose quatre objectifs ;
développer des mécanismes d’aide et de soutien de qualité, de favoriser la
responsabilisation et l’autonomie, et utiliser les forces du milieu.
Le référentiel théorique de ce programme d’intervention
m’amène à constater que je n’ai pas trouvé, à mon grand étonnement,
d’ouvrages sur la prise en charge éducative des adolescents suicidants, écrits par
des éducateurs. Le seul livre trouvé est l’ouvrage d’un psychiatre. Toutefois,
ce livre n’est pas écrit spécialement pour les éducateurs, il manque des
éléments propres à la pratique de cette profession. Dans le chapitre suivant, j’ai
tenté de mettre en avant quelques réflexions sur l’approche éducative des
adolescents à comportements suicidaires. Je tiens à préciser que je n’ai pas
repris les éléments de ce modèle et créé à partir de ceux-ci un concept de prise en
charge. J’ai désiré, à la suite de ma pratique professionnelle et de
l’élaboration de ce travail de recherche, mettre par écrit mes réflexions
personnelles sur la prise en charge éducative des adolescents suicidaires. En
définitive, le modèle d’intervention présenté et mes réflexions personnelles
sont complémentaires.
7
_____________________________________
Réflexions sur
l’approche éducative
des adolescents à conduites suicidaires
Introduction
La prise en charge des adolescents avant ou après une tentative de
suicide se ressemble. Car l’acte n’a rien changé en lui-même si ce n’est
le fait d’avoir pu exprimer son insupportable souffrance. En outre, si rien
n’est mis en place pour provoquer un changement dans la vie de celui-ci, il va
réitérer son acte. C’est pourquoi, cette approche éducative concerne la
prévention et la post-intervention auprès d’adolescents à conduites suicidaires.
Afin d’éviter un passage à l’acte suicidaire, que peut
faire l’éducateur ? Personnellement, je n’ai pas suivi d’adolescents
suicidaires. Par contre, l’élaboration de ce travail de recherche, mon expérience
professionnelle, la rencontre des différents responsables des services psychiatriques et
de foyers m’ont permise de me positionner et penser une approche éducative.
Toutefois, chacun perçoit celle-ci avec sa sensibilité, son expérience et ses
croyances ; c’est pourquoi les propos relatés ne sont pas universels et
méritent d’être nuancés.
Dans ce chapitre, je présente la situation d’un adolescent et
développe les points suivants : la prise en charge, l’observation, reconnaître
la souffrance, le projet éducatif, le bilan de la situation et le besoin d’aide de
l’aidant.
1. Situation d’Alexandre
Comme support aux réflexions sur l’approche éducative, prenons
une situation vécue lors d’un stage. Il s’agit d’un jeune garçon placé
dans un foyer pour enfants et adolescents en difficultés.
Alexandre a 14 ans, il est né le 27 avril 1984. Ses parents,
d’origine portugaise, ont eu cet enfant hors mariage. Son père ne l’a pas
reconnu à sa naissance. Par la suite, sa mère a rencontré un autre homme, et de cette
union un petit garçon est né en 1990. A maintes reprises, Alexandre a demandé de
l’aide auprès de SOS enfants et de la main tendue. Et c’est en 1991, qu’il
est placé au foyer par le SPJ, pour le protéger de la violence familiale.
Pendant les premières années de placement, il est pris en charge le
week-end par une famille d’accueil. Par la suite, après le départ de son
beau-père, il rentrait chez lui, pour les week-ends.
Lorsqu’il habitait chez sa mère, il passait la majeure partie de
ses journées dans la rue, où il était considéré comme " chef de la
bande ". D’ailleurs, que cela soit dans sa vie affective, à la maison ou
à l’école, il commandait.
Une des problématiques d’Alexandre était la violence. En
général, elle était dirigée vers les autres. Cependant, à deux reprises, il a parlé
de suicide (violence retournée contre soi). Un soir, il a enjambé le rebord de la
fenêtre de sa chambre, alors qu’il discutait avec un éducateur. Le connaissant, ce
dernier a diagnostiqué l’acte comme un chantage. De ce fait, il est sorti de la
pièce pour éviter une augmentation de la tension, et un réel passage à l’acte
suicidaire. Alexandre s’est apaisé et l’éducateur a pu, par la suite, discuter
avec lui. Quelques mois plus tard, il nous a fait part, à nouveau de ses idées
suicidaires. Il désirait se jeter sous un camion. Il disait : " Plus rien
ne va dans ma vie, la meilleure chose qu’il puisse m’arriver, c’est de
mourir sous un camion ! ". Il vivait une période de doute et
d’angoisse, il devait prendre des décisions pour son avenir. C’est-à-dire,
rentrer chez lui pour l’année suivante, ou rester au foyer, et par la suite trouver
une autre solution. A mon sens, la vie en famille devait représenter l’inconnu,
alors que le foyer était une sécurité, qu’il devait quitter un jour. Nous avons
constaté que lorsqu’il se trouvait devant une impasse, à un tournant de sa vie ou
dans une situation difficile, des idées suicidaires surgissaient.
En juin 1998, il est rentré chez lui, pour vivre avec sa mère et son
demi-frère. Son référent continue à le suivre pendant cette année de réadaptation...
Je peux donc déduire que le travail effectué par l’équipe éducative a été
positif. Je ne vais pas reprendre toute la situation et tenter d’élaborer une prise
en charge ; les éléments importants du travail des éducateurs sont cités dans la
présentation d’Alexandre. Je vais uniquement utiliser la situation pour livrer mes
réflexions personnelles sur l’approche éducative des adolescents à conduites
suicidaires.
2. Prise en charge
Dans les foyers, la prise en charge des adolescents suicidaires est
similaire aux autres adolescents. Je ne vais donc pas citer tous les actes éducatifs
liés à une prise en charge. Par contre, je désire mettre en évidence quelques aspects
intéressants et pertinents, ils sont cités ci-dessous.
- L’observation. En observant Alexandre vivre au quotidien, les éducateurs ont
remarqué des comportements violents. Ils ont relevé une problématique à étudier, afin
de prévenir les passages à l’acte violent et suicidaire.
- Reconnaître la souffrance. Le dialogue a permis de reconnaître sa souffrance, de
répondre à l’urgence et prévoir un projet éducatif.
- Projet éducatif. Ces deux derniers points permettent l’élaboration d’un
projet éducatif qui comporte objectifs et moyens.
- Bilan de la prise en charge. Une évaluation de la situation a fait remarquer une
évolution, et de ce fait un retour dans sa famille.
- Besoin d’aide de l’aidant. Les prises en charge peuvent être difficiles
à gérer. L’aidant a aussi besoin de conseils et de soutien.
Ces différents points servent de trame pour faire part de mes
réflexions. Avant de les développer, je désire présenter un tableau permettant une
visualisation des différentes étapes des prises en charge.
Tableau 25 : Les étapes des prises en charge
Lorsque l’adolescent présente des risques suicidaires ou a fait
une tentative de suicide, l’éducateur doit mettre en place un accompagnement
spécifique. Il doit d’abord observer, reconnaître la souffrance et évaluer le
réel désir de mort. Si l’adolescent a fait une tentative de suicide,
l’éducateur doit l’emmener au service des urgences de la région ou faire venir
une ambulance. A partir de ce moment-là, comme cité dans le descriptif des centres, il
est hospitalisé ou pris en charge à nouveau par le foyer.
Si un réel désir de mort existe, l’éducateur demande conseil à
un des services de la région qui va organiser un encadrement médical urgent. Par contre,
si l’adolescent ne présente pas de réel désir de mort, l’éducateur met en
place un projet éducatif spécifique avec la proposition d’une psychothérapie. Un
thérapeute est choisi, toutefois, si l’adolescent refuse ce suivi, l’éducateur
doit l’accompagner et être suivi par un conseiller.
Chaque prise en charge demande un bilan, afin de vérifier si le projet
éducatif permet une évolution ou si celui-ci mérite d’être réajusté.
3. L’observation
L’observation de l’adolescent est importante, car il
n’exprime pas forcément son mal-être par la parole. Le corps et les comportements
révèlent souvent l’état intérieur. Certains adolescents évitent de communiquer
leur souffrance par peur d’être considéré comme malade. En outre, la vie
communautaire laisse peu de moments individuels où l’adolescent est libre pour en
parler. A mon avis, la dynamique de groupe, à cet âge, freine l’expression orale
des difficultés. C’est pourquoi, nous devons être davantage attentifs aux
comportements et tenter de favoriser les moments individuels.
De l’observation découle l’interprétation. Celle-ci demande
prudence et objectivité et passe par un échange autant indispensable que nécessaire
entre collaborateurs. L’observation permet d’apercevoir des signes alarmants, et
de développer par la suite une relation de confiance pour les partager avec
l’adolescent. Ces deux points sont traités ci-dessous.
Des signes alarmants
Un des privilèges de l’éducateur est de vivre au quotidien avec
l’adolescent. De ce fait, nous pouvons remarquer des signes alarmants et agir
rapidement. En me basant sur les théories expliquées au chapitre précédent et sur ma
pratique professionnelle, je désire mettre en avant quelques signes alarmants :
- Troubles du sommeil : difficulté d’endormissement, sommeil coupé, insomnie
matinale.
- Mauvaise hygiène : manque de soins corporels.
- Troubles de l’alimentation : dégoût de la nourriture ou au contraire
gloutonnerie.
- Difficultés scolaires : mauvaises notes, problèmes de concentration,
désintérêt total.
- Difficultés dans les relations affectives : retrait du groupe, violence,
manipulation, pas d’ami, se sent seul.
- Humeur dépressive : changement d’humeur, tristesse.
- Dégoût de la vie : idées noires, idéations suicidaires.
- Troubles somatiques : plaintes physiques, douleurs.
- Angoisse ascensionnelle.
Chaque élément ne conduit bien sûr pas au passage à l’acte
suicidaire, mais l’accumulation de difficultés peut suffir à interroger
l’éducateur sur la santé de l’adolescent. Je tiens à mettre en évidence le
dernier point, l’angoisse ascensionnelle. Selon F. Ladame, une montée de
l’angoisse devient de plus en plus envahissante chez l’adolescent avant le
passage à l’acte. Le repérage de cette angoisse nécessite une prise en charge
urgente.
Développer une relation de confiance
Le foyer doit susciter la confiance, où chacun peut exister,
s’exprimer librement et être respecté. Or, la vie communautaire ne garantit pas
toutes ses qualités. Il y a des confrontations, des négociations, des sanctions, des
injustices, etc. C’est en premier à la personne de référence, en l’occurrence
l’éducateur, à veiller au maintien d’un climat de confiance.
L’adolescent ne s’ouvre pas à tous les éducateurs, mais il
lui arrive de se sentir plus à l’aise avec une personne. Cette dernière doit être
prête à pouvoir assumer la relation. En particulier, lorsqu’elle se développe,
l’éducateur peut aussi engager le dialogue, se mettre à l’écoute dans un
esprit empathique, se montrer d’une grande disponibilité et chercher à être un
appui. L’adolescent en détresse est alors plus à même d’exprimer sa
souffrance.
4. Reconnaître la souffrance
Suite à l’entretien avec une des responsables de l’Unité de
Crise pour Adolescents à Genève et en vivant moi-même récemment le deuil de ma
grand-maman, j’ai pris conscience de l’importance de la réalité de la
souffrance de l’autre et de la reconnaître. Mais pourquoi est-ce si important pour
l’adolescent à conduites suicidaires ? La réponse relève en trois
points : partager la douleur, écouter et en parler, évaluer le réel désir de
mort.
Partager la douleur
Une personne ne peut souffrir seule, elle a besoin de partager sa
douleur. Lorsque ma grand-mère est décédée, je désirais que l’on puisse
reconnaître qu’il était dur pour moi de la perdre. ; or, ma souffrance
n’a pas toujours été reconnue. Certaines personnes m’ont dit :
" Tu sais, c’est normal, elle a 87 ans " ou encore
" quel bel âge pour s’en aller, nous on n’y arrivera pas ".
Ces personnes pensaient diminuer ma douleur, alors que ces paroles m’agaçaient et me
culpabilisaient en rapport à ma tristesse. Ce type d’expérience, vécue par
beaucoup est encore plus douloureuse lorsque notre souffrance n’est pas écoutée ou
reconnue. En en parlant, nous nous attendions à une écoute, un encouragement, un
soulagement, etc. Pour l’adolescent, le phénomène est identique. La souffrance peut
paraître minime pour autrui, mais elle est importante pour la personne qui la vit.
Reconnaître, permet entre autres, d’ouvrir le dialogue. Selon la
responsable citée précédemment, plutôt on réagit, plutôt on désamorce la bombe,
c’est-à-dire la détresse qui pourrait l’entraîner au passage à l’acte
suicidaire. Nous pouvons dire aussi que la reconnaissance permet de " crever
l’abcès " et éviter une infection générale qui le conduirait à la
mort ; en d’autres termes, l’adolescent se sentant compris exprime sa
détresse, se sent allégé et disposé à une réflexion constructive.
Ecouter et parler
Pour laisser la personne s’exprimer, nous devons prendre le temps
d’écouter. Ecouter avec le coeur crée la communication affective indispensable à
la poursuite du dialogue.
" Ma plus grande souffrance, c’est de n’avoir jamais
été écoutée "
Cette phrase est pour moi révélatrice de l’importance de
l’écoute. L’adolescent peut remettre en cause la considération des autres à
son égard, lorsqu’il ne se sent pas écouté. Parfois, il tente de nous parler, et
nous ne sommes pas réceptifs, ou bien nous répondons rapidement sans réellement prêter
attention.
Ecouter signifie aussi, être prêt à accueillir le problème et oser
l’affronter. Or parfois, une parole peut être difficile à entendre et véhicule
beaucoup d’émotions. Le danger existe de mettre divers mécanismes de défense en
place pour éviter de souffrir, d’avoir peur de ce qu’il pourrait se passer ou
de ne pas savoir réagir. Par exemple, nous pouvons refuser de comprendre
l’adolescent et ses angoisses, banaliser la souffrance en disant que tous les
adolescents vivent ça, ou encore minimiser et faire semblant de ne pas comprendre et
continuer notre activité.
Pour reconnaître la souffrance, il ne suffit pas d’écouter mais
aussi de parler. En évitant le dialogue, nous pensons lui faire oublier sa détresse,
alors qu’il ne l’oublie pas. Au contraire, ce malaise l’accable davantage.
" Les non-dits sont pire que tout, on sous-estime le poids du
silence ".
L’éducateur acquiert les compétences nécessaires pour
entretenir un dialogue. Par exemple, il peut dire : " nous reconnaissons
que ce que tu vis est difficile. Nous te croyons lorsque tu dis être triste et
inquiet ". Parfois, nous nous sentons mal à l’aise dans certaines
situations. Ce sentiment peut devenir plus confortable, si nous lui disons :
" Nous sommes inquiets par rapport à ton état, et ce que tu nous dis nous
touche ". Partager la douleur, écouter et parler sont les premiers éléments
pour reconnaître la souffrance de l’autre ; cependant, la personne de confiance
doit encore saisir les intentions profondes de l’adolescent en crise.
Je tiens à relever un dernier point avant de passer à
l’évaluation de ce désir de mort. Lorsqu’une tentative de suicide a lieu au
foyer, cette situation ébranle la famille, les adolescents et les éducateurs. Pour
éviter les inquiétudes, les sentiments de culpabilité de certains adolescents et
d’autres passages à l’acte suicidaire, il est préférable de convoquer le
groupe entier et d’en parler. Si l’équipe éducative ne se sent pas prête pour
assumer ce dialogue, un conseiller extérieur peut se déplacer. A mon avis, cette
rencontre doit d’une part permettre aux adolescents de ne pas se sentir responsable
de ce qui s’est passé, et d’autre part leur expliquer qu’il existe des
moyens autres que le passage à l’acte suicidaire pour résoudre les problèmes.
Evaluer le réel désir de mort
La reconnaissance de la souffrance permet à l’éducateur
d’évaluer le réel désir de mort et de mettre en place soit un projet éducatif,
soit un encadrement médical ou d’appeler le service des urgences. Il est évident
que si l’adolescent exprime verbalement son désir de mort, la situation est
considérée comme grave. Par contre, je n’ai pas de " recette "
pour évaluer correctement le désir de mort chez les adolescents qui ne le disent pas
tout de suite, mais l’éducateur peut se référer aux théories, de divers auteurs,
présentées dans le chapitre précédent. Elles donnent des pistes de compréhension et
enrichit l’évaluation. Celle-ci va se porter sur la détresse de l’adolescent.
Provient-elle des changements qui s’opèrent à cet âge ou est-ce de l’ordre de
la pathologie ? S’agit-il de moments dépressifs ou d’une
dépression ? Y a-t-il des facteurs personnels, familiaux et environnementaux qui
peuvent entraîner un passage à l’acte suicidaire ? Lorsque l’évaluation
est difficile, les services régionaux présentés, sont disponibles.
Pendant ces moments-là, l’éducateur parle concrètement avec
l’adolescent de ses inquiétudes et lui permet de les nommer. En outre, évoquer la
mort permet de réfléchir à sa signification, et aux moyens pensés pour y parvenir.
L’éducateur lui fait comprendre que la mort ne va pas lui permettre de voir les
changements dans sa vie.
5. Projet éducatif
La prise en charge générale est en soi thérapeutique, puisque le but
de l’équipe est d’aider l’adolescent à dépasser ses problèmes pour
entrer dans une vie sociale normalisée, rythmée ; elle permet de favoriser une
évolution harmonieuse de son existence. Cette aide se fait au travers des actes de la vie
quotidienne, par exemple : le réveil, les repas, les leçons, les loisirs,
l’ordre de la maison, y compris les visites chez le dentiste, le médecin et autres
soins nécessaires.
Mis à part ces divers actes, un projet spécifique pour chaque patient
est mis en place ; il comporte des objectifs éducatifs et l’accompagnement en
psychothérapie. Voici la description de ces objectifs les plus importants pour un
adolescent à conduites suicidaires. Ils sont consignés sur un tableau afin de suivre la
situation (cf. tableau 26, p. 109). Pour ma part, l’élaboration d’un tel projet
met en évidence l’importance du mandat de l’éducateur.
5.1 Objectifs éducatifs
Reprenons la situation d’Alexandre. Un des objectifs éducatifs
pour Alexandre était de travailler son comportement violent. Apprendre aussi à se
responsabiliser et ne pas rejeter toujours la faute sur les autres avec des sentiments
d’injustice à son égard. Comme la mère n’était pas preneuse dans la prise en
charge de son fils, l’équipe éducative a orienté son travail sur la personnalité
d’Alexandre et ses ressources.
De ce fait, il a eu l’occasion d’être suivi par une
psychologue qui a travaillé avec lui le dialogue intérieur, en mettant en jeu les
différentes facettes de sa personne. Cette aide lui a aussi permis de s’exprimer par
un autre biais que la violence.
A partir de cet exemple, trois objectifs éducatifs sont maintenant
présentés : l’aide à changer de comportement, à s’exprimer et à
s’autonomiser.
Changer de comportement
Alexandre doit comprendre que pour résoudre les problèmes, il existe
d’autres comportements que la violence. Pour y parvenir, l’équipe va
s’investir à fond dans le vécu quotidien d’Alexandre pour tout d’abord
comprendre ses relations. Pour ce faire des rencontres hebdomadaires, un cadre et des
entretiens de famille sont mis sur pied, sans compter l’apport du psychothérapeute.
De là peut alors surgir de nouveaux comportements !
L’objectif de ces rencontres est de discuter ouvertement de la
semaine écoulée, des situations de stress, de ses comportements, inquiétudes, projets
de vie, etc. Avec l’aide de l’éducateur, d’autres stratégies pour
résoudre les problèmes et contenir ses comportements violents et suicidaires sont
abordées. Au cours de l’entretien, il est important que l’adolescent ait la
liberté d’exprimer ses ressentis. Lorsque c’est possible, l’éducateur le
rend participant des moyens à trouver pour résoudre ses problèmes. Par exemple :
faire du sport, voir des amis, les ressources spirituelles, etc. L’adolescent peut
réfléchir et les nommer lors de la prochaine rencontre. Il devient acteur dans la prise
en charge.
L’éducateur ne manque pas non plus de lui faire part des
observations le concernant, pendant la semaine écoulée. Il s’agit d’une part
des points positifs et de l’encourager ; et d’autre part des comportements
violents et suicidaires que l’éducateur refuse sans pour autant rejeter
l’adolescent. L’éducateur est une référence et un soutien qui doit lui donner
envie de changer. Notre regard et nos attitudes sont très importants, ils doivent aider
à reprendre confiance et améliorer l’estime de soi.
Dernier point de l’entretien ; lorsque l’adolescent a
fait une tentative de suicide, et sachant combien il est traumatisant pour tout le monde,
il est important d’en reparler avec lui. Il ne doit pas se retrouver seul confronté
à lui-même. Ses idéations suicidaires peuvent resurgir et le menacer. Il est donc
préférable pour lui, de les dire pour se soulager.
Quand l’équipe éducative pose un cadre ferme et clair,
l’adolescent trouve des points de repères et se sent en sécurité. C’est
l’essentiel. Une continuité dans le suivi, tout en maintenant des exigences
adaptées aux difficultés rencontrées, va l’aider à s’adapter dans sa vie
future. Le danger provient d’exigences trop contraignantes vécues alors comme des
frustrations. Dans ce cas, il va éprouvé de sérieuses difficultés à s’intégrer
dans le réseau social.
La famille est la source de l’identité de la personne et les
difficultés à ce niveau ont très souvent des répercussions sur le comportement.
C’est pourquoi l’entretien avec la famille peut apporter des éléments
décisifs.
Une prise de conscience des parents et une réorganisation du système
familial permettent des changements de comportement chez l’adolescent. Par contre, si
la famille n’est pas participante dans la prise en charge, l’éducateur doit
aider l’adolescent à acquérir la capacité de vivre normalement, malgré le
dysfonctionnement familial.
Les adolescents en foyer, souffrent souvent de divers problèmes
familiaux. Une tentative de suicide peut ébranler la famille, certes, mais
l’éducateur doit donc profiter de ce moment pour mettre à plat les difficultés,
les tensions entre les membres et situer la place de chacun au sein de celle-ci. En outre,
il existe souvent des problèmes de communication et nous devons veiller à laisser chaque
membre s’exprimer sur leur ressentis par rapport à l’acte suicidaire. Les
non-dits sont souvent plus douloureux que les silences. Pour diriger ces entretiens,
l’éducateur peut demander, en accord avec la famille, l’aide d’un
collègue ou d’une autre personne.
S’exprimer
Parmi les moyens d’expression, le langage occupe une place
importante et il est vrai que parler est préférable au passage à l’acte violent ou
suicidaire. Alexandre doit intégrer cet état de fait. Parler, c’est s’ouvrir,
c’est dire ce qu’on pense ; cela conduit à la confrontation d’idées,
à la critique, et peut-être au jugement. La personne en détresse n’a souvent pas
la force d’envisager cette situation. Elle a peur de la confrontation. C’est un
travail de longue haleine. Et pourtant, la confrontation oblige des choix pour se
positionner et de ce fait, entraîne une meilleure connaissance de soi. Cet exercice lui
sera très utile pour établir de bonnes relations sociales.
Mis à part les moments privilégiés lors d’actes quotidiens,
l’éducateur a des moyens à disposition pour faciliter l’expression, il
s’agit des activités ; je les classe en deux catégories. La première englobe
les ateliers d’expression tels que la musique, le dessin, la danse, la peinture, etc.
Ils vont lui permettre d’éprouver des émotions et de les exprimer de manière non
verbale. La deuxième catégorie se compose des activités médiatrices telles
qu’ateliers de poterie, cuisine, photos, sports, etc. Elles permettent des échanges
entre les participants. Notons surtout, que les regards ne se fixent pas sur
l’adolescent mais sur l’objet en commun. Ainsi l’activité médiatrice
détend l’atmosphère et rend la personne plus libre de s’exprimer.
S’autonomiser
Comme cité dans la théorie, l’adolescent est en quête
d’autonomie sur le plan individuel et social ; il devient progressivement
indépendant. L’adolescent commence à assumer ses relations affectives, son argent,
ses études, s’investit dans son projet de vie, etc.
Le rôle de l’éducateur est de l’accompagner dans ce
processus d’autonomie et de prise de responsabilité. L’éducateur doit
" lâcher prise " ; il laisse le jeune prendre des décisions
sans tout contrôler. Sans se désintéresser de lui, il reste au contraire très présent
pour l’orienter et le conseiller (choix professionnel, gestion de biens, etc.).
La principale difficulté pour un adolescent à conduites suicidaires
se trouve justement dans cette prise de responsabilités. Ce problème est connu de
l’éducateur qui me en place des tâches pour le faire progresser. Il peut lui
confier des petites tâches à organiser au sein du foyer. Par exemple :
l’organisation des repas, des commissions, des nettoyages, des loisirs, etc. Le jeune
va ainsi reprendre confiance en lui. Au sujet de ses relations affectives,
l’apprentissage de relations vraies et durables reste long. Et pourtant
lorsqu’il aura vérifié cela dans l’équipe, il se sentira accepté, aimé,
tout près de l’autonomie.
Hors du foyer, l’adolescent doit aussi être capable de gérer sa
vie. Mais il reste tout de même fragile psychologiquement et peut avoir besoin
d’aide. Il est donc indispensable de l’informer valablement des services à
disposition en cas de crise.
5.2 L’accompagnement en
psychothérapie
La tentative de suicide dénote une souffrance dont l’explication
est à rechercher plus profondément. Elle est indispensable dans la prise en charge des
adolescents à conduites suicidaires. Cependant, plusieurs éléments peuvent les freiner
à suivre une psychothérapie. Premièrement, l’adolescent pense qu’elle est
réservée aux malades mentaux. L’éducateur doit donc dédramatiser les
consultations psychiatriques et lui faire prendre conscience qu’il peut en retirer
quelque chose. En d’autres termes, il doit le préparer à comprendre
l’intérêt d’une psychothérapie, et cela peut prendre du temps. Deuxièmement,
il n’a peut-être tout simplement pas envie ou peur de se retrouver seul, face à un
psychothérapeute. Dans ce cas-là, l’éducateur peut l’accompagner aux
séances. Le psychothérapeute peut faire resurgir des éléments du passé et fragiliser
l’adolescent. L’éducateur doit être attentif et le soutenir lors des retours.
La collaboration entre éducateur et psychothérapeute doit être
travaillée davantage, car nos professions sont complémentaires. S’il est
intéressant de faire parler des souvenirs, il est non moins important de savoir comment
vivre avec ce passé. L’accompagnement quotidien des adolescents, nous permet
d’avoir un impact sur leur vie. De ce fait, le psychothérapeute pourrait nous
proposer des pistes de travail. En outre, sans dévoiler les dires de l’adolescent en
thérapie, nous pourrions échanger sur son comportement ou ses émotions pendant la
semaine. Car l’adolescent peut ne pas être le même en psychothérapie et au foyer,
c’est-à-dire exprimer de la tristesse en psychothérapie et sembler joyeux au foyer,
ou inversement. A mon avis, une meilleure collaboration ne peut qu’enrichir la prise
en charge.
Par contre, si l’adolescent refuse un suivi thérapeutique, il
incombe à l’éducateur de l’accompagner dans sa détresse. Ce dernier peut
être conseillé par un des services décrits précédemment. Si l’éducateur ne
prend pas en charge cette détresse, l’adolescent peut le vivre comme un abandon, car
à nouveau, personne ne peut entendre sa détresse. Par contre, si l’éducateur est
suivi, l’adolescent peut investir davantage la relation et se sentir soutenu.
6. Bilan de la prise en charge
Lorsque nous mettons en place un projet éducatif, il est important
d’évaluer les objectifs. Ce moyen permet de vérifier l’évolution de
l’adolescent par rapport à ses difficultés et s’il peut les dépasser. Pour ce
faire, l’éducateur crée une grille d’évaluation comme il lui convient, en
reprenant chaque objectif. Etablissons celle d’Alexandre avec les trois points
suivants : changer de comportement, s’exprimer et s’autonomiser. Cette
grille rassemble en quatre colonnes toutes les informations notées par écrit dès
l’élaboration des objectifs. Elle force à tirer une synthèse pour finalement le
bilan de la prise en charge (cf. tableau 26, p. 109).
La première colonne comporte la date de l’entretien. La deuxième
colonne spécifie l’objectif et permet la prise de note des situations et des
observations. Quant à la troisième colonne, elle comporte les résolutions entreprises
par l’adolescent dans la situation. Elle permet aussi de noter l’évaluation de
son comportement. Et la quatrième colonne donne à l’éducateur la possibilité
d’écrire les résultats de l’entretien et les nouveaux objectifs si
nécessaire.
Tableau 26 : Grille d’évaluation des objectifs
Objectif 1 :
changer de comportement |
Date |
Situation de stress/ comportement |
Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats d’entretien/ nouveaux objectifs |
|
|
|
|
Objectif 2 :
s’exprimer |
Date |
Expression en individuelle |
Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats d’entretien/ nouveaux objectifs |
|
|
|
|
Date |
Expression en groupe |
Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats d’entretien/ nouveaux objectifs |
|
|
|
|
Date |
Expression en psycho- thérapie |
Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats d’entretien/ nouveaux objectifs |
|
|
|
|
Objectif 3 :
s’autonomiser |
Date |
Relations affectives |
Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats d’entretien/ nouveaux objectifs |
|
|
|
|
Date |
Argent |
Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats d’entretien/ nouveaux objectifs |
|
|
|
|
Date |
Etudes et formation |
Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats d’entretien/ nouveaux objectifs |
|
|
|
|
Date |
Projet de vie |
Résolutions entreprises/ évaluations |
Résultats d’entretien/ nouveaux objectifs |
|
|
|
|
7. Le besoin d’aide de
l’aidant
Prendre en charge des adolescents à conduites suicidaires peut devenir
éprouvant pour l’éducateur. A ce sujet, je désire développer deux points :
reconnaître ses limites et les lieux de partage.
Reconnaître ses limites
Notre siècle technologique et des sciences humaines a fait naître, à
mon sens, une nouvelle maladie, c’est le perfectionnisme. L’éducateur doit
réussir, être respecté, mais a-t-il le droit aux faiblesses ? L’éducateur
peut se trouver dans le désarroi, lorsqu’il n’arrive plus à prendre en charge
un adolescent. Ceci est d’autant plus éprouvant lorsqu’il s’agit
d’adolescents à conduites suicidaires. La mort nous remet en question et peut
représenter aussi, l’échec du suivi apporté. Pour éviter de se retrouver dans
l’impasse, il se peut que l’éducateur tente de rester neutre dans les
relations. Dans un dictionnaire, neutre signifie : " Qui n’est
marqué par aucun accent, aucun sentiment ". Cette définition confirme
l’impossibilité de la neutralité dans notre travail. Nous devons donc apprendre à
reconnaître nos limites et accepter la collaboration et l’aide d’autrui. Je
crois qu’il est important aussi pour l’adolescent de ne pas être entouré de
héros mais de personnes humaines avec leurs forces et leurs faiblesses. Pour ma part, les
lieux de partage, cités ci-dessous, peuvent être un excellent moyen offert à
l’aidant.
Les lieux de partage
Pour permettre une décharge émotionnelle et un éclairage sur les
situations difficiles, les éducateurs peuvent organiser des supervisions de groupe ou
individuelles. D’ailleurs, la majorité des foyers organisent ces rencontres. En
général, elles concernent davantage les difficultés des adolescents que celles des
éducateurs. A la suite de cette constatation, serait-il judicieux d’organiser des
groupes de partage pour éducateurs travaillant avec des adolescents suicidaires ?
Reconnaître ses limites avec authenticité et transparence au milieu d’autres
collaborateurs est indispensable pour poursuivre sa mission. Ainsi une mise en commun des
situations, émotions, désarrois et attitudes encourage et enrichit chacun. La rencontre
de personnes vivant les mêmes difficultés déculpabilisent et réconfortent également.
Un groupe de partage de ce genre donne de la force dans la prise en
charge et pourrait diminuer les mécanismes de défense que nous utilisons trop souvent
même inconsciemment.
Conclusion
Pour prendre en charge des adolescents à conduites suicidaires,
j’ai relevé cinq points importants. Il s’agit de l’observation, de
reconnaître la souffrance, du projet éducatif, du bilan de la prise en charge et du
besoin d’aide de l’aidant.
L’observation sert à relever une problématique, en
l’occurrence, elle a permis aux éducateurs de repérer les comportements violents et
suicidaires. Reconnaître la souffrance permet d’ouvrir le dialogue et
d’évaluer le réel désir de mort. Le projet éducatif concrétise la prise en
charge par le biais d’objectifs spécifiques. Quant au bilan de la prise en charge,
celui-ci évalue la situation de l’adolescent et permet un réajustement des
objectifs s’ils ne sont pas atteints. Pour finir, je souligne l’importance
d’apporter une aide aux éducateurs, car, nous le savons, le suivi d’adolescents
à conduites suicidaires l’éprouve surtout psychiquement.
A partir de mon expérience professionnelle, certes encore petite, je
peux dire que les éducateurs ne sont pas des psychothérapeutes. Par contre, les actes
quotidiens sont en soi thérapeutiques. Ils tentent avec leur qualité d’être humain
et les outils professionnels, d’offrir à l’adolescent une issue à sa
détresse. Une collaboration plus intense entres psychothérapeutes et éducateurs
devraient exister. Ainsi la prise en charge des adolescents serait plus complète et
harmonieuse.
Arrivé au terme de ce travail de recherche, je désire en apporter une
conclusion générale. Elle fait l’objet des pages suivantes.
___________________________
Conclusion générale
Remettre en question la vie, penser à la mort, sont des réflexions
faisant partie du processus de maturation de l’individu dans son adolescence ;
mais s’il en arrive à l’idéation suicidaire, cela démontre une souffrance qui
doit d’être découverte et reconnue. Qu’est-ce que le canton de Vaud met en
place comme infrastructure pour le suivi de ces jeunes ? Comment en sont-ils arrivés
là ? Quel est le rôle de l’éducateur dans l’accompagnement ? Ce
travail de recherche a tenté de répondre à ces trois questions.
Dans la première partie, les descriptifs des centres et unités
d’accompagnement psychiatrique présentent les buts et moyens de prise en charge des
adolescents suicidants. Je constate qu’il n’existe pas de centre d’accueil
pour ces situations d’urgence. Actuellement, la seule unité d’hospitalisation
est l’UHPA. Toutefois, la capacité d’accueil journalière est de sept
adolescents. Cette unité ne peut pas répondre à toutes les demandes urgentes. Nous
devons offrir d’autres lieux de transition. Les conduites suicidaires sont
importantes dans notre société, en particulier les adolescents et nous devons nous en
occuper. Nous ne pouvons pas banaliser cet acte suicidaire, car si aucun changement ne
s’opère dans leur vie, ils risquent de le réitérer. Leur entourage (la famille,
les amis ou les professionnels du secteur social) peut aussi offrir un soutien et les
accompagner. Ce travail de recherche montre que la prise en charge idéale passe par un
accompagnement de l’adolescent dans sa vie de tous les jours et un suivi
thérapeutique.
Dans la deuxième partie, les différents apports théoriques nous
renseignent sur les éléments pouvant entraîner des comportements suicidaires,
considérés d’ailleurs souvent comme pathologiques. De ce fait, la prise en charge
d’adolescents nécessite une psychothérapie pour mettre en lumière les éléments
déclencheurs.
La troisième partie est pratique. Les pistes de travail évoquées
montrent l’importance de notre suivi, en tant qu’éducateur. En vivant au
quotidien avec eux, nous avons l’avantage de pouvoir repérer les signes alarmants et
prévenir aussi les passages à l’acte. Les apports théoriques et la connaissance
des services offrent une prise en charge professionnelle. Ils permettent à
l’éducateur de mettre en place un projet d’accompagnement de l’adolescent.
A la suite de l’élaboration de ce travail de diplôme, je
constate un décalage entre le projet initial et le travail effectué. Les objectifs de
départ étaient de décrire les centres médicalisés prenant en charge des adolescents
suicidants, d’analyser une littérature spécifique à l’approche éducative du
comportement suicidaire, de confronter les modèles médical et socio-éducatif et
d’amener des réflexions personnelles sur l’action socio-éducative.
Le décalage se situe au niveau de l’analyse d’une
littérature spécifique sur l’approche éducative. N’ayant pas trouvé
d’ouvrages spécifiques, je n’ai pas pu comparer les modèles médical et
socio-éducatif. En fait, les recherches bibliographiques furent longues et sans
résultat. Je cherchais, peut-être, des recettes toutes prêtes sur l’accompagnement
d’adolescents suicidaires, mais cette problématique est beaucoup plus complexe. Il
existe plus d’écrits sur la compréhension de l’acte suicidaire que sur la
prise en charge de ces personnes. Cette découverte est étonnante dans un tel domaine.
Passons au bilan personnel. Par le biais de ce travail, j’ai
découvert la structure psychiatrique vaudoise, la complexité des adolescents à
conduites suicidaires, leur prise en charge et l’apparition de mes limites.
J’ai choisi ce sujet de mémoire sans connaître les services
susceptibles de prendre en charge des adolescents suicidants. La recherche de ces services
et par la suite leur présentation, ont été une découverte très enrichissante.
Toutefois, j’ai rencontré quelques difficultés à traiter les informations, car le
questionnaire créé n’était pas assez complet et précis. J’ai dû à
plusieurs reprises recontacter les services pour récolter davantage de
renseignements ; leur disponibilité et leur collaboration ont été une grande aide.
Finalement, le questionnaire a principalement servi de base aux entretiens.
Prendre en charge des adolescents à conduites suicidaires est une
chose complexe ! Il est difficile de percevoir les buts recherchés au travers du
passage à l’acte ; il peut s’agir d’un réel désir de mort,
d’une fuite, d’un message, d’un chantage, etc. Nous devons trouver donc des
moyens pour les comprendre premièrement ; et deuxièmement nous devons leur donner
un espoir de vivre, les aider à dépasser cette impasse et trouver d’autres
possibilités que la mort pour résoudre leurs problèmes. Un de ces moyens réside dans
le soutien d’une personne extérieure. Nous avons donc un rôle à jouer : celui
de les accompagner dans la proximité, les écouter et dialoguer. L’argument prônant
la liberté individuelle en laissant une personne commettre un suicide, n’est pas du
tout convaincant. Et ceci d’autant plus lorsqu’il s’agit d’adolescents
ne pouvant pas mesurer tous les enjeux de leur acte.
En ce qui concerne les prises en charge, j’ai découvert que le
travail effectué par les services psychiatriques et les foyers est complémentaire. Les
psychiatres soignent les pathologies, et les éducateurs accompagnent et offrent des
points de repères avec sécurité. Ces deux professions sont appelées à développer
leur collaboration pour harmoniser leurs travaux et mettre en commun leurs objectifs.
Ce travail de recherche a permis aussi des réflexions sur
l’approche éducative. Il serait intéressant de donner suite à cette ébauche et
rassembler les expériences des professionnels pour créer un concept de prise en charge
spécifique pour adolescents à conduites suicidaires.
Traiter un sujet comme les tentatives de suicide des adolescents
n’est pas facile. Ce thème évoque la vie, la mort, la détresse, etc. Ce travail de
diplôme a fait apparaître mes limites, celle de la compréhension de l’acte
suicidaire d’une part et de la gestion de la souffrance d’autrui d’autre
part. La lecture des divers ouvrages a provoqué quelques moments d’angoisse. Le
désir de mort de ces adolescents m’a ébranlée. J’ai réellement pris
conscience, avec l’aide d’un superviseur, de ce qu’ils pouvaient vivre.
Tenter de comprendre le pourquoi des comportements suicidaires a suscité quelques
interrogations sur le sens que je donne à ma vie, à ma mort et sur mes propres moyens de
dépasser ce genre de questions.
Cette expérience a été difficile, cependant mes ressentis m’ont
permis de faire le lien avec les ressentis possibles dans la pratique professionnelle.
D’autre part, en tant que professionnels, nous devons apprendre à gérer la
souffrance d’autrui. Elle nous affecte, nous démunit et nous rend impuissant. Je
crois qu’il est important d’être aidé, suivi et encouragé pour faire face à
ces vagues de sentiments qui peuvent empêcher une prise en charge adéquate.
Pour conclure, je désire faire part d’une question ouverte qui
m’a suivie tout au long de ce travail : serait-il judicieux de créer un lieu
convivial et anonyme où les adolescents suicidaires pourraient venir discuter ? Je
crois que la disponibilité et l’écoute des responsables et des personnes
expérimentées favoriseraient le partage avec ceux qui n’ont pas de confident. En
outre, les rencontres pourraient encourager les plus démunis à prendre exemple sur ceux
qui ont pu dépasser les difficultés. Par ailleurs, les partages pourraient, à mon avis,
désamorcer les crises et diminuer les résistances au travail thérapeutique qui leur
serait conseillé.
Le suicide fait peur et très souvent nous évitons d’en parler.
Par la proximité avec les adolescents, ils se sentent moins seuls... Alors, allons à
leur rencontre... Et par le dialogue, ils se soulagent... Alors,
parlons-en ! ! !